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El Himma Cible Abbas El Fassi 
actuel n°44, samedi 24 avril 2010
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L’Istiqlal est sous le feu des critiques. La formation de Fouad Ali El Himma a décidé d’attaquer frontalement le Premier ministre et son parti. Le PAM est-il prêt à assumer les conséquences d’une grave crise politique ?


***

La hache de guerre est désormais déterrée entre le PAM et l’Istiqlal. La formation d’El Himma a promis de « passer à l’opposition », et le président du groupe de conseillers du PAM à la Deuxième Chambre, Hakim Benchemass, a appliqué les consignes. Résultat, non seulement l’Istiqlal a été sommé de se soumettre en raison d’une gestion réputée désastreuse de l’exécutif, mais le PAM a poussé la délicatesse jusqu’à demander à faire passer Abbas El Fassi devant les juges pour répondre des conséquences fâcheuses du scandale d’Annajat. Ce dernier, qui avait mis sur le carreau des milliers de candidats à l’émigration aux Emirats, impliquait notamment l’actuel Premier ministre, à l’époque ministre de la formation professionnelle. S’en sont suivies des attaques ciblées du PAM qui présagent à l’évidence une crispation sur la personne du Premier ministre et de son parti.

S’agit-il d’une tentative de déstabilisation ou de manœuvres dilatoires suscitées pour revenir à l’actualité après une traversée du désert ? Ou le PAM a-t-il réellement le désir de renverser le gouvernement en déposant une motion de censure en bonne et due forme ?

C’est plutôt la première option qui est privilégiée par les observateurs. A cela plusieurs raisons. Après avoir constitué une destination attractive pour les députés nomades, le PAM vient de vivre sa première grande défection au sein de son groupe parlementaire. Plusieurs députés qui émargeaient jusqu’à présent au PAM sont revenus dans les rangs de leur parti initial, l’Union constitutionnelle. Un retour, au lendemain de la création d’un groupe parlementaire unifié au sein des deux Chambres du Parlement, baptisé « Rassemblement constitutionnel unifié », constitué de députés du Rassemblement national des indépendants (RNI) et de l’Union constitutionnelle (UC) ; et ce quelques jours avant le début de la session du printemps de la troisième année législative.

Ce groupe, prĂ©sidĂ© par l’ancien ministre Rachid Talbi Alami, compte aujourd’hui quelque 69 dĂ©putĂ©s ; ce qui le place bien loin devant la formation de Abbas El Fassi (vainqueur des lĂ©gislatives de septembre 2007 avec 54 sièges). Cette nouvelle donne, officialisĂ©e le 15 avril dernier, relègue ainsi le PAM Ă  la deuxième position avec 55 dĂ©putĂ©s, le PJD (deuxième force de l’opposition) arrive au 4e rang avec ses 46 parlementaires. L’USFP garde sa 5e position avec 40 sièges. Le score du Rassemblement constitutionnel unifiĂ©  a Ă©tĂ© possible grâce notamment Ă  une sĂ©rie de « ralliements » de dĂ©putĂ©s d’autres formations politiques. Les dĂ©putĂ©s frondeurs viennent du PAM, mais Ă©galement du MDS de Mahmoud Archane, du FFD, de l’Alliance des libertĂ©s (dissous dans le PAM) ou mĂŞme du MP et du PPS, pour ne citer que ces derniers.

La lune de miel révolue

La constitution de ce groupe unifié a ainsi permis au RNI et à l’UC de devenir le premier groupe parlementaire dans les deux Chambres, dépassant de loin le PAM. Une situation qui démontre encore une fois la fragilité de l’identité politique des partis de la droite. Le PAM lui-même, dans les deux Chambres, est souvent constitué d’un rassemblement hétéroclite de parlementaires nomades que rien ne réunit sauf peut-être d’obscurs intérêts politiciens. La création de ce nouveau groupe ne masque toutefois pas les difficultés dans lesquelles se débat la formation de Mezouar, attisées par le climat de tension qui règne entre le PAM et le RNI. Selon une source RNIste, après le départ forcé de Mustapha Mansouri, le parti a perdu, d’un seul coup, la présidence des deux Chambres et un poste de ministre. Conséquence, la lune de miel entre le PAM et le RNI est bel et bien révolue. En témoigne la grogne à l’intérieur même des rangs des partisans de Salaheddine Mezouar, nouvelle figure de proue du parti.

