La région enregistre des indicateurs économiques supérieurs à la moyenne nationale, en raison d’un fort soutien politique. Reportage.

Samedi 6 mars, 17 h 45 : l’avion atterrit à Laâyoune. Le commandant de bord annonce d’une voix presque inaudible la température extérieure : 24 degrés. Dehors, on est surpris par la lumière, le soleil, l’air pur. À l’aéroport, beaucoup de va-et-vient. Mais alors que Las Palmas, à vingt minutes d’avion au large de Laâyoune, reçoit en moyenne 12 millions de touristes par an (9 millions en 2009), Laâyoune reste à la traîne. Les chiffres sont parlants : 109 002 passagers accueillis en 2009, avec une évolution annuelle du trafic de 10 % à peine. Plus de ferry et personne pour investir dans ce moyen de transport qui permettrait pourtant de développer le tourisme de manière considérable, ne serait-ce qu’en offrant des packages de 24 heures ou de 48 heures de dépaysement « nomade » aux touristes de Las Palmas. Sur la route de l’hôtel, on découvre la ville. Constructions de couleur coralline, architectures espagnole et marocaine mêlées harmonieusement, quartiers chics de villas côtoyant des quartiers populaires, routes bien tracées et régulières, circulation importante pour ce samedi soir, espaces verts et fontaines… autant qu’à Marrakech ! La ville vit au rythme de la modernité comme n’importe quelle autre cité du Maroc, avec ce petit plus, propre à la région : de la poésie dans l’air et – fait remarquable – pas de bidonvilles. Il faut savoir qu’au 25 juillet 2008, 10 989 ménages ont été recasés et Laâyoune fut déclarée « ville sans bidonvilles ». « C’était impressionnant, racontet-on ici, les habitants des bidonvilles participaient eux-mêmes, en toute confi ance, à la destruction de leurs baraques afi n d’obtenir en contrepartie des bons numérotés pour acquérir des lots assortis d’autorisations de construire. »

Produits de contrebande

À Laâyoune comme à Casablanca, il existe le Derb Ghallef local, appelé Skikina, véritable cour des miracles où l’on trouve de tout : téléphones portables, ordinateurs, jeux, vêtements, produits d’hygiène, produits de contrebande en provenance de Mauritanie ou d’Espagne, et dont vit une grande partie de la population locale de manière informelle. Même chose un peu plus loin dans la ville, quand vous passez du côté de Souk Ennssa, où les femmes de la région vivent du commerce des tissus et des vêtements importés d’Espagne pour l’essentiel. En matière de santé, la ville et sa région bénéfi cient de trois grands hôpitaux pour une population de 256 152 habitants ; de 11 centres urbains et de 11 centres ruraux ; 1 médecin pour 2 100 habitants alors que la moyenne nationale est de 1 pour 3 580. « Mais ici, il y a l’éloignement, explique Hassana Maoualainine, directeur du Centre régional d’investissement (CRI), cela est plus rassurant pour les habitants de savoir qu’ils bénéficient de la protection médicale. » Un taux de scolarisation de 99,1 % ; une desserte d’électricité de 95 % contre une moyenne nationale de 90 % ; et une desserte d'eau de 93 % contre une moyenne nationale de 88 %, font de la ville et de sa région des quasi-privilégiés du territoire national. Al Omrane El Janoub a fait un travail colossal, soit plus de 900 hectares urbanisés.

La pêche, locomotive de la région

La pêche joue un rôle de locomotive dans le développement de la région. Dans le port de Laâyoune, il y a une activité incessante, et quand on interroge les pêcheurs, tous sont venus de l’intérieur du pays pour travailler. Le secteur y emploie 15 542 personnes et génère une production annuelle de 413 878 tonnes pour une valeur de 1 160 344 000 dirhams. « Notre poisson n’est pas suffisamment valorisé faute d’investisseurs », explique le directeur du CRI. Cette production est assurée par une flotte diversifiée, composée de 547 bateaux de pêche côtière et de 2 564 unités de pêche artisanale. Les efforts déployés par l’État dans ce secteur ont permis l’émergence d’un tissu industriel comprenant 9 unités de production de farine et huile de poisson, 17 unités de congélation, 2 unités de conserve et 7 fabriques de glace. Mais toutes ces réalisations sont visiblement en deçà des véritables potentialités de la région. Reste que le travail impressionnant réalisé depuis 1975 et les nombreux chantiers en cours font de cette région du Royaume l’un des pôles de développement les plus importants et les plus prometteurs.

Bahaâ Trabelsi, envoyée spéciale à Laâyoune