| Des sĂ©curitaires et des reprĂ©sentants dâorganisations des droits de lâHomme, se sont rĂ©unis le 5 fĂ©vrier pour dĂ©battre de la bonne gestion en matiĂšre de sĂ©curitĂ©. Pour braquer les projecteurs sur les bavures et autres dysfonctionnements des services secrets, essentiellement la DGST, quelques sĂ©curitaires ont acceptĂ© de faire le dĂ©placement, vendredi dernier, et de dĂ©battre de la bonne gouvernance en matiĂšre de sĂ©curitĂ© Ă  Rabat. Aux invitations qui ont Ă©tĂ© envoyĂ©es aux diffĂ©rents services de sĂ©curitĂ© civils et militaires, le ministre de lâIntĂ©rieur, celui de la Justice et la DGSN ont rĂ©pondu favorablement alors que dâautres services « plus secrets » ont prĂ©fĂ©rĂ© sâabstenir. Une rencontre qui sâest ouverte avec la prĂ©sentation de la derniĂšre publication du Centre d'Ă©tudes en droits humains et dĂ©mocratie (CEDHD) sur la lĂ©gislation marocaine relative Ă  la gouvernance par Lahbib Belkouch, son directeur. La  rencontre de Rabat visait dâabord Ă  Ă©tablir un Ă©tat des lieux avant de dĂ©ïŹnir le champ dâaction de chaque service de sĂ©curitĂ©. Pour Lahbib Belkouch (par ailleurs  membre du bureau politique du PAM) : « La question fait partie des recommandations de lâIER publiĂ©es en 2006, mais les rĂ©formes avaient dĂ©butĂ© bien avant, avec la rĂ©forme constitutionnelle et celle du code pĂ©nal. » Mustapha Manouzi, prĂ©sident du Forum marocain vĂ©ritĂ© et  justice (FMVJ), ne partage pas le mĂȘme enthousiasme : « La bonne gouvernance sĂ©curitaire nâest pas uniquement une affaire de lĂ©gislation, la dĂ©cision sĂ©curitaire relĂšve de la responsabilitĂ© du gouvernement en premier lieu, il faut une volontĂ© politique rĂ©elle. » Disparitions forcĂ©es  Lâun des principaux reproches reste lâinadĂ©quation des lois sĂ©curitaires avec la situation actuelle du pays, certains textes Ă©tant anachroniques. De plus, certaines lois qui rĂ©gissent des organes de sĂ©curitĂ© demeurent introuvables ou circulent en interne, comme câest le cas pour la Brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ) qui est rĂ©gie par une note interne de la DGSN. Cette brigade reprĂ©sente aujourdâhui un bureau national composĂ© de quatre pĂŽles et son champ dâaction touche aussi bien le terrorisme, le crime ïŹnancier que la cybercriminalitĂ©. Cette unitĂ© travaille aussi en collaboration avec la DGST et les RG. Le texte de loi qui rĂ©git les prĂ©rogatives des gouverneurs et walis est, lui aussi, introuvable ! Pour lâuniversitaire Driss Belmahi : « Le gouvernement se doit de corriger les dysfonctionnements relevĂ©s au niveau des textes de loi relatifs Ă  ce secteur, certaines lois datent de 1916 comme celle relative Ă  la possession dâexplosifs ou dâarmes Ă  feu. La loi sur lâĂ©tat dâalerte en Ă©tat de guerre date de 1938 ! » Le gouvernement a souvent Ă©tĂ© interpellĂ©, Ă  lâoccasion de disparitions forcĂ©es, sur le statut de la DST et de ses agents, ainsi que sur ce qui se passe dans son siĂšge de TĂ©mara. Le 22 novembre dernier, la rĂ©ponse ofïŹcielle est tombĂ©e : « La DGST coordonne et collecte les informations sur des affaires liĂ©es au terrorisme et au contre-espionnage. Avec lâapparition de nouveaux phĂ©nomĂšnes de criminalitĂ©, cet organisme a Ă©tĂ© chargĂ© de nouvelles missions Ă  lâinstar dâorganismes similaires dans le monde. » Pourtant, tous les analystes sâaccordent Ă  reconnaĂźtre que la DGST nâest pas habilitĂ©e Ă  interpeller les suspects car ses agents nâont pas la qualitĂ© dâofïŹ cier de police judicaire. Pire encore, le rapport du Groupe sur la disparition forcĂ©e a rappelĂ© que les actions de cette structure ne sont pas conformes au Code de procĂ©dure pĂ©nale. Ainsi, le Maroc est-il appelĂ© Ă  revoir le champ dâaction de ses services secrets, dont certains travaillent toujours Ă  la limite de la lĂ©galitĂ©. Mohamed Madani | 
    
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        | Trois questions Ă  Lahbib Belkouch, Directeur du Centre d'Ă©tudes en droits humains et dĂ©mocratie (CEDHD) Depuis la publication du rapport de lâIER, quel bilan faites-vous de la gouvernance sĂ©curitaire ? L AHBIB BELKOUCH : Nous avons constatĂ©, depuis lâĂ©laboration du rapport de lâIER, quâil y a plusieurs indicateurs qui tĂ©moignent dâune rĂ©elle volontĂ© politique de rĂ©forme en la matiĂšre. On peut citer la rĂ©vision de lâorganisation dâun certain nombre de services de sĂ©curitĂ©, on a aussi constatĂ© lâintĂ©gration de la composante « droits humains » dans leur formation. Entre la premiĂšre rencontre en 2008 et la deuxiĂšme en 2010,  nous avons constatĂ© une rĂ©elle volontĂ© dâouverture. Comment les services de sĂ©curitĂ© ont-ils accueilli votre initiative ?  Plusieurs organismes de sĂ©curitĂ© ont rĂ©pondu favorablement Ă  notre invitation, ils sont venus, pour la plupart, avec des propositions concrĂštes. Mais il faut savoir que nous sommes face Ă  un secteur sensible et il faut espĂ©rer dĂ©passer les blocages psychologiques pour pouvoir Ă©tablir des plans de travail en commun. La ïŹn des exactions passĂ©es fait partie des recommandations de lâIER, on a pourtant souvent constatĂ© certains dĂ©passements commis par des services de sĂ©curité⊠Pour faire face aux dĂ©passements dans lâutilisation de la force publique, de nombreux mĂ©canismes devraient intervenir. Je pense notamment aux commissions parlementaires. Câest aux Ă©lus de la nation de faire le suivi et lâinterpellation des organismes concernĂ©s. Il y a certes un travail de fond qui doit ĂȘtre fait pour la mise Ă  niveau du personnel et des stratĂ©gies dâinterventions. Lâaspect juridique et la volontĂ© politique sont importants, mais ils restent insufïŹsants sâils ne sâaccompagnent pas dâune mise Ă  niveau des diffĂ©rents services de sĂ©curitĂ©. Propos recueillis par M.M. |  |