Kel Assouf : Touaregs venus du froid
C’est un groupe belge, avec du sang africain dans les veines, et une âme touareg. Kel Assouf fut la découverte du Festival des nomades.
Ce groupe éclectique, qui réunit plusieurs nationalités, s’est formé en 2006 à Bruxelles et depuis, le groupe s’est engagé à promouvoir la culture des Touaregs. Interview avec Aboubacar Harouna (alias Anana) leader du groupe.
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Quelle est la signification de Kel Assouf ?
Ça veut dire « ceux de la nostalgie » en tamasheq (langue des Touaregs). Le choix de ce nom s’est fait car je me suis retrouvé en exil en Belgique, l’idée était de faire un pont entre ici et là -bas.
Avant d’arriver en Belgique, vous avez eu une formation militaire en Libye puis vous avez combattu au Niger, comment peut-on passer du combat à la musique ?
La musique est pour moi le meilleur moyen d’exprimer et de revendiquer ses droits et sa liberté sans emprunter la voie de la violence. J’ai participé à la rébellion au Niger à l’âge de 15 ans, c’est là -bas où la musique est venue à moi pour m’orienter sur le bon chemin.
La rébellion, c’était par choix ou justement par manque de choix ?
La rébellion, nous n’avions pas le choix parce qu’un peuple marginalisé et privé de ses droits finit par s’exprimer par la violence surtout si c’est un peuple qui n’a pas été à l’école et qui n’a pas de culture politique.
Mais aujourd’hui, la jeunesse peut s’exprimer autrement avec des manifestations pacifiques ou sur Internet.
Comment votre message est-il perçu en Europe ?
Le combat utile aujourd’hui se fait à travers la musique, la politique ou le journalisme. Les chansons que j’écris s’adressent à l’Europe qui doit revoir sa relation avec l’Afrique pauvre et misérable d’une part et avec l’Afrique riche.
En même temps, mes chansons parlent de la jeunesse africaine qui, elle aussi, porte en elle une certaine responsabilité de cette Afrique qui n’avance pas. On adresse aussi des messages aux jeunes Touaregs pour qu’ils réfléchissent autrement et qu’ils mettent en valeur leurs traditions et leur culture.
Votre album Tin Hinane est justement un hommage au peuple touareg.
Il s’agit de sauvegarder notre histoire et celles de nos ancêtres à travers la musique. Ça fait partie de notre tradition et de notre histoire orale.
Les membres du groupe sont de différentes nationalités, était-ce délibéré ?
Oui, cela fait également partie d’un message pour montrer que nous pouvons vivre et construire quelque chose de beau même si on est de différentes cultures et nationalités. C’est un message universel pour la paix.
C’est la première fois que vous venez au Maroc. Comment s’est passé le contact avec le public ?
Les gens sont accueillants, c’est un retour aux sources, surtout pour moi qui suis né dans le désert. La culture marocaine n’est pas du tout éloignée de la mienne ni de celle de quelques membres du groupe.
Dia est mauritanien, Octave est togolais, Mahaasa malienne touareg comme moi. Esinam, quant à elle, est belgo-ghanéenne, Abdel est algérien, et enfin il y a Olivier qui est français.
Quels sont vos projets ?
Nous venons de commencer notre tournée 2011 et avons des concerts en Belgique, Pologne, France… peut être qu’on reviendra au Maroc.
Propos recueillis par Meriama Moutik |