EditoNouvelle GénérationDossierEconomiePolitiqueSociétéTendances & CulturePortraitBdVDiaporamaArchives
 
Follow actuel_maroc on Twitter
Follow actuel_maroc on Twitter
Rumeurs, intox : Ă  qui profite le crime ? 
Actuel n°84, vendredi 11 mars 2011
| More

Politiques, Ă©conomiques, diffamatoires, surrĂ©alistes, orientĂ©es… les rumeurs ont circulĂ© ces dernières semaines Ă  la vitesse de l’éclair.  Mais une fausse information cache souvent une vĂ©ritable intox.


***

El Himma est nommé ambassadeur à Riyad, Mostafa Terrab prend les rênes de la primature, les chars encerclent la ville d’Al Hoceima, les manifestants du 20 février sont des agents du Polisario ou encore les islamistes de Yassine projettent d’assassiner le pape ! Tous ces « scoops » ont été repris par les médias du cru et certains ont même fait la une de journaux étrangers. Rares sont les publications qui ont résisté au rouleau compresseur de la rumeur, certains même y ont participé avec une complaisance douteuse.

Au-delà de l’angoisse du lendemain, des incertitudes qui planent sur l’avenir du monde arabe, des images d’une rare violence qui nous parviennent de Libye ou de Tunisie, c’est indéniablement la rumeur qui cause en ce moment le plus de préjudices aux Marocains. Et des rumeurs, on en a eu à profusion depuis le coup d’envoi du 20 février. Par ces temps incertains, les intégristes de la désinformation usent et abusent de raccourcis, d’amalgames, tronquent volontairement les faits, en présentent d’autres avec un parti-pris évident. Entre rumeurs, intox et propagande, il y a un fil conducteur ; la volonté évidente, bien que non avouée, non pas d’informer mais de nuire ou de déplacer l’intérêt.

Cela a dĂ©marrĂ© avec l’annulation de la marche du 20 fĂ©vrier annoncĂ©e en grande pompe par la MAP. En fait, l’agence s’était fondĂ©e sur la dĂ©fection de quelques personnes pour balancer une fausse information, immĂ©diatement reprise par les mĂ©dias officiels. Le procĂ©dĂ© est d’une moralitĂ© douteuse mais lĂ , au moins, on sait Ă  qui le crime profite. Pour dĂ©crĂ©dibiliser  le mouvement, on est allĂ© mĂŞme jusqu’à trafiquer une photo oĂą l’on voit une jeune fille liĂ©e aux jeunes du 20 fĂ©vrier dans les bras du leader du Polisario !

 Panique totale

Sur le registre de l’attaque politique, le gouvernement El Fassi a eu droit à la totale : le jeudi 24 février, jour de bouclage pour la plupart des hebdos, l’imminence d’un remaniement paralysait les rédactions, les téléphones explosaient, le Web était quasiment saturé. La panique a atteint son comble quand les plus consciencieux des journalistes, essayant de joindre tel ou tel ministre, tombaient sur la boîte vocale de téléphones éteints. (En réalité, tout ce beau monde était en conseil de gouvernement). Le lendemain, les quotidiens titraient sur « Abbas El Fassi rentré en catastrophe de Qatar » pour rejoindre le roi à Marrakech, et être sommé de rendre son tablier. à leur décharge, les journalistes ont souvent été servis en rumeurs qui se sont avérées être de véritables informations non encore confirmées ou parfois mollement démenties par des sources officielles.

 Â«â€‰Fronde de mots »

Qui veut la peau d’El Fassi ? Face aux candidats qui se bousculent au portillon, il serait hautement hasardeux de s’en tenir aux adversaires politiques de l’Istiqlal puisqu’il y a également les vizirs qui ambitionnent de prendre la tête du premier parti du Maroc, les « casseurs » de Fassis, etc. Cette « fronde des mots » vise souvent beaucoup plus les mœurs des détenteurs du pouvoir. C’est pour cela que l’on colporte autant de ragots sur la puissance supposée ou réelle des Fassi et Fassi Fihri.

 Quand El Fassi a Ă©tĂ© jetĂ© en pâture Ă  un lectorat qui en redemandait, d’autres mĂ©dias se sont spĂ©cialisĂ©s dans la constitution de la nouvelle Ă©quipe gouvernementale. Driss Jettou a Ă©tĂ© rapidement Ă©vacuĂ© pour laisser place Ă  Mostafa Terrab qui « aurait dĂ©jĂ  ramassĂ© ses affaires pour quitter  son bureau de l’OCP ». VĂ©rification faite, l’homme qui avait pris quelques jours de repos, a appris sa nomination dans les colonnes des journaux. Pourquoi Terrab ? « Dans le milieu des affaires, il y en a beaucoup qui aimeraient voir Terrab quitter le mastodonte phosphatier, dont les anciens caciques qui ont perdu les passe-droits de l’ère Mourad ChĂ©rif », souffle un proche de ces milieux.