A Casablanca, les coordinateurs du parti de la capitale Ă©conomique ont demandĂ© Ă  Mezouar la convocation d’une rĂ©union d’urgence pour trancher le cas de Mohamed Bentaleb, indĂ©sirable au sein de la majoritĂ© des RNIstes locaux, qui avaient mĂŞme boycottĂ© la rĂ©union des coordinateurs tenue Ă  Mohammedia lors de l’affrontement entre Mezouar et Mansouri. Selon nos informations, le parti risque mĂŞme d’être encore plus fragilisĂ© si Mezouar n’arrive pas Ă  stopper l’hĂ©morragie. Les RNIstes se seraient, en effet, sentis flouĂ©s par le PAM qui leur avait fait croire que le RNI allait recueillir toutes les composantes du pĂ´le centre droit  composĂ© du PAM, du RNI, de l’UC et d’autres partis. Une option refusĂ©e par Mustapha Mansouri, et qui n’est pas davantage Ă  l’ordre du jour chez les adhĂ©rents du PAM.

Mauvais scénario

En effet, face aux coups de boutoir d’une rĂ©alitĂ© politique locale trop complexe pour ĂŞtre rĂ©glĂ©e en quelques alliances contre nature, et une guerre sans merci contre les islamistes, le PAM a dĂ» revoir ses ambitions premières Ă  la baisse. Sans roulements de tambour ni claquements de portes. Mais dès Ă  prĂ©sent la messe semble dite. Fin d’une Ă©poque. Fin des « espĂ©rances ». Fin des grands mots, des belles histoires et des drapeaux qui claquent. Fin de l’exception du « parti de l’ami du roi » venu faire la rĂ©volution dans un champ politique promis au « devoir de grisaille ». Pour comprendre ce mauvais scĂ©nario politique, il faut revenir en arrière. La dernière rĂ©vision du champ politique semblait acquise au nouveau parti, le RNI allait aider Ă  la crĂ©ation d’un pĂ´le libĂ©ral, la gauche mettre son grain de sel pour faire front contre les islamistes, et l’Istiqlal continuer Ă  servir de punching-ball aux colères de la rue. Or le RNI n’a pas Ă©tĂ© facile Ă  avaler - en tĂ©moigne la rĂ©sistance du clan Mansouri -, le PJD est toujours aussi fort, voire plus fort, et son rapprochement avec la gauche ne relève guère de l’impossible. Quant Ă  l’Istiqlal, les rĂ©centes sorties de Hamid Chabat ont montrĂ© que la formation du Premier ministre avait encore du rĂ©pondant. L’expression de ces ambiguĂŻtĂ©s a donc Ă©tĂ© un choc pour les nouveaux venus, armĂ©s certes du soutien du palais, mais peu ancrĂ©s dans la rĂ©alitĂ© marocaine. 

L’équation du changement est aujourd’hui complètement différente. Et ceci explique sans doute cela. Sauf à s’installer dans la posture suicidaire de gardien du temple et à promettre du même coup au PAM le sort réservé aux partis moribonds de l’administration, PND et autre UC, les éminences grises de FAH avaient-elles d’autre choix que de s’attaquer à la dernière figure emblématique de la Koutla ? Ce fut d’autant plus facile que ces derniers temps, Fouad Ali El Himma en personne et ses lieutenants se sont prudemment tenus à l’écart de toutes les batailles, comme si, pour eux, les choses sérieuses ne devaient réellement commencer que demain, c’est à dire… à la veille des échéances électorales de 2012.

Mohamed Madani

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