Trois centrales dominent les 17 syndicats existants
L’UGTM (Union générale des travailleurs du Maroc) Chabat à feu et à sang
Quand Abderrazak Afilal, miné par la maladie, a fait de Hamid Chabat son confident, il n’imaginait pas qu’il avait fait entrer le loup dans la bergerie. Très vite entre lui et son poulain, les rapports vont virer à l’affrontement direct avant que le disciple ne finisse par faire mordre la poussière au maître. Résultat, c’est une véritable bête de scène qui dirige aujourd’hui le puissant syndicat de l’Istiqlal. Rusé, communicateur de talent, Chabat sait doser ses sorties ; son syndicat qu’il utilise souvent à des fins politiques lui sert de faire-valoir auprès de l’Istiqlal certes, mais il lui permet également de tenir la dragée haute aux autres formations politiques. L’ex-ouvrier qualifié est d’ailleurs un fin politique qui, jusqu’à présent, a su habilement mener sa barque entre les surenchères de la mairie de Fès et les contraintes de la vie politique nationale. Si Abbas El Fassi tient encore tête à ses adversaires politiques, c’est un peu grâce à la combativité de Chabat et à la crainte qu’il inspire autour de lui. Quant à l’UGTM, ce qui vaut pour les autres syndicats vaut pour la centrale de l’Istiqlal ; à savoir une érosion de sa représentativité et un fonctionnement sclérosé.
L’ UMT (Union marocaine du travail) La gérontocratie au pouvoir
Le cas Mahjoub Benseddik aurait-il échappé aux rédacteurs du Guiness ? C’est pourtant, aujourd’hui, le plus vieux chef d’un syndicat qui est resté 55 ans à la tête de l’UMT. L’homme qui s’était fait remarquer en se faisant arrêter dans la grande rafle du 8 décembre 1952, à la suite des manifestations contre l’assassinat du leader nationaliste tunisien Ferhat Hachad, règne en maître absolu sur l’empire de l’avenue des FAR. Stalinien, celui qui fut l’un des membres fondateurs de l’UMT, un 20 mars 1955, a tout de suite jeté son dévolu sur la direction du syndicat. Depuis, ses nombreux ennemis, que ce soit des patrons d’entreprises, des membres du gouvernement ou de simples délégués syndicaux savent à quoi s’en tenir avec Benseddik, fortement diminué par la maladie mais toujours prêt à en découdre. Pour Benseddik, le syndicalisme, c’est un soupçon d’actions revendicatives dilué dans une harangue politique aux intonations radicales. Apparemment farouchement opposé au pouvoir, partisan de l’indépendance de l’UMT vis-à -vis des partis politiques, Bensedikk sait mettre de l’eau dans son vin quand il le faut, notamment quand il fallait aider les candidats de l’UC à gagner quelques mairies, lors des élections.
CDT (Confédération démocratique du travail) Il était une fois Amaoui
En 1978, Noubir Amaoui se lie à Omar Benjelloun (leader socialiste assassiné en 1975) pour casser l’UMT, accusée d’avoir sacrifié « le militantisme de gauche » en vendant ses travailleurs au patronat. Le bras de fer avec l’UMT va déboucher sur une coalition syndicale créée avec les ténors de l’USFP qui régnaient en maître sur des secteurs vitaux tels que l’enseignement, la santé ou encore les cheminots, signant ainsi l’acte de naissance de la CDT. « Bousberdila » (l’homme aux baskets) comme le surnommaient ses pairs, aura aussi sa fameuse grève. En 1981, la grève générale va virer en batailles rangées avec les forces de l’ordre. Les émeutes vont paralyser le pays entier et la centrale est en première ligne face à Hassan II. La répression est féroce, les morts se comptent par dizaines. L’USFP n’avait pas vraiment besoin de ça. C’est le début du divorce. Amaoui se fait arrêter et chacune de ses sorties médiatiques le conduit en prison comme celle où il déclare que « le roi doit régner sans gouverner ». À l’avènement de l’alternance, il met un point d’honneur à décrédibiliser les cadors du parti tels que Mohamed Elyazghi. À l’issue du 6ème congrès de l’USFP, en 2001, Amaoui et la CDT quittent l’USFP pour créer le CNI dont Abdelmajid Bouzoubaâ, son lieutenant à la centrale, est nommé secrétaire général. |