Questions Ă ... Youssef Nabil
« Il y a une mémoire collective des artistes »
actuel : Est-ce le même homme qui réalise un film, qui magnifie la nature et qui crée des photos sophistiquées et artificielles ?
Youssef Nabil : Oui c’est bien moi ! Les deux relèvent d’un même univers. Mais on ne peut pas dire que mes photos soient artificielles. C’est un autre médium. La photo est beaucoup plus condensée. Je dois raconter l’histoire en une seule image. Avec le film, je peux transmettre mes idées avec des images, mais aussi la musique, et surtout le temps.
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Que signifie ce film étrange qui raconte le départ d’un fils, sa mort puis une résurrection ?
C’est très personnel. C’est ce que j’ai ressenti en quittant l’Egypte. C’est partir de chez soi pour mourir. Et espérer renaître. J’ai tourné tout le film entre Ouarzazate et Zagora mais tout est égyptien, la langue comme les décors puis les vêtements. Pour moi, c’était trop dur de rentrer en Egypte pour tourner un film qui parle de mon départ.
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Vos photos sont très égyptiennes et, pourtant, on y voit d’autres références. Une photo d’une actrice face à un verre rappelle L’absinthe de Degas par exemple. Vous aimez Degas ?
Oui... Mais ce n’est pas du tout une référence pour moi.
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Et pourtant, le cadrage, l’ambiance, le thème, le regard sont très proches...
Ecoutez, un jour, j’étais à Athènes, à 2 heures du matin dans une chambre ; il y avait une poupée cassée. Et j’ai fait des autoportraits avec cette poupée cassée.
Et dix ans après, je vois une œuvre de Jean Cocteau : un autoportrait au lit avec une poupée cassée dont tout le monde me parlait. Je crois qu’il y a une mémoire collective des artistes...
Propos recueillis par E.L.B. |