La CDG entame en douceur un remodelage de son portefeuille mais elle conïŹ rme sa prĂ©sence dans les participations stratĂ©giques comme le CIH ou le Club Med. Tour dâhorizon de sa politique dâinvestissement.
Alors que les rumeurs ont couru ces derniers jours sur un Ă©ventuel retrait de la CDG (Caisse de dĂ©pĂŽt et de gestion) du CIH (CrĂ©dit immobilier et hĂŽtelier), le top management de la Caisse rĂ©afïŹ rme sa volontĂ© dâaccompagner la banque dans son nouveau projet dâentreprise. Pour preuve, la feuille de route tracĂ©e par Ahmed Rahhou, le nouveau PDG du CIH, sâinscrit totalement dans la vision stratĂ©gique de lâactionnaire de rĂ©fĂ©rence et bĂ©nĂ©ïŹcie de son appui entier.
Au terme du processus de mutation, actuellement en cours, qui vise notamment Ă attirer de nouveaux proïŹls et Ă Ă©toffer le rĂ©seau de la banque, la CDG entend dĂ©velopper plusieurs synergies avec sa ïŹliale. Il en est ainsi, par exemple, du secteur touristique sur lequel se positionnent les deux institutions depuis de nombreuses annĂ©es.
De ce fait, lâidentiïŹcation de nouvelles opportunitĂ©s dâinvestissement pourrait donner lieu Ă la rĂ©alisation de projets par la CGI, tandis que le montage ïŹnancier serait assurĂ© par le CIH. Idem pour lâĂ©pargne longue qui suscite lâintĂ©rĂȘt des deux organismes. La CDG, Ă travers les fonds de retraite gĂ©rĂ©s par le RCAR et la CNRA, est fermement dĂ©cidĂ©e Ă jouer un rĂŽle central dans la gestion de lâĂ©pargne longue. De son cĂŽtĂ©, le CIH dont le cĆur de mĂ©tier est le ïŹnancement du logement et de lâimmobilier en gĂ©nĂ©ral, constitue un canal de choix pour drainer lâĂ©pargne longue. Lâaffaire est donc entendue : la CDG restera un partenaire de rĂ©fĂ©rence du CIH.
Priorité aux partenariats
Mais comment est gĂ©rĂ© le portefeuille de la CDG et quâen est-il de sa stratĂ©gie de prise de participations dans dâautres secteurs ? A priori, lâapproche privilĂ©giĂ©e par la nouvelle Ă©quipe est similaire Ă celle de son prĂ©dĂ©cesseur : initier, en prioritĂ©, des partenariats avec des opĂ©rateurs de rĂ©fĂ©rence. Ainsi en a-t-il Ă©tĂ© avec Barid Al-Maghrib lors de lâacquisition de la sociĂ©tĂ© de crĂ©dit Ă la consommation Sofac, ou avec la BCP au moment du rapprochement entre Maroc Leasing et ChaĂąbi Leasing â qui a donnĂ© naissance Ă un mastodonte contrĂŽlant pas moins de 25 % du marchĂ© du leasing â ou encore avec Holmarcom lors du rachat de la compagnie dâassurance Atlanta.
Toujours suivant cette mĂȘme logique, et bien que lâindustrie ne soit pas le secteur de prĂ©dilection du groupe, la CDG a rĂ©ussi un joli coup en sâassociant Ă 47,6 % avec Renault dans le projet Renault Tanger Med, en juillet dernier. Un projet de taille rĂ©gionale, dâun montant de 600 millions dâeuros, censĂ© gĂ©nĂ©rer 6 000 emplois directs et prĂšs de 30 000 emplois indirects. Lâusine, qui sera opĂ©rationnelle en 2012, aura une capacitĂ© de dĂ©part de 170 000 voitures par an, avant dâatteindre un rythme de croisiĂšre de 400 000 vĂ©hicules par an. Le constructeur français aurait-il investi au Maroc si la CDG ne sâĂ©tait pas impliquĂ©e dans le projet, dans un contexte de crise mondiale qui a touchĂ© de plein fouet lâindustrie automobile ?
Quoi quâil en soit, la CDG a optĂ© pour une participation purement ïŹ nanciĂšre. Le pacte des actionnaires stipule bien que la Caisse nâest impliquĂ©e ni dans la gestion, ni dans la commercialisation de la production, tous deux du ressort de Renault. En clair, la CDG nâassume pas le risque dâexploitation, mais seulement le risque ïŹnancier qui, lui-mĂȘme, demeure limitĂ© et bien maĂźtrisĂ© au regard de la taille et de la soliditĂ© du partenaire industriel. « Dâailleurs, nous avons pu nous reïŹnancer sans problĂšme auprĂšs dâinstances multilatĂ©rales et nous anticipons une rentabilitĂ© ïŹnanciĂšre satisfaisante de cet investissement », assurent les dirigeants de la Caisse qui se disent prĂȘts Ă investir dans des opĂ©rations similaires.
