Le délai est serré mais Lahcen Haddad est décidé à rattraper les erreurs pour remettre la station balnéaire sur les rails. A condition que tout le monde mette la main à la pùte et se sente responsable.
Les superbes paysages qui dĂ©filent tout au long du trajet brisent agrĂ©ablement la monotonie de lâautouroute Rabat-Oujda, plutĂŽt fluide en cette fin de semaine. AprĂšs six heures de route, Ă la sortie de cette nouvelle voie rapide qui mĂšne vers SaĂŻdia, le paysage change brutalement. Mais pas seulement. La route devient cahoteuse et lâĂ©clairage dĂ©fectueux. En lâabsence dâindications, plusieurs arrĂȘts sont nĂ©cessaires pour demander le chemin vers SaĂŻdia. Cette route, pourtant assez frĂ©quentĂ©e, sâavĂšre inquiĂ©tante Ă la tombĂ©e de la nuitâ: accidentĂ©e, mal entretenue, et surtout mal Ă©clairĂ©e, elle impose dâemblĂ©e aux conducteurs une vitesse limitĂ©e et une vigilance accrue. Alors que le tapage mĂ©diatique autour de la station balnĂ©aire de SaĂŻdia nâa jamais cessĂ© depuis son lancement, il est frappant de se rendre compte sur le terrain de la raretĂ© des indications menant vers la station. Aussi, faut-il ĂȘtre vigilant et persĂ©vĂ©rant pour rĂ©ussir Ă trouver la bonne direction.
Bienvenue Ă SaĂŻdia, perle bleue de lâOriental. Dans lâobscuritĂ©, la station donne lâimpression dâune ville fantĂŽme Ă©clairĂ©e par les rares lumiĂšres de quelques rĂ©sidences touristiques. Plus loin, se dĂ©tache, dans le noir, un alignement de projets immobiliers. Point de verdure. A peine quelques rares arbres dĂ©cimĂ©s ça et lĂ , et des nuĂ©es de moustiques Ă©clairĂ©es par le halo des lumiĂšres des hĂŽtels. A cette ambiance pesante sâajoute lâodeur nausĂ©abonde des eaux usĂ©es qui masquent la senteur marine habituellement chargĂ©e dâiode. «âPas moins de 70% des rĂ©clamations des clients sont liĂ©es Ă des problĂšmes dâenvironnementâ: chantiers inachevĂ©s, amoncellements de dĂ©chets et de dĂ©tritus, mauvaises odeurs, moustiques...â», rĂ©vĂšle dâailleurs un diagnostic Ă©tabli par le ministĂšre du Tourisme, effectuĂ© Ă partir de critiques Ă©manant de la clientĂšles des complexes hĂŽteliers. DĂ©concertante de rĂ©alisme, lâenquĂȘte diagnostic rompt avec les habituelles dĂ©clarations teintĂ©es de complaisance. PrĂŽnant pragmatisme et culture du rĂ©sultat, le ministĂšre du Tourisme adopte une nouvelle approche pour remettre vĂ©ritablement la station sur les rails.
Face Ă lâurgence de la situation, lâĂ©quipe de Lahcen Haddad opte pour lâidentification des problĂšmes avant dâarrĂȘter, en concertation avec toutes les parties prenantes (opĂ©rateurs, autoritĂ©s locales, Ă©lus...), des solutions concrĂštes. «âNous nâavons plus droit Ă lâerreur. Il sâagit dâĂȘtre pragmatique et dâaller au cĆur des problĂšmesâ», martĂšle le ministre du Tourisme, lors de sa derniĂšre rencontre Ă SaĂŻdia avec les opĂ©rateurs et les responsables locaux concernĂ©s par la gestion et la promotion de la station. Ce diagnostic devrait donc servir de base pour un plan dâaction concertĂ©, destinĂ© Ă rectifier le tir et Ă gommer les erreurs qui ternissent lâimage de SaĂŻdia et plombent son dĂ©collage. Deux semaines. Câest le dĂ©lai retenu pour finaliser ledit plan dâaction. Un dĂ©lai court, mais imposĂ© par lâurgence des dĂ©cisions Ă arrĂȘter, et la nĂ©cessitĂ© de passer Ă la mise en Ćuvre avant le dĂ©marrage de la prochaine saison, donc, dâici mars 2013. «âIl faut montrer aux tour-opĂ©rateurs que la station Ă©volueâ», insiste Haddad.
