ça y est ! Monsieur musée existe. Mehdi Qotbi va intégrer ses locaux dans quelques semaines, et une équipe de six personnes l’épaulera à la tête de la nouvelle Fondation nationale des musées.
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Le passage de témoin entre le ministère de la Culture et la Fondation nationale des musées se réalisera dans la foulée avec une première mission pour la nouvelle structure : un inventaire des bâtiments et des musées du Maroc. Ce sera vite fait. La muséologie marocaine en est à sa préhistoire. L’artiste marocain a une toile blanche devant lui. On a voulu savoir comment il comptait la remplir.
Alors que l’interview allait commencer, un coup de fil nous a interrompus. C’était Abdelilah Benkirane. Un échange rapide sur le thème « pouvez-vous me signer les papiers pour que mes collaborateurs puissent commencer à travailler ? ». Et qu’a répondu le chef du gouvernement ? « Comment voulez-vous que je ne vous aide pas ! Sa Majesté vous a nommé, je serai toujours à vos côtés. » Eh bien voilà qui nous amène à la première question.
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Benkirane vous demande-t-il que les musées exposent d’abord de l’art propre ?
Il ne me demande qu’une chose : « Je veux que notre culture soit mise en valeur à l’image de ce que je vois lorsque je visite des musées à l’étranger. » Ni propre, ni sale.
Les rares musées existant au Maroc ne sont ni propres ni sales mais ils sont souvent poussiéreux et ne semblent pas avoir été rénovés depuis des décennies. Leur mise aux normes internationales fera-t-elle partie de votre mission ?
Nous allons accompagner et aider leurs responsables. Nous avons signé un accord de partenariat avec le Louvre et bientôt avec la direction des musées de France qui nous enverront des équipes spécialisées en muséologie. Le Louvre est prêt à former des personnels à la manipulation et à la restauration des œuvres. Et nous avons aussi signé pour une exposition patrimoniale. Le Louvre sera aux couleurs du Maroc en 2014. L’espace le plus visité au monde, c’est le Louvre. Le monde entier découvrira le Maroc grâce au Louvre !
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Le roi avait fait un chèque substantiel au Louvre. Est-ce un renvoi d’ascenseur ?
Il y a beaucoup de chefs d’Etat musulmans qui ont contribué à rénover l’aile des arts de l’islam du Louvre. Il est normal que le Maroc, à travers le roi qui est le commandeur des croyants, puisse participer. Il n’y a pas de renvoi d’ascenseur.
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Le carnet d’adresses de Mehdi Qotbi dans le ghota politique français va-t-il servir à la Fondation?
J’ai déjà commencé à avoir des réunions avec des gens de différents ministères en France. L’essentiel pour moi, c’est de renouer les liens avec les nouveaux membres des cabinets de gauche. Ce n’est un secret pour personne, une amitié de longue date me lie à Jean-Marc Ayrault. Je connais François Hollande avec qui j’ai animé en 2002 un débat sur l’intégration des Maghrébins en France. C’est un homme jovial qui aime la vie. Regardez cette photo ! (voir ci-contre)
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A part la France, y aurait-il d’autres pays qui peuvent soutenir le Maroc ?
Le jour où j’aurai mes bureaux, je compte inviter tous les ambassadeurs de l’UE et de la Ligue arabe pour voir ce qu’on peut faire ensemble.
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Depuis votre nomination à ce poste, des gens vous sollicitent-ils avec des projets de musée ?
Absolument. C’est impressionnant. Tout le monde veut faire des musées et il faut s’en réjouir ! J'en ai discuté avec le ministre de la Culture avec qui j’ai une entente parfaite. Avec Si Sbihi, nous réfléchissons sur l'élaboration d'un cahier des charges afin de labéliser ces futurs musées.
Quels seront les prochains musées ?
Avec le ministère de la Culture, nous avons eu une réunion la semaine dernière pour achever la réalisation du Musée d’art moderne de Rabat.
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Il Ă©tait temps, le chantier semble interminable !
Nous allons le finir. Le ministre a trouvé une solution à tous les problèmes. Il est normal que ça prenne du temps. Nous n’avons aucune expérience ! Ce musée sera une étape importante dans notre histoire. Ce sera la vitrine d’un art reconnu par le monde entier. J’ai rencontré le directeur du Reina Sophia, le musée national espagnol d'art moderne et contemporain qui m’a dit que nous avions une richesse extraordinaire au Maroc. Ce musée sera le reflet de cette vivacité. Sa Majesté a voulu que la culture soit une de ses priorités. Elle l’est. Et nous allons nous inscrire dans le sillon tracé par le roi.
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Quand le musée ouvrira-t-il ?
D’ici deux ans. Nous aurons une vraie collection grâce à un fond du ministère de la Culture que nous allons compléter avec celui du privé.
Pour remplir le musée, les artistes pourraient aussi donner des œuvres. Ferez-vous le premier geste ?
Oui, si je suis sollicité. Il y aura une commission indépendante d’experts du Maroc et de l’étranger pour choisir les œuvres. Mais je suis d’accord avec vous : il faut sensibiliser les artistes pour qu’ils donnent leurs œuvres car nous n’aurons jamais les moyens d’acheter tout le fonds. Je demanderai aussi aux banques qui ont des collections de qualité, des dons ou des prêts à long terme de noms comme Cherkaoui, Gharbaoui, Rbati, Kacimi et d’autres qui ont fait un travail considérable depuis les années 60 et 70 : Melehi, Chabâa, Belkahia, Belamine, Chaibia et Talal... je ne peux pas tous les citer pour ne pas faire de jaloux.
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Il y a des projets de musées de photos ou d’art contemporain à Marrakech. Mais à Casablanca, il n’y a pas de musées d’envergure. Jusqu’à quand ?
Dans les trois ou quatre années, il y aura un musée à Casa. Nous travaillons avec certaines personnes que je ne peux pas encore nommer pour qu’il y ait un grand musée sur le Maroc, digne de cette ville.
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Un musée différent du projet de musée d’interprétation de la ville dans la cathédrale, porté par Mohamed Sajid et l’architecte Rachid Ouazzani ?
Je ne suis pas au courant de ce projet. Mais c’est une très bonne idée.
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Les sociétés ont l’habitude de sponsoriser des festivals, pas des musées. Vont-elles aussi devenir les mécènes à l’instar de ce qui se passe dans le monde entier ?
Beaucoup de chefs d’entreprises sont prêts à nous aider. On a discuté avec un des plus grands banquiers de la place qui m’a dit : « Je peux réunir mes amis banquiers pour qu’ils prennent chacun en charge un musée à rénover. »
Propos recueillis par Eric Le Braz |