Dans la foulĂ©e, dâautres opportunitĂ©s dâinvestissement ont Ă©tĂ© identiïŹĂ©es et sont actuellement en cours de validation, comme la construction de locaux clĂ©s en main au cĆur des parcs industriels crĂ©Ă©s par MedZ et destinĂ©s Ă la location aux investisseurs Ă©trangers. Ce type dâinvestissement gĂ©nĂšrerait Ă©galement une rentabilitĂ© ïŹ nanciĂšre intĂ©ressante, assortie dâun faible risque.
Lâexception MĂ©ditelecom
Cependant, la rĂšgle de prudence qui consiste Ă sâadosser Ă un opĂ©rateur dâenvergure internationale nâest pas observĂ©e de maniĂšre systĂ©matique. Ainsi, en aoĂ»t 2009, la CDG sâest renforcĂ©e dans le capital de MĂ©ditelecom Ă paritĂ© Ă©gale avec FinanceCom, suite au dĂ©part de Telefonica et Portugal Telecom. Mais, depuis, lâentrĂ©e dâun opĂ©rateur stratĂ©gique de rĂ©fĂ©rence internationale dans le tour de table de MĂ©ditelecom se fait toujours attendre. « Nous sommes sollicitĂ©s par plusieurs opĂ©rateurs », afïŹrme lâĂ©quipe dirigeante.
Mais en attendant de faire le bon choix, un travail de reprise en main de la structure sâest avĂ©rĂ© nĂ©cessaire, notamment la simpliïŹcation des processus de prise de dĂ©cisions stratĂ©giques au sein de lâentreprise. Pour lâheure, la sĂ©rĂ©nitĂ© reste de mise car lâopĂ©rateur tĂ©lĂ©com est rentable. Ce qui confĂšre une certaine marge de manĆuvre Ă la CDG et Ă FinanceCom, pour sĂ©lectionner le partenaire stratĂ©gique au meilleur savoir-faire et qui favorisera le transfert technologique le plus adĂ©quat Ă MĂ©ditelecom, quand la conjoncture internationale redeviendra favorable.
ParallĂšlement, quelques projets dans lesquels est engagĂ© le groupe CDG, ont subi, de façon plus ou moins directe, les contrecoups de la crise internationale. Câest le cas surtout, du projet Amwaj qui constitue lâune des quatre sĂ©quences du programme dâamĂ©nagement de la vallĂ©e du Bouregreg. Les travaux sont restĂ©s Ă lâarrĂȘt durant une annĂ©e, avant lâannonce ofïŹcielle du retrait dĂ©ïŹnitif de Sama DubaĂŻ, ïŹ nalement expropriĂ©, au dĂ©but du mois de janvier 2010. Reste Ă connaĂźtre le montant de lâindemnisation qui sera versĂ©e au groupe Ă©mirati, et lâidentitĂ© du nouveau partenaire stratĂ©gique.
Grands et petits projets
Si la prise de participation dans 22 % du capital de lâenseigne marocaine Marwa en dĂ©cembre 2009 par le fonds Cap Mezzanine a fait couler beaucoup dâencre, elle nâest pourtant pas isolĂ©e. Outre ce fonds â dotĂ© de 350 millions de dirhams â, CDG Capital Private Equity, ïŹliale en charge de la gestion de fonds dâinvestissement, soutient les PME dans leur dĂ©veloppement via le fonds AccĂšs Capital Atlantique Maroc (ACAMSA) qui dispose de 180 millions de dirhams, sans oublier le fonds dâamorçage Sindibad dâune taille de 48 millions de dirhams. Au-delĂ de ses rapports privilĂ©giĂ©s avec les grandes entreprises, la CDG veut promouvoir la PME Ă fort potentiel en sâappuyant sur des fonds de capital-risque et de capital-dĂ©veloppement entiĂšrement autonomes. Une maniĂšre aussi de jouer son rĂŽle dâentreprise citoyenne.
Mouna Kably |
Synergies et productivité
Le groupe CDG est Ă la croisĂ©e des chemins. La premiĂšre phase, initiĂ©e par Mustapha Bakkoury Ă©tait axĂ©e sur la crĂ©ation dâentitĂ©s structurĂ©es et fortes, dans des domaines dâactivitĂ© distincts, comme la CGI (gestion immobiliĂšre) ou CDG DĂ©veloppement qui contrĂŽle des ïŹliales telle MedZ, spĂ©cialisĂ©e dans le dĂ©veloppement de parcs industriels. Ă prĂ©sent, le nouveau management estime que le moment est opportun pour passer Ă la vitesse supĂ©rieure. Objectif : instaurer une cohĂ©rence globale entre ces structures autonomes, en vue dâinstaurer une culture Groupe. Le but Ă©tant, surtout, de dĂ©gager des synergies sur les plans Ă la fois humain et ïŹnancier, pour amĂ©liorer la productivitĂ© et rĂ©duire les coĂ»ts.
