En plus de 2h40 de concert parfaitement maîtrisé, Sir Elton John a fait oublier la polémique qui a précédé sa venue, offrant à ses admirateurs un moment inoubliable.
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A 21h30 tapantes, Elton John, arborant des lunettes mauves ainsi qu’un costume noir et rouge satiné, a entonné sa première chanson d’une voix toujours aussi puissante. Ses doigts virtuoses courant avec dextérité sur le piano démentent ses 63 ans. Autour de lui, cinq excellents musiciens dont la plupart semblent « rescapés » de sa première tournée en 1969 (mais il l’indiquera plus tard, seul le batteur en est un). Paillettes, cuir, imprimé léopard et jeans, cheveux longs (et gris) et lunettes de soleil : le glam rock n’est pas encore mort ! D’ailleurs, alors qu’Elton John entame un morceau plus rythmé, un trentenaire branché commente : « Ça c’est du vrai rock’n’roll »…
Le public, venu en masse malgré les fatwas, a l’air d’apprécier, mais on est loin de l’ambiance night-club du concert de Mika. Il faut dire que la moyenne d’âge est sensiblement plus élevée, même si certains semblent trop jeunes pour avoir connu d’autres tubes que ceux extraits de la bande originale du Roi Lion. Et puis sir Elton a commencé par reprendre des ballades, dont certaines extraites de ses premiers albums, au début des années 70, la période « rock progressif et mélodique » que les critiques et les puristes préfèrent. Après les très belles Tiny Dancer et Rocket Man, sur lesquelles il alterne d’impressionnants solos et impros, il attaque quelques morceaux plus rapides et l’audience se réchauffe. Mais c’est quand il joue, seul au piano, les célébrissimes Candle in the Wind et Sorry Seems to Be the Hardest Word que la foule, enfin en territoire connu, réagit vraiment. Jusqu’à la fin du concert, il va mélanger ses hits des années 70 et 80, avec les titres les plus récents.
Un éventail d’émotions Petit à petit, il mobilise un public qui, s’il est composé d’admirateurs, ne semble connaître que quelques-uns de ses plus grands succès. Grâce à son indéniable talent, mais aussi grâce à l’expérience de 40 ans de carrière, il a pris en main la foule (du moins celle du carré VIP) et l’a fait passer par tout un éventail d’émotions, en musique, et sans se prendre au sérieux. Ainsi, il alterne chanson d’amour et titre plus joyeux, en passant par un intermède nostalgique avec l’un de ses plus beaux morceaux des années 80, I’m still standing, illustré par une projection de photos couvrant sa carrière : Elton et ses fameuses lunettes, Elton en Mozart, Elton avec tignasse et rouflaquettes « d’origine », etc. Finalement, la foule saute et tape des mains sur le très rythmé Bennie and the Jets, et reprend même le chorus (simplissime) de Crocodile Rock. « Allez, en chœur, Naaaa Na Na Na, Na Na… » Pour le rappel, encore une fois seul au piano, il commence par un extrait du Roi Lion, ce qui déclenche, sans surprise, l’hystérie des spectateurs, pour finir par son plus grand succès de la soirée, qui a également lancé sa carrière en 1970 : Your song. Ultime gentillesse ? Alors qu’en 2006, il avait déclaré dans une interview, « je pense qu’il faudrait interdire toute forme de religion organisée […] elles manquent de compassion et transforment les gens en lemmings haineux », ses derniers mots pour le public ont été : « God bless Morocco ! » Amen.
Amanda Chapon |