Dans L’Olympe des Infortunes, l’auteur nous plonge dans l'ambiance glauque d’une décharge municipale et de ses clochards. Intéressant mais sans plus.
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Yasmina Khadra sait « dragéifier » le sordide et le rendre plus digeste à son lectorat. C’est le moins que l’on puisse dire après avoir passé 232 pages dans les bas-fonds d’une décharge municipale, sans la moindre envie d’en sortir pour s’asperger de DDT. Un phénomène qui trouve son explication dans les nombreuses similitudes existant entre cette « poubelle géante » et notre environnement réel.
Dans l’Olympe, il y a, comme chez nous, des sages et des râleurs, des lèche-bottes et des braves, des manipulateurs et des pigeons. Chacun se démène pour tirer son épingle du jeu et passer pour moins imbécile que son voisin.
Ach, le personnage central vit dans ce lieu depuis des années avec Junior, le simplet. Son quotidien, il le passe à mettre en garde son jeune protégé contre les méfaits de la ville, des biens matériels ou tout simplement contre les autres marginaux de l’endroit. Même s’il justifie ce trop plein de sermons par la grande affection que lui porte le vieillard, Junior ne peut s’empêcher de se sentir étouffé. Etouffé et irrésistiblement attiré par les lumières de cet ailleurs interdit.
L’auteur distille son histoire sans nous encombrer de moralité dont sont friands bon nombre de ses pairs. L’Olympe des Infortunes (Dieu merci !) n’est pas là pour purifier nos âmes, ou changer nos vies, le livre est là pour témoigner des faits en leur apportant quelques touches de cynisme, d’humour et accessoirement de romantisme ! Les plus belles déclarations peuvent parfois surgir d’un tas d’ordures et être prononcées avec la plus grande sincérité par deux amants éméchés et fortement « testostéronés ». Bien vu ! Oui à la crasse, oui à l’ivresse, oui à la philosophie de la benne mais non aux lourdeurs du récit.
En voulant trop jouer avec les mots et les métaphores, ce livre devient très vite un bourbier où viennent se côtoyer un registre soutenu et une décontraction un peu obscène. La grossièreté gicle très souvent pour rien. Dans la foulée, on finit aussi par se rendre compte que notre connaissance des personnages demeure assez superficielle. Difficile de vraiment s’imprégner de l’œuvre lorsque l’on ne sait des héros que les quelques bribes concédées par l’auteur. Ce dernier pèche également par un certain manque d’inspiration sur la fin ; nous obligeant à la relire juste pour vérifier que la sensation de vide éprouvée n’est pas due à quelques incompréhensions, mais bel et bien à un dénouement abrupt. Yasmina Khadra donne l’impression d’avoir trop vite voulu passer à autre chose, son prochain roman peut être...
Sabel Da Costa |