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Service non conforme
Parmi les dysfonctionnements et manquements diagnostiquĂ©s, certains sont lourds de consĂ©quences puisquâils font fuir les touristes. Câest le cas, par exemple, de la clientĂšle française qui a dĂ©sertĂ© SaĂŻdia en raison de la qualitĂ© de service non conforme aux standards affichĂ©s par les hĂŽtels de la station. Par ailleurs, entre juin et septembre, la station a souffert dâune chute de 19% du nombre de nuitĂ©es dĂ©clarĂ©es par les hĂŽteliers, souligne Wessal Gharbaoui, chef du cabinet du ministre. Que ce soit lâaccueil, la rĂ©servation, lâattribution des chambres, le service dâĂ©tage, au restaurant ou dans les spas, la qualitĂ© de service laisse Ă dĂ©sirer. Les raisons de ces contre-performancesâ: un personnel insuffisant et peu qualifiĂ©, un taux dâencadrement en deçà des besoins, sans oublier un dĂ©ficit au niveau des Ă©quipements. «âOr, câest Ă lâaune du service quâune structure touristique est jugĂ©e.â» Egalement pointĂ©e du doigt, lâabsence dâun dispositif de navette entre les hĂŽtels et la marina, dâune part, entre les hĂŽtels et la ville dâautre part. Cette carence conjuguĂ©e Ă la formule all inclusive adoptĂ©e par les hĂŽteliers, confine les touristes dans les hĂŽtels et pĂ©nalise les autres composantes de la station (restaurateurs, commerces...).
La liste des insuffisances et lacunes est loin dâĂȘtre exhaustive. Mais le temps presse, et un plan dâaction doit ĂȘtre mis en Ćuvre au plus vite pour redresser la situation de la station SaĂŻdia. LĂ aussi, le pragmatisme est de rigueur. «âIl sâagit de prĂ©ciser les chantiers et les responsabilitĂ©s. Il faut dĂ©finir qui fait quoi et dans quel dĂ©laiâ», insiste le ministre cherchant Ă dĂ©crocher des engagements fermes de la part des diffĂ©rents opĂ©rateurs et autres responsables locaux. LâidĂ©e est de mobiliser tout en responsabilisant, chacun dans son domaine, et en incitant au respect des engagements et des Ă©chĂ©anciers. La mĂ©thode Haddad parviendra-t-elle Ă sauver SaĂŻdiaâ? Douze mois pour le prouver.
Khadija El Hassani |
Pour des saisons plus longues
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Grand pari. Câest le moins que lâon puisse dire de lâambition du ministre de prolonger la saison touristique au-delĂ des mois dâĂ©tĂ©. Convaincu des retombĂ©es positives dâune telle dĂ©cision sur lâactivitĂ©, le ministre incite les enseignes hĂŽteliĂšres Ă rester ouvertes, du moins en partie, mĂȘme pendant la basse saison. De la sorte, lâactivitĂ© touristique saura se dĂ©velopper en variant son offre et en misant sur dâautres produits (culturel, affaires...). En effet, depuis lâinauguration de la station, des hĂŽtels ont progressivement ouvert plus longtemps, dâannĂ©e en annĂ©e, notamment par un effet de retour dâexpĂ©rience, soulignent des opĂ©rateurs. Parmi eux, Oriental Bay Beach (ex-Barcelo). «âNous avons dĂ©marrĂ© tard la saison, nous sommes dĂ©cidĂ©s Ă rester ouverts mĂȘme en basse saisonâ», affirme Amal Benzari, son general manager. Cette tendance est Ă confirmer Ă lâavenir. Dâailleurs, lâambition partagĂ©e aujourdâhui est dâarriver Ă faire vivre la station toute lâannĂ©e. Autre argument avancĂ© par le ministre, la possibilitĂ© pour les hĂŽteliers de retenir et de fidĂ©liser leur personnel. En effet, lâune des remarques qui revient frĂ©quemment dans la bouche des professionnels est liĂ©e Ă la difficultĂ© Ă retenir sur place les ressources humaines. FormĂ©es le temps dâune saison, elles sâempressent de voler vers dâautres destinations, dĂšs que la basse saison pointe son nez. |
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