Yamou expose ses derniers travaux à l’Atelier 21. Des œuvres majeures dans la carrière de l’artiste et qui prolongent ses travaux antérieurs avec bien plus de profondeur.
La nouvelle exposition de Yamou à l’Atelier 21 de Casablanca, visible jusqu’au 14 avril, consacre l’artiste définitivement. On s’apprête à voir une exposition, on y trouve un hymne à la vie. On entre alors avec délicatesse dans un entrelacs d’inspiration végétale où les graines fleurissent, où le monde microscopique prépare la vie. Un mouvement naît sur la toile, des histoires s’enchevêtrent, on est très vite conquis.
On l’est d’abord par l’esthétique, la douceur du monde représenté. On l’est ensuite par la technique, la précision du pinceau et les effets de peinture.
Tout en gardant l’univers de ses travaux antérieurs, Yamou y apporte de la profondeur. Le peintre va encore plus loin, autant dans sa recherche plastique que dans le sens qu’il donne à ses œuvres.
En comparaison de ses précédentes expositions, Marrakech en 2008 ou Casablanca en 2006, l’artiste nuance davantage les couleurs, exprime plus d’intensité et semble avoir trouvé de nouveaux éléments pour peupler son univers, et mieux le posséder. Des toiles majestueuses, qui font au moins deux fois la taille de l’artiste, imposent leur caractère. L’effet est franchement saisissant !
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Des expressions multiples de la vie
Le ravissement des ramifications de ce monde végétal, de ces graines qui grossissent et explosent, se prolonge au-delà de l’exposition. Les branches d’une tige étirent le temps, nous retiennent. On a l’impression qu’elles cherchent l’espace, qu’elles essaient de dépasser les limites de la toile. On a du mal à s’en extirper. On est pris, épris par l’élégance des couleurs, la légèreté du pinceau, les formes rondes, parfois excentrées, d’autres fois déformées par la chaleur. Inconsciemment, on suit la vie de ces petites graines semées sur la toile. On y trouve des expressions multiples de la vie, des métaphores.
D’une seule main naissent des univers pluriels qui se côtoient sur le même tableau, se regardent, s’observent. La séparation se fait parfois par la couleur, d’autres fois par la matière. La partie minérale tranche avec la seconde, végétale, animée, vivante. On peut y voir l’origine de la vie ou alors une confrontation entre deux mondes. C’est aussi sur ces mêmes toiles que les frontières sont abolies, celles du figuratif et de l’abstraction, du monde végétal et du minéral, de l’organique et de l’inerte… On est à la limite de quelque chose, à ce point de rupture ou de rencontre. On est tout simplement à la naissance du monde.
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Entendre ce monde respirer
As above so below 4, une toile peinte sur bois, avec des dimensions de géant (deux mètres sur trois), raconte des histoires imperceptibles, insaisissables dans des constellations d’ombres et de lumières. Il faut s’en approcher pour entendre ce monde respirer, la vie encore une fois !
Le Lapsus 4 de Yamou en dit long, Ă©galement, sur son travail.
Un tableau bien plus petit que les autres (55 cm x 46 cm) et où l’on retrouve tous les éléments sur lesquels il s’est appuyé dans ses anciennes expositions : germination, graines, arabesques, fleurs, terre. Un monde inventé ou contemplé par Yamou dans son atelier de Tahanaout, ce coin béni à la végétation luxuriante, ce village bordé de roses qui ne peut que stimuler la création.
Yamou, comme Claude Monet, semble inspiré par la nature qui l’entoure. D’ailleurs, dans Hommage à Claude, Yamou fait un clin d’œil à l’artiste impressionniste à travers une composition de nénuphars rappelant Les Nymphéas de Monet. Souvent, on garde du monde végétal l’image de la fragilité et de l’évanescence. Yamou nous en démontre la force dans une extrême délicatesse !
Amira-GĂ©hanne Khalfallah |