ElaborĂ© par lâactuel gouvernement, il sera approuvĂ© par le prochain parlement et mis en Ćuvre par la nouvelle Ă©quipe issue des urnes. Une loi rectificative nâest pas Ă Ă©carter.
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Jusquâau bout de son mandat, Salaheddine Mezouar sera sur la corde raide. Le budget 2012 constituera le dernier grand chantier Ăšs qualitĂ© de lâĂ©quipe sortante. Dans un contexte financiĂšrement tendu et politiquement sensible, il devra se montrer vigilant quant aux fondamentaux, en Ă©vitant de cĂ©der aux sirĂšnes Ă©lectoralistes, tout en consolidant sa position de leader politique, candidat favori Ă la primature.
MalgrĂ© les rĂ©cents amĂ©nagements, le calendrier pour lâadoption du projet de loi de Finances pose quelques problĂšmes inĂ©ditsâ: le texte sera dĂ©posĂ© au Parlement le 19 septembre et discutĂ© par les deux Chambres dĂšs le lendemain.
Lâobjectif Ă©tant de le faire adopter avant lâouverture de la session dâautomne le 14 octobre. Si le processus dâadoption du texte par les deux Chambres est respectĂ©, reste sa mise en Ćuvre qui sera assurĂ©e par la prochaine Ă©quipe issue des urnes et entĂ©rinĂ©e par le nouveau parlement.
Ce flottement donne Ă penser que le ministre des Finances en exercice pourrait ĂȘtre tentĂ© de maintenir un dĂ©ficit Ă©levĂ© pour boucler le budget 2012, Ă charge pour son successeur de faire voter une loi de Finances rectificative⊠Sauf que Mezouar est donnĂ© parmi les favoris Ă la tĂȘte de la prochaine Ă©quipe gouvernementale.
«âDe plus, le risque de dĂ©rapage budgĂ©taire est Ă minimiser car la nouvelle Constitution a dĂ©jĂ intĂ©grĂ© la fameuse rĂšgle dâor en discussion actuellement dans les pays de lâUEâ», relĂšve Rabie Baddou, responsable Analyse & Recherche Ă Wafa Gestion. Pour rappel, cette rĂšgle impose une rigueur dans la gestion des finances publiques afin de prĂ©server les Ă©quilibres fondamentaux.
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Atténuer la pression
Parmi les hypothĂšses clĂ©s sur lesquelles Mezouar bĂątit actuellement son budget 2012, un taux de croissance variant entre 4,7% Ă 5,2%, un taux dâinflation de 2% et un baril Ă 100 dollars. Cette derniĂšre hypothĂšse est jugĂ©e relativement prudente par les Ă©conomistes.
«âIl faut que la situation en Libye retourne Ă la normale pour mettre sur le marchĂ© prĂšs de 1,5 million de barils par jour afin de stabiliser les coursâ», souligne Mohamed Soual, membre du bureau politique du PPS. Celui-ci suggĂšre une augmentation de 1 dirham du prix Ă la pompe pour attĂ©nuer la pression sur la Caisse de compensation.
Augmentation qui gĂ©nĂšrerait prĂšs de 6 milliards de dir-hams dâĂ©conomies Ă affecter Ă dâautres dĂ©penses plus bĂ©nĂ©fiques comme la formation des chĂŽmeurs par exemple. En rĂ©alitĂ©, cette hausse du prix du carburant aurait dĂ» avoir lieu dĂ©jĂ en 2011 au regard de la flambĂ©e des cours de lâor noir. Le prochain gouvernement aura-t-il le courage politique de lâappliquerâ? Rien nâest moins sĂ»r. Dâautant quâune telle mesure, toujours mal perçue par les consommateurs, risque dâenclencher la spirale inflationniste, en lâabsence dâun dispositif de contrĂŽle des prix efficace.
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DĂ©magogie politique ?
Pour contourner la difficultĂ©, Abbas El Fassi ressort la carte de la rĂ©forme de la Caisse de compensation quâil nâa pas rĂ©ussi Ă mettre en Ćuvre durant ses deux mandats. Dans sa derniĂšre lettre de cadrage, il suggĂšre la crĂ©ation dâun fonds national pour le ciblage des catĂ©gories dĂ©munies et de ramener les charges de soutien des produits de base dans une limite de 3% du PIB.
Pourtant, le gouvernement sortant clÎturera son mandat avec 45 milliards de déficit de la Caisse, soit 5,5% du PIB. En clair, El Fassi attend du prochain gouvernement une réduction, de moitié, du poids du déficit de compensation.
Ne place-t-il pas la barre trop hautâ? Sommes-nous toujours dans la rationalisation des finances publiques ou avons-nous basculĂ© dans la dĂ©magogie politique Ă la veille des Ă©lectionsâ? Objectivement, il ne faudrait pas sâattendre, Ă court terme, Ă ce que le prochain gouvernement sâattaque, en prioritĂ©, Ă ce dossier socialement sensible.
Quant au taux de croissance du PIB retenu par Mezouar, la plupart des analystes le jugent trop optimiste. Au regard de la faiblesse de la croissance europĂ©enne en 2012, il faut sâattendre Ă une baisse dâactivitĂ© de tous les relais de croissance, notamment les mĂ©tiers mondiaux du plan Emergence, et un reflux du trafic portuaire de Tanger Med.
Plus prudents, le HCP table sur un taux de croissance du PIB de 4,5% et le Centre marocain de conjoncture, 4,1%. Des analystes du secteur bancaire penchent davantage pour un taux de 3% Ă 4% maximum.
Quoi quâil en soit, il faudra Ă tout prix prĂ©server le dynamisme de la demande intĂ©rieure pour compenser la baisse des commandes europĂ©ennes adressĂ©es au Maroc. Lâaugmentation des salaires, entĂ©rinĂ©e en juillet dernier, et le soutien des prix des denrĂ©es de base devraient prĂ©server le pouvoir dâachat domestique.
Par ailleurs, dĂšs son arrivĂ©e aux affaires, il serait opportun que le prochain gouvernement procĂšde Ă lâĂ©valuation, Ă mi-parcours, de toutes les stratĂ©gies sectorielles mises en Ćuvre durant les cinq derniĂšres annĂ©es pour Ă©ventuellement rectifier le tir.
Mouna Kably & Khadija El Hassani |