En France, la première dame attise les biographies. Auteur du best seller Carla, une vie secrète, Besma Lahouri s’explique sur la polémique qu’a créée son livre.
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Besma Lahouri sait s’y prendre pour défrayer la chronique. Sa première enquête sur Zinédine Zidane, publiée en 2008, a provoqué un tollé, la seconde sur Carla Bruni-Sarkozy a fait encore mieux ! Tiré à 25 000 puis à 85 000 exemplaires, Carla, une vie secrète ne fait pourtant ni dans le pompeux ni dans le médisant. Dans ce livre qui déballe tout, des anecdotes inédites et des témoignages entièrement sourcés. Chose étonnante en revanche, c’est que cette écrivaine d’origine algérienne, contactée par des journalistes du monde entier, n’a suscité aucun intérêt dans la presse maghrébine…
Qu’est-ce que votre livre apporte de plus que Carla et les ambitieux sorti en même temps ?
Mon livre est très différent de celui de mes confrères puisqu’il apporte une vision globale du personnage, de son ambition et de son besoin de reconnaissance. J’ai aussi voulu raconter comment l’Elysée avait créé une première dame glamour mais aseptisée et muette. Elle a d’abord servi à faire oublier le départ de Cécilia et à donner à son mari une image de vainqueur. Par la suite, il a fallu lui créer une fondation, qui s’est révélée être une véritable coquille vide : ses deux uniques voyages en Afrique ont été des catastrophes.
Qu’est-ce qui gêne vraiment en France chez la première dame ?
Les Français la connaissent peu en réalité. Carla Bruni-Sarkozy a du mal à s’impliquer véritablement dans son rôle de première dame. Elle refuse toutes les contraintes liées à son statut, parce que ça ne l’amuse plus.
Cette femme qui se disait de gauche, et qui pétitionnait contre son mari quelques mois avant de l’épouser, est devenue très silencieuse. Son influence sur le chef de l’Etat est par ailleurs remise en cause, car elle l’a progressivement coupé de sa fibre populaire. On lui doit par ailleurs des nominations, comme celle de Frédéric Mitterrand (au poste de ministre de la Culture), qui se sont avérées être de mauvais choix.
D’où tenez-vous vos informations ?
Pour ce livre, j’ai été à Vérone, à Turin, à New York, à Washington, au Lavandou, bref j’ai été chercher partout où je pouvais. J’ai rencontré à peu près quatre-vingts personnes qui l’ont connue : enfant, adolescente, mannequin, amoureuse, chanteuse, première dame. Tous m’ont raconté leur Carla.
Hommes politiques, créateurs, mannequins, photographes de mode, amis d’enfance, rédacteurs de mode... mes entretiens avec eux sont consignés à chaque bas de page du livre.
Comptez-vous vous spécialiser dans les bio sulfureuses ?
Si la demande d’information existe, c’est que les lecteurs ont envie de savoir. J’ai toujours considéré que l’information prouvée devait être partagée avec tout le monde et pas uniquement réservée à quelques personnes. Mes enquêtes ont toujours le même point de départ : raconter sans parti-pris et sans connivence la réalité de personnages publiques, transformés parfois en icône. Ce qui est étonnant en réalité, c’est l’aspect sulfureux que certains leur confèrent…
Selon vous, le couple Sarkozy-Bruni ne dépassera pas 2012. Pourquoi ?
Je n’ai jamais dit cela. D’ailleurs, j’ai démenti avoir tenu ces propos. Le journaliste de Métro qui a publié cette information l’a corrigée. Nicolas Sarkozy a besoin de son épouse pour se représenter en 2012. Elle a décidé de l’accompagner dans cette longue bataille. Nous verrons alors si elle représente un atout ou un handicap…
Avez-vous été contactée par elle ou par Rachida Dati, dont vous parlez également ?
Non, par aucune des deux. Mais concernant Rachida Dati, j’ai raconté dans mon livre comment la détestation de Carla Bruni pour l’ancienne Garde des Sceaux a été loin. Elle l’a soupçonnée d’avoir colporté des rumeurs sur son compte et a poussé le chef de l’Etat à sortir les grands moyens, allant jusqu’à la faire mettre sur écoute. En réalité, Rachida Dati a été une sorte de bouc émissaire. Comme beaucoup de gens à Paris, elle a répercuté un ragot qui circulait depuis des mois. Personne ne sait en réalité qui est à l’origine de la rumeur.
Que répondez-vous à ceux qui vous qualifient d’écrivain « arriviste » ?
Heureusement que mon livre ne fait pas l’unanimité. Certains l’ont aimé, d’autres non. Les lecteurs eux l’apprécient puisque mon livre est entré dans le classement des meilleures ventes.
Etes-vous riche aujourd’hui ?
Si mon but dans la vie était de devenir riche, j’aurais choisi un autre métier que celui de journaliste. Demandez à mes confrères marocains ou français s’ils sont milliardaires grâce à leur plume. Je travaille et je m’investis sur de longues périodes pour écrire mes livres. Des livres pour lesquels je cesse toute forme de collaboration extérieure. Il est normal et naturel que je sois payée pour cela. Vous en connaissez beaucoup qui travaillent bénévolement ?
N’avez vous pas peur de passer pour un auteur people ?
Ni Zidane ni Carla Bruni ne sont des people : dans le premier cas, il s’agissait du joueur de foot le plus connu au monde, dans le second cas, il s’agit de l’épouse du chef de l’Etat…
Qui sera votre prochaine « cible » ?
Cible ? Je n’ai jamais eu de cibles. Après ce livre, je vais continuer à exercer mon métier de journaliste.
Propos recueillis par Sabel Da Costa |