Un salon du livre bâclé par le ministre de la Culture, Bensalem Himmich, qui signe un nouvel ouvrage Le calife de l’épouvante, confirmant ainsi sa double incompétence en tant que ministre et en tant qu’écrivain
Quand on a visité ne serait-ce qu'une fois un salon du livre à l’étranger, et ce même en ce qui concerne les moins importants, on comprend rapidement que le SIEL ressemble plus à une foire, voire à une foir’fouille, qu'à un salon digne de ce nom.
Aucune animation marquante - les conférences et les tables rondes ne sont pas mises en valeur ni même annoncées -, une absence manifeste de coordination et pas de considération particulière pour l'invité d'honneur, en l'occurrence l'Italie. On y déambule à l’aveugle. Certes, un plan est disponible mais il faut faire preuve d’ingéniosité pour le débusquer.
L'Italie bottée en touche
Bien qu’elle ait le plus grand stand, au milieu du salon, rien ne semble indiquer son statut d'invité d'honneur. Ailleurs, une voix off annoncerait en continu que tel invité est présent ou que telle signature de livre est en cours.
Il y aurait des pancartes qui mettraient à l’honneur l’invité et qui indiqueraient où se trouve le stand. Rien au SIEL ne permet vraiment de déduire que l’Italie est la reine du bal, à part la Fiat dans le stand, et c’est dommage parce que la littérature italienne gagne à être connue. Mais tout cela relève du ministère de la Culture.
Himmich dégage !
Le week-end end du 12 février, on a vu le ministre de la Culture, Bensalem Himmich, parader avec Frédéric Mitterrand, dont l'ouvrage qui a fait scandale est exposé au salon. Peut-être fera-t-il un tour à Marrakech comme il l'a fait en Thaïlande pour nous offfrir un nouveau récit de voyage. Mais au moins, il sait écrire.
Tandis que son homologue… Dans une conférence, dimanche 13 février, Abdellatif Laâbi a demandé publiquement que le ministre de la Culture (marocain) démissionne ou qu'il soit démis de ses fonctions, au choix. Et on le comprend ! Sur le badge distribué aux journalistes pour le « salon internationale », il y avait une faute d’orthographe.
Pour un ministère de la Culture, c’est inacceptable et carrément indécent. Non seulement aucun travail de coordination ou d’animation n’est réalisé, mais en plus, même ce qui est prévu est bâclé. Une libraire de Tanger, Stéphanie Gaou Bernard de la librairie Les Insolites a été contactée alors qu’elle était en route vers Casablanca, pour s’entendre dire qu’elle n’aurait pas de stand. Plusieurs intellectuels ont boycotté le salon, dont Hassan Nejmi, responsable de la Direction du livre… au ministère de la Culture. En réalité, au sein même du ministère, existent des conflits entre le ministre et ses sbires, émanant du parti d'origine, l’USFP.
« Il n' y a pas de vision ni d'institutions dans le domaine de la culture. Il nous faudrait une stratégie pour sortir de l'immobilisme », a décalré Abdellatif Laâbi, très applaudi. Au SIEL, les intellectuels s’accordent cette année à reconnaître l’inutilité de Bensalem Himmich.
Si le CCME n'existait pas
Il faudrait le réinventer. Activités multiples, invités prestigieux, soirées à la Sqala, coordination avec les maisons d'édition, un événement à la Villa des Arts… Bref le CCME est calife à la place du calife. Mais pour notre plaisir. Pour la première fois, les trois plus grandes maisons d'édition, Marsam, La croisée des chemins et Le Fennec, s’exposent à travers des coffrets de livres au stand du CCME. Ouvrages collectifs, auteurs marocains de tout bord, conférences et tables rondes,
il est clair qu’un gros travail a été effectué. « Je tiens à saluer la qualité du partenariat que le CCME a pu nouer à l’occasion de ce Salon avec l’Institut culturel italien, l’Institut Cervantes, la délégation Wallonie-Bruxelles, le SCAC-Ambassade de France et la Fondation ONA. Il faut également signaler que notre présence au Salon a été rendue possible grâce au partenariat avec le Secrétariat d’état chargé de l’artisanat et la Maison de l’artisan, que je tiens particulièrement à remercier », nous dit Younès Ajarraï, directeur du pôle identité et culture au CCME. Au-delà des partenariats, et du reste, une chose est sûre, le CCME a assuré, en occupant ce rôle qu’aurait pu jouer - même sans budget - le ministre de la Culture. Il suffisait de travailler un peu…
Bahaa Trabelsi
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