La politique est un combat. Et l’Alliance un défi quotidien. Les membres du G8, en quête de consensus sur leur programme, en font l’expérience.
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Après avoir constitué la « Coalition pour la démocratie et le progrès », les leaders des huit formations ainsi sollicitées s’efforcent depuis le 5 octobre dernier, au cours de négociations quasi non-stop, de poser les bases d’un programme politique susceptible de recueillir l’approbation de leurs instances dirigeantes. Les conciliabules du dernier week-end n’y ont pas suffi. La présentation à la presse a dû être une première, puis une deuxième fois reportée. Nul ne s’en étonnera.
En attendant l'acte fondateur
Le contraire eut été étonnant tant il s’agit pour les uns et les autres de faire converger des approches idéologiques et partisanes singulièrement éloignées. Qu’il s’agisse d’économie, de vision de la société, de politique sociale, de politique étrangère… De politique tout court.
L’ambition portée est grande : « Cristalliser une offre politique, basée sur un positionnement et un programme clairement définis, et portés par une coalition de partis avec des composants lucides. »
Les sept priorités le sont tout autant : achèvement de la « construction institutionnelle nationale », mise en œuvre du « projet de régionalisation », « renforcement de l’Etat de droit et des institutions consacrées par la Constitution », « libération de tous les mécanismes de structuration afin d’augmenter la croissance économique », « consolidation des politiques de lutte contre la pauvreté et la précarité », « rassemblement des conditions propices à la création de richesses et d’opportunités d’emploi au profit de la jeunesse et des diplômés », et enfin « ouverture du Maroc à l’environnement étranger » (espace maghrébin, partenariats euroméditerranéens…).
Mais l’acte fondateur du G8, à destination tant des militants que des électeurs, cet acte-là tarde encore à se concrétiser.
Pour l’heure, les associés au sein du G8 en sont encore aux préliminaires. Salaheddine Mezouar aurait sans doute préféré aller plus vite en besogne, et présenter dès cette semaine ce programme appelé à faire la différence et à susciter l’adhésion la plus large.
Mercredi soir, le président du RNI a même failli annuler la conférence de presse programmée finalement ce jeudi matin. La première synthèse, fruit de négociations qui se seront prolongées tard dans la nuit – 3 heures du matin – , esquissera simplement les contours d’une plateforme assez générale. Un canevas de bonnes intentions plus qu’un véritable programme.
A l’impossible, nul n’est tenu. La précipitation, et parfois l’improvisation, qui ont prévalu lors de la constitution de l’Alliance – on crée une coalition avant même de s’entendre sur un programme – ne pouvaient guère déboucher sur un autre calendrier. Les huit, qui réaffirmaient hier « que le rapprochement entre eux n’était en aucun cas instrumentalisé à des fins purement politiques », se trouvent aujourd’hui confronté à un principe de réalité… politique.
Faire cohabiter libéralisme, socialisme, écologisme, et islamisme au sein d’un programme de législature. « Notre objectif, affirme le G8, est de parvenir à un changement qualitatif du mode opératoire des partis politiques marocains et d’être au niveau des véritables défis auxquels le pays est confronté… » Manifestement, le « changement qualitatif du mode opératoire » peine à se concrétiser.
Si les « deux défis » majeurs – « la réponse à la demande sociale » exprimée par nos concitoyens, et « la place du Maroc dans les nouveaux équilibres des rapports de forces » au plan international – que le G8 entend relever sont amplement partagés, les réponses à apporter ne font pas encore tout à fait consensus au sein de l’Alliance. Ce devrait être l’objet de nouvelles nuits blanches entre partenaires, à la veille d’une toute prochaine grande « convention » appelée à sceller, avec 20 engagements, un programme de gouvernement.
Henri Loizeau |