Absentéisme, manque de coordination entre les deux Chambres, défaut d’évaluation des députés, le souverain a réprouvé le quotidien de la coupole, appelant les parlementaires à se ressaisir pour recouvrer la confiance des citoyens. Explication de texte.
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Les députés des deux Chambres étaient dans leurs petits souliers ce vendredi 8 octobre. Comme à l’accoutumée, Mohammed VI n’a pas mis de gants pour dire tout le bien qu’il pensait du travail de ces honorables représentants du peuple. Dans un discours musclé, le roi a donné le coup d’envoi de la rentrée parlementaire, fustigeant au passage les us et coutumes des élus qui ont contribué fortement à discréditer l'action politique. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la représentation du peuple est touchée dans ses fondamentaux. Quelle que soit leur opinion politique, les Marocains sont unanimes à établir ce constat. Le pacte social entre les représentants du peuple et la population est défait, comme le prouvent les abstentions à répétition qui marquent régulièrement beaucoup plus les échéances législatives que les communales. D’où l’appel royal aux parlementaires pour faire l’effort nécessaire en vue de retrouver la confiance des populations.
Une piètre image
Pour le souverain, la question est d’une urgence absolue : « Dans quelle mesure le Parlement assume-t-il pleinement son rôle de levier démocratique de notre modèle de développement ? » Selon la vision du chef de l’Etat, cela requiert des partis politiques et des groupes parlementaires « qu'ils s'astreignent à une bonne gouvernance parlementaire et qu'ils s'imprègnent, à cet effet, d'une nouvelle culture politique, conjuguée avec une pratique parlementaire efficace et une plus forte présence des membres ».
Leurs travaux et leurs contributions doivent apporter une réponse effective aux préoccupations du peuple. Or, le Parlement avec ses séances de questions orales soporifiques, ses députés qui pratiquent allègrement le Parlement buissonnier et ses représentants corrompus impliqués dans toutes sortes de trafics, donnent une piètre image de la coupole.
Pourtant, les députés devraient en principe se préoccuper du développement économique, social et culturel de leur circonscription, en liaison avec les autres élus. Ces représentants de la Nation sont en théorie à l'écoute de leurs concitoyens. Ils doivent s'efforcer de trouver une solution à leurs problèmes en intervenant auprès des administrations. Ils se font l'écho de leurs préoccupations au Parlement pour critiquer, faire progresser la législation et améliorer son application. Les lois sont votées par le Parlement, selon une procédure fixée par la Constitution. Le Parlement vote, chaque année, des dizaines de lois et de nombreux amendements, au terme d'un long processus d'étude, de préparation et de discussion. Combien de députés peuvent se targuer d’avoir piloté une commission d'enquête sur la gestion de tel ou tel service public ? Dans la pratique, les citoyens ne rencontrent souvent leur élu qu’à une seule occasion, au moment où ce dernier cherche à obtenir leurs voix ; car une fois les urnes fermées, il disparaît dans la nature jusqu’aux prochaines échéances électorales.
Parce que « la qualité de membre du Parlement n'est pas tant un privilège personnel, mais plutôt une charge impliquant le devoir de s'atteler résolument, de façon responsable et engagée, à la recherche de solutions réalistes aux questions pressantes qui préoccupent le peuple », le souverain a parlé pour la première fois de reddition des comptes dont doivent faire l'objet les parlementaires au terme de leur mandat.
Abdellatif El Azizi |