Cette nouvelle stratĂ©gie Ă©tablie devrait permettre de rĂ©sorber les pertes dĂ©gagĂ©es Ă ïŹ n juin 2009. Lâadoption des comptes conformes aux normes IFRS qui requiĂšrent des reportings rĂ©guliers et rigoureux de lâensemble des ïŹliales, devrait Ă©galement contribuer Ă activer le processus. Lâautre axe stratĂ©gique consiste Ă se recentrer sur le mĂ©tier originel, Ă savoir, la gestion des retraites. La mise en place programmĂ©e de la rĂ©forme constitue, Ă ce titre, une aubaine pour la CDG. EnïŹn, la gestion dynamique du portefeuille va permettre Ă la fois de saisir les opportunitĂ©s dâinvestissement assorties dâun risque maĂźtrisĂ©, et de valoriser au mieux les placements de la Caisse.
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Statu quo Ă lâinternational
Ă lâinternational, la CDG opte pour le wait and see. Son portefeuille dĂ©tient 10 % du capital de Club Med, 5 % de TUI, 1 % de Vivendi et 33,33 % de la SociĂ©tĂ© Camerounaise des eaux. Bien entendu, câest la participation dans le capital du Club Med qui suscite le plus dâinquiĂ©tude chez les analystes. Et pour cause, la CDG en est le premier actionnaire et la baisse du cours de Bourse a incitĂ© la Caisse Ă provisionner prĂšs de 1,4 milliard de dirhams en deux ans. Mais le top management se dit conïŹ ant face Ă lâoption stratĂ©gique du Club de monter en gamme. Le concept dĂ©veloppĂ© autour du club de la Palmeraie Ă Marrakech serait un succĂšs et lâexpĂ©rience gagnerait Ă ĂȘtre dupliquĂ©e. Pour autant, la CDG nâa pas lâintention de se renforcer dans le tour de table, mais elle est bien dĂ©cidĂ©e Ă dĂ©fendre ses intĂ©rĂȘts au sein du conseil dâadministration. |
Le directeur général du groupe CDG
Anas Alami : « Les caisses de retraite sont sécurisées »
Comment convaincre lâopinion publique que les fonds de retraite conïŹĂ©s Ă la CDG ne servent pas Ă investir dans divers projets ?
Il y a une sĂ©paration claire entre les fonds propres de la CDG et les fonds des caisses de retraite. Les fonds propres de la CDG sont investis dans les projets stratĂ©giques qui dĂ©gagent une rentabilitĂ© propre et donc un bĂ©nĂ©ïŹce Ă ïŹ n 2009. En effet, depuis juin, les cours ont bien repris Ă lâinternational. Par ailleurs, compte tenu de la cyclicitĂ© des rĂ©sultats de la CDG, une partie ne survient quâau cours du second semestre. De ce fait, on termine lâannĂ©e avec un rĂ©sultat positif. Il ne faut pas oublier que les moins-values latentes dĂ©gagĂ©es Ă lâinternational sont largement compensĂ©es par les plus-values locales issues de la CGI et Atlanta. Ce qui dâailleurs tĂ©moigne du fort potentiel de ces deux entreprises.
Comment sont alloués les fonds des caisses de retraites ?
Ils sont affectĂ©s Ă des investissements sĂ©curisĂ©s, Ă la rentabilitĂ© certaine, comme les placements en Bourse, les bons du TrĂ©sor et les rendements locatifs. En effet, une partie des locaux immobiliers sont louĂ©s et gĂ©nĂšrent des loyers rĂ©currents. Câest donc un dosage entre des placements en actions, en obligations et immobiliers. Dâailleurs, un fonds infrastructures initiĂ© par la CDG, la Caisse des dĂ©pĂŽts et de consignation et la Caisse de dĂ©veloppement italienne, dâun montant de 1 milliard dâeuros, est en cours de montage.
Quelles sont les actions prioritaires pour 2010 ?
Il faut avancer sur le chantier de lâĂ©pargne longue pour ĂȘtre ïŹ n prĂȘt pour la prochaine loi de Finances 2011. Nous devons arrĂȘter les grandes lignes pour le pĂŽle prĂ©voyance, assurer la continuitĂ© des projets initiĂ©s par CDG DĂ©veloppement et lancer de nouveaux chantiers comme les zones dâamĂ©nagement urbain.
Propos recueillis par M.K. |
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