Le Premier ministre s’est livré au pénible exercice de présentation du bilan de l’action de son gouvernement, au cours de deux années d’exercice, et a présenté l’état du Maroc tel qu’il se profile aujourd’hui.
***
Considérée comme un non-événement, la présentation du bilan du gouvernement devant les députés n’a pas dérogé à la règle. Abbas El Fassi a pourtant mené jusqu’au bout l’exercice, parfois lassant, et par moments soporifique, de dresser la liste des « avancées enregistrées par le pays sous le gouvernement actuel ». S’il y avait là tout le gotha gouvernemental et parlementaire (même Fouad Ali El Himma avait tenu à faire le déplacement), on pouvait noter l’absence de la moitié des députés. Apparemment peu affecté par les critiques de l’opposition, Abbas El Fassi a pris tout son temps pour défendre le bilan de son équipe : deux heures d’un discours fleuve où le Premier ministre a passé en revue les principaux chantiers, prenant soin de ne pas aborder les dossiers épineux. Le satisfecit gouvernemental est bien entendu partagé par les députés de sa coalition. Pour Mohamed Kafi Cherrat, membre du groupe istiqlalien Pour l’unité et l’égalitarisme, à la Chambre des conseillers, « la déclaration du Premier ministre était claire et chiffrée. Le bilan de mi-mandat est dans sa globalité positif. Il y a toujours des chantiers qui restent ouverts. Certains points négatifs de l’action gouvernementale sont liés à la contrainte de temps et de moyens ». Même son de cloche du côté des ministres : « Plus qu’une question de crédibilité, on a un problème de communication. Le gouvernement a fait du très bon travail, il a été très courageux sur de nombreux dossiers. Notre bilan est un bilan qu’aucun autre gouvernement n’a pu aligner. Mais pour la presse, seules les critiques de l’opposition ont droit de cité », s’insurge un membre du gouvernement, apparemment bien remonté contre les médias. « Courage », le mot est bien exagéré, puisque l’une des principales critiques faites à Abbas El Fassi, c’est justement d’avoir manqué de courage en faisant l’impasse sur les dossiers chauds tels que les derniers rapports de la Cour des comptes qui ont épinglé bien plus d’une administration.
Quant au dossier du social, les représentants des centrales syndicales ont exprimé leur mécontentement face au bilan de l'action gouvernementale, rappelant à cet effet le blocage du dialogue social. Selon Mohamed Daidaa, secrétaire général du Syndicat national démocratique des Finances : « La déclaration du Premier ministre est généraliste et n’apporte aucun élément nouveau. Concernant le volet social, il n y a rien de spécial même si le Premier ministre avance le chiffre de 19 milliards de dirhams comme coût global du dialogue social. On va d’ailleurs exiger de lui qu’il nous donne les détails des chiffres qu’il avance. Tous les fonctionnaires savent qu’ils ont été augmentés de deux à trois dirhams par jour, alors que la baisse des impôts a, en fait, beaucoup plus bénéficié au patronat qu’aux salariés », soutient Daidaa.
Le PAM va encore plus loin. Hakim Benchemass, chef du groupe parlementaire du PAM à la Deuxième Chambre : « Nous avons été étonnés de distinguer des chantiers lancés par le roi et présentés par Abbas El Fassi comme un travail du gouvernement. Le discours du Premier ministre est généraliste, non chiffré et ne permet pas de mesurer les réalisations depuis le discours de politique générale. Nous nous attendions pourtant à ce que le gouvernement ait le courage de laisser de côté la langue de bois pour s’attarder sur les questions essentielles. Nous allons étudier dans le détail le discours du Premier ministre pour apporter les réponses nécessaires. » Le week-end s’annonce chaud pour l’équipe El Fassi, avec les réponses des députés au Parlement, vendredi ; et la Chambre des conseillers qui tiendra, lundi prochain, une séance plénière consacrée aux interventions des groupes dans le cadre des débats autour du bilan du gouvernement.
Abdellatif El Azizi |
MORCEAUX CHOISIS
Réforme de la Justice D’après El Fassi, le budget du secteur de la Justice a connu une importante augmentation en vue de renforcer ses capacités. Au menu également, la lutte contre la corruption, la moralisation de la vie publique, la révision des systèmes des agréments et autres avantages. Sur le plan institutionnel, El Fassi a souligné que le gouvernement a mis en place l'Instance centrale de lutte contre la corruption et l'unité de traitement des données financières pour dynamiser la loi sur la lutte contre le blanchiment. Il cite aussi la loi sur la déclaration du patrimoine.
Démocratie locale La stratégie du gouvernement vise à renforcer la décentralisation à travers l'adoption de la régionalisation en tant que choix économique dans les politiques publiques. « De grands chantiers structurants sont en perspective pour remodeler la relation de l'Etat avec les entités territoriales, sur la base de la complémentarité dans les fonctions et la gestion de proximité, à leur tête le chantier de régionalisation élargie », a-t-il insisté.
Champ religieux Le Premier ministre a indiqué que « le gouvernement continuait de bâtir le modèle marocain en matière de gestion de la chose religieuse ». Quel modèle ? El Fassi a brossé un tableau succinct des caractéristiques du fameux modèle marocain. Il a ainsi souligné qu'un intérêt accru était accordé à la création de nouvelles écoles coraniques, et aux mosquées à travers l'application du programme national de mise à niveau, la réforme de l'enseignement traditionnel et le plan pour l'encadrement des ouléma et des prédicatrices.
Culture Dans un clin d’œil évident au PJD, le chef du gouvernement a fait l’apologie « des festivals qui mettent en valeur la culture et le patrimoine du Royaume ». Le soutien du gouvernement à la culture s’est concrétisé par « la mise en place du plan relatif aux médiathèques, la réhabilitation du patrimoine à travers l'intérêt porté aux musées », sans oublier l'éducation à la citoyenneté et aux droits de l'Homme dans les programmes scolaires.
Diplomatie La Palestine a fait l’essentiel du discours du Premier ministre sur la diplomatie marocaine au Proche-Orient. Le gouvernement répondait aux critiques égyptiennes visant les actions du Royaume au niveau d’Al-Qods. El Fassi a souligné que la diplomatie marocaine travaillait à contrecarrer la modification du statut des terres palestiniennes occupées. Sahara oblige, le Maroc, a-t-il précisé, a réaffirmé son engagement à poursuivre ses actions en vue de dynamiser l'Union du Maghreb arabe (UMA)et a appelé « l'Algérie à ouvrir les frontières pour favoriser la mise en place des conditions propres à réaliser le développement du Maghreb arabe ».
PrĂ©sides occupĂ©s El Fassi a appelĂ© l'Espagne « à engager le dialogue pour mettre fin Ă l'occupation de Sebta et Melilia ». La rĂ©ponse des Espagnols n’a pas tardĂ© puisque la vice-prĂ©sidente du gouvernement espagnol, MarĂa Teresa Fernández de la Vega Sanz, a confiĂ© Ă la presse ibĂ©rique que « la souverainetĂ© et le cachet espagnol de Sebta et Melilia ne souffraient d’aucune discussion, sous quelque forme que ce soit ». |
|