Une BD au Maroc est un événement. Celle-ci est l’œuvre d’un collectif. Inégale dans son contenu, elle traite en plusieurs histoires des affres des voyageurs clandestins.
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Certes, le sujet a déjà fait couler beaucoup d’encre. De Mahi BineBine à Youssouf Amine El Alamy (Les clandestins), les histoires de « h’rig » et de traversées illégales vers des terres promises ont fait recette dans les librairies. Mais en images et en BD, c’est une première au Maroc. 69 pages pour dix-huit bédéistes qui ont déployé leur talent pour traiter de cette thématique difficile qu’est le voyage vers la clandestinité.
Des auteurs d’origines diverses, Maroc, France, Congo, Côte d'Ivoire, Cameroun et des regards, des styles, des traits différents aussi sont à l’origine de ce recueil. Des dessins accompagnés de textes ou pas, des histoires simples ou complexes ; l’album surprend par sa variété. On y découvre de nouveaux noms, de nouveaux talents, et également des noms plus connus.
En darija et en français
On retrouve ainsi Abdelaziz Mouride, père de la BD au Maroc, qui a déjà publié On affame bien les rats et Le coiffeur. Il prépare une adaptation très attendue du Pain nu de Mohamed Choukri ; ou encore le peintre gadiri Larbi Babahadi, auteur de El Hadj Belaïd et Les racines d’Argania. Les scénarios ont tous été écrits par Jean-François Chanson, auteur de livres pour enfants, plus connu sous le pseudonyme de Mostapha Oghnia. L’album s’adresse en priorité à la jeunesse marocaine qui rêve de partir. Pour élargir la cible, il existe en deux versions, l’une en darija, l’autre en français. Il est édité par le peintre et illustrateur Miloudi Nouiga.
Images pixélisées
Si certains bédéistes du collectif ont un talent certain et un trait assuré, d’autres en revanche nous offrent des planches moins abouties. Parmi les meilleurs morceaux de l’album, on notera les quatre pages de Virée vers les abysses de Ismael Ezzeroual ou encore La télé, réalité de Patrice Cablat. Les mirages de Malika Dahil, quoique mièvres dans le propos et naïfs dans le trait, restent touchants. Mais on peut déplorer le caractère illisible de certains textes, les images pixélisées et en basse résolution. Cela, malheureusement, donne à l'ensemble de l'ouvrage un rendu assez médiocre.
Bahaa Trabelsi |