Les troupes ont voté pour un « cumulard ». Et aujourd’hui, on ne voit plus qu’une seule tête au PJD. Six mois au pouvoir ont rendu le parti encore plus unifié et mieux organisé. C’est le message fort du dernier congrès de la formation de la lampe.
Barbu 1 : Assalamou alaikoum ; Quel a été le score ?
Barbu 2 : 85,4 %
Barbu 1 : Parfait !
Cette courte conversation, qui a eu lieu pendant les travaux du 7e congrès du PJD, tenu à Rabat les 14 et 15 juillet, reflète l’état d’esprit des pjdistes durant ce conclave. Ils étaient certains que Abdelilah Benkirane allait rempiler. L’on se demandait juste avec quel score. Car, assuré du plébiscite de ses bases bien avant le démarrage du congrès, Benkirane avait « seulement » besoin d’une victoire écrasante qui le conforterait aussi bien au sein du parti que dans le gouvernement. Et c’est chose faite. Au premier tour, les membres du conseil national sortant ont présenté les candidatures de Saâd-Eddine El Othmani, Abdelilah Benkirane, Mustafa Ramid, et Aziz Rebbah au poste de secrétaire général. Ces deux derniers ont préféré se retirer de la course pour laisser le chef du gouvernement affronter son ministre des Affaires étrangères au second tour, ouvrant la voix à une nette victoire de Benkirane.
Après l’annonce des résultats, l’islamiste en chef du Royaume a fait un discours totalement différent des allocutions auxquelles il a habitué les Marocains depuis la campagne électorale. Un speech de 15 minutes, en arabe classique, sans un mot de darija, et truffé de références religieuses. Sans blagues ni populisme, Benkirane a opté pour un ton sérieux. Objectif apparent : rassurer les bases qui craignent que l’accès au pouvoir du parti se fasse au détriment de son référentiel idéologique islamiste. Pourtant, c’est bien dans ce sens que semble se diriger le PJD. « La reconduction de Benkirane implique qu’aucune différence ne doit être faite entre le parti et le gouvernement. Tous les deux iront désormais dans le même sens. Les écarts de conduite ne seront plus tolérés », explique un membre du PJD, très proche de Benkirane.
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Opposants, out !
Preuve s’il en est des nouvelles orientations du parti, l’écartement du député d’Oujda, Abdelaziz Aftati, et celui de Meknès, Abdellah Bouanou, du secrétariat général du parti. Le premier a fait enfler une vive polémique autour des primes de l’ex-argentier du Royaume Salaheddine Mezouar, et des fameux « services connus », tandis que le second est un virulent opposant au ministre de l’Intérieur Mohand Laenser. Tous les deux ont donc créé pas mal de problèmes à Benkirane ces derniers temps. Et le congrès a été l’occasion parfaite de s’en débarrasser. « C’est le secrétaire général qui propose les noms des membres du secrétariat général. On peut bien deviner que c’est lui qui est derrière la mise à l’écart de ces noms, en plus de celui de Moqrii Abouzid », explique un journaliste du parti. Quant à Jamaâ Moatassim, son absence du bureau politique est officiellement justifiée par ses fonctions de chargé de mission au sein de la primature.
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Au bonheur des dames
Côté parité, le PJD a réussi à soigner son image auprès des femmes, tentant de balayer la réputation de formation « misogyne ». Lors des élections du conseil national, véritable « Parlement » du PJD, les femmes ont pu obtenir un peu plus de 39% des 160 sièges disponibles. Fortes de cette victoire, les femmes pjdistes se sont également fait une place au secrétariat général : Bassima Hakkaoui, la ministre de la Solidarité et de la Famille, et les députées Somiya Khaldoune, Nouzha El Ouafi et Jamila Moussalli font désormais partie du cercle des sages du parti de la lampe. Ce qui ne fait quand même pas oublier le machisme de l’équipe gouvernementale avec seulement une femme sur trente membres.
Ali Hassan Eddehbi |