Sur les cinq secteurs industriels du pays oĂč la sous-traitance Ă lâinternational est omniprĂ©sente, trois affichent des performances nĂ©gatives cette annĂ©e. Les secteurs dits «âtraditionnelsâ» sont les plus impactĂ©s par la crise internationale. Chez ces professionnels, on ne se voile plus la faceâ: il faudra attendre fin 2013 pour redresser la barre. Pour les autres, la crise est synonyme dâopportunitĂ©s...
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La sous-traitance est en soi un indicateur clĂ© de lâĂ©conomie dâun pays. Au Maroc, cet indicateur reprĂ©sente plus de 30 milliards de dirhams par an, 20% de lâindustrie nationale et 200â000 emplois. Or, la sous-traitance est souvent synonyme dâexport. Et Ă lâinternational, la crise est encore lĂ . Quel est son impact sur nos industrielsâ?
De janvier Ă juillet 2012, les exportations marocaines en textile ont atteint un peu plus de 17,5 milliards de dirhams, soit une baisse de 3% par rapport Ă la mĂȘme pĂ©riode de lâannĂ©e 2011. La baisse est de lâordre de 17% rien que pour le mois de juillet, comparativement au mĂȘme mois de lâannĂ©e derniĂšre. MĂȘme si la baisse enregistrĂ©e lors des sept premiers mois de lâannĂ©e nâest pas alarmante, Ă lâAssociation marocaine de lâindustrie du textile et de lâhabillement (Amith), on reconnaĂźt volontiers quâil y a crise.
«âLâannĂ©e derniĂšre, dĂ©jĂ , nous avons vĂ©cu un deuxiĂšme semestre difficile pour ne pas dire catastrophiqueâ», partage Abderrahmane Atfi, prĂ©sident du pĂŽle dĂ©veloppement Ă lâinternational au sein de lâAmith. Ceci est dâabord le rĂ©sultat de la crise de la consommation en Europe, exceptĂ© pour le luxe. Si lâEspagne est lâun des plus gros clients du Maroc, avec 30% des exportations, une personne sur quatre y est aujourdâhui au chĂŽmage.
Les carnets de commandes se sont réduits à peau de chagrin. Seuls quelques groupes solides comme Inditex en Espagne ou encore Marks & Spencer en Grande-Bretagne ont pu maintenir un niveau de commandes satisfaisant. Au final, la baisse des volumes a engendré également une pression sur les prix, réduisant les marges des ateliers nationaux.
De plus, les donneurs dâordres sont des petites et moyennes entreprises qui, en gĂ©nĂ©ral, sont impactĂ©es par la crise. Les dĂ©lais de paiement sâen retrouvent allongĂ©s et des problĂšmes de solvabilitĂ© apparaissent. «âA partir du second semestre 2011, quelques unitĂ©s de confection ont dĂ» fermer. Et la situation ne sâest pas amĂ©liorĂ©e au premier trimestre 2012. Des centaines dâemplois ont Ă©tĂ© Ă jamais perdusâ», se dĂ©sole Atfi.
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Le cuir est tanné...
MĂȘme constat pour les professionnels du cuir au Maroc, pour qui la crise Ă©tait «âsĂ©vĂšreâ». A fin mai, la baisse Ă©tait de 20% sur lâensemble des exportations de ce secteur. Les carnets de commandes des pays traditionnellement importateurs de nos produits ne sont plus alimentĂ©s. Et ce sont des pays comme lâEspagne, la France ou encore lâItalie qui ont enregistrĂ© les baisses de commandes les plus significatives.
La chaussure marocaine est la premiĂšre Ă payer le prix de la crise Ă©conomique, alors quâelle reprĂ©sente 80% des exportations marocaines de cuir. Les exportations marocaines de chaussures ont atteint 1,6 milliard de dirhams sur la pĂ©riode janvier-juillet 2012. Soit une baisse de 20% par rapport Ă la mĂȘme pĂ©riode de lâannĂ©e derniĂšre. «âDepuis 2011, la situation ne cesse de sâaggraverâ», partage Abdeslam Alaoui El Hassani, prĂ©sident de la FĂ©dĂ©ration marocaine des industries du cuir (FEDIC).
Un redressement en vueâ? Pas avant le second semestre 2013. «âNous Ă©tions censĂ©s recevoir les commandes de lâhiver prochain. Nous attendons toujours.â» Le secteur aurait perdu quelque 150 jours de travail.
Celui de lâĂ©lectronique ne se dĂ©marque pas non plus du lot. Jusquâen 2010, les exportations marocaines se portaient bien (450 millions dâeuros), Ă tel point que le ministĂšre de tutelle tablait sur 850 millions dâeuros et 9â000 emplois en 2015. Mais câĂ©tait sans compter les effets de la crise sur les recettes de nos industriels.
Selon lâObservatoire marocain de lâindustrie, entre janvier et juillet 2012, les exportations marocaines de produits Ă©lectroniques ont atteint un peu plus de 3,58 milliards de dirhams, soit une baisse de 14% par rapport Ă la mĂȘme pĂ©riode en 2011. Durant le seul mois de juillet, les exportations marocaines ont dĂ©gringolĂ© de 30% par rapport Ă juillet 2011.
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... mais lâaĂ©ronautique dĂ©colle
Heureusement, dâautres secteurs exportateurs affichent une santé⊠insolente. A lâimage de lâaĂ©ronautique. En 2011, pas moins de 105 entreprises opĂ©raient dans le secteur de lâaĂ©ronautique au Maroc. Les 9â000 emplois du secteur ont gĂ©nĂ©rĂ© quelque 800 millions dâeuros de chiffre dâaffaires.
Et, crise ou pas crise, le secteur continue sur sa lancĂ©e. Entre janvier et juillet 2012, le chiffre dâaffaires Ă lâexport a atteint prĂšs de 4,12 milliards de dirhams, enregistrant une hausse de 28% par rapport Ă la mĂȘme pĂ©riode lâan dernier. «âDans notre secteur, il nây a tout simplement pas de criseâ», nous apprend un membre du Groupement des industries marocaines aĂ©ronautiques et spatiales (GIMAS). Dâailleurs, la vague dâinstallation de constructeurs aĂ©ronautiques continue. DerniĂšre implantation dâenvergureâ: le canadien Bombardier qui investit 200 millions de dollars Ă Casablanca.
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Le secteur de lâindustrie automobile est Ă©galement en Ă©volution, avec une hausse de 11% des exportations au cours de la pĂ©riode janvier-juillet 2012, et un chiffre dâaffaires de 15,14 milliards de dirhams. En dĂ©finitive, les nouveaux mĂ©tiers mondiaux du Maroc rĂ©sistent beaucoup mieux Ă la crise. Simplement parce que les projets en cours datent dâavant la crise, mais Ă©galement du fait que les prix proposĂ©s par nos sous-traitants sont encore trĂšs bas.
Abdelhafid Marzak |