 Quant Ă  El Himma, la promesse de le voir terminer sa carrière sous d’autres cieux hante les rĂŞves de nombreux hommes politiques, et pas seulement en raison de sa proximitĂ© avec le roi. Il suffit de savoir que l’homme a passĂ© le plus gros de sa carrière au sein du ministère de l’IntĂ©rieur, « la mère » des ministères comme se plaisait Ă  le rĂ©pĂ©ter Driss Basri, ce dĂ©partement ayant un Ĺ“il sur tous les dossiers sensibles, pour comprendre la fĂ©brilitĂ© des politiques.

 Qui, bien entendu, n’hĂ©sitent pas Ă  faire le parallèle entre le RCD de Ben Ali et le PAM de FAH. Son lieutenant, Ilyas Omari, n’est pas en reste puisque l’homme a Ă©tĂ© donnĂ© en fuite Ă  Paris oĂą il aurait demandĂ© l’asile politique. Il est clair que la politique est l’un des terrains privilĂ©giĂ©s de la rumeur mais on ne peut ignorer la dĂ©sinformation financière et les rumeurs distillĂ©es savamment sur tel ou tel secteur, tel ou tel opĂ©rateur Ă©conomique.

 Or, avec la nervositĂ© des marchĂ©s, une rumeur peut très rapidement faire chuter – ou grimper – artificiellement des cours. Cette fois-ci, c’est au cours de la manif du 20 fĂ©vrier que la rumeur a fait des siennes. Avec des hommes d’affaires comme Miloud Chaâbi ou Noureddine Ayouch descendus sur le terrain, il fallait bien s’attendre au buzz. Le lendemain, on a eu droit Ă  Attijariwafa bank qui allait changer de mains, Lesieur sur le point d’être mise en vente, etc. Tout cela pour signifier que le roi devait se dĂ©sengager des affaires. Alors que l’affaire est entendue depuis le fameux conseil de l’ONA, en mars 2010, qui a dĂ©bouchĂ© sur la fusion de l’ONA et de la SNI. Une dĂ©cision qui a tout de suite permis de faire taire les rumeurs qui prĂ©tendaient que le roi dĂ©tenait 30 % de l’économie du Maroc.

 Pourquoi autant de rumeurs ?

 Hammadi Bekouchi explique que le silence de l’appareil d’état, des politiques, au moment oĂą la rue bouillonne, est perçu comme une insulte aux attentes des jeunes. « Manque de communication ou mauvaise communication, c’est du pareil au mĂŞme. Regardez ce qui s’est passĂ© Ă  Dakhla. Sur les tĂ©lĂ©s marocaines, on nous a servi un wali, un sĂ©curitaire qui est venu fustiger les ennemis de la nation qui seraient derrière ces troubles ; sur France Culture, le directeur du festival a tout simplement expliquĂ© que dans tout Ă©vĂ©nement oĂą sont rassemblĂ©s des milliers de jeunes, il y a forcĂ©ment de la casse ! » prĂ©cise le professeur en sociologie.

En somme, la rumeur serait antithétique à la liberté d’expression, elle est fortement tributaire de l’absence de communication du côté du pouvoir. Et forcément, la rumeur canalise les discours. « La première caractéristique de la rumeur, c’est qu’elle n’a pas d’auteur : on la tient d’untel, qui lui-même l’a su de… Remonter à la source est quasiment impossible sinon la rumeur deviendrait une information. Cette facilité explique l’usage immodéré qu’on en fait dans des sociétés comme la nôtre où la parole n’est pas encore totalement libre », commente ce spécialiste.

La rumeur peut-elle être dangereuse ? Oui, au moment où le Web permet de faire circuler n’importe quoi, à une vitesse phénoménale, rien n’est plus hasardeux que de laisser la rumeur prendre la place de l’information. Lâcher la bride à la rumeur en temps de crise peut déboucher sur la subversion, surtout à un moment où il est devenu de plus en plus difficile de pouvoir juger de la crédibilité d’une information. Alors que le malaise, lui, est bien réel. Les jeunes du 20 février ne sont pas des agents du Polisario, les revendications de la rue pour l’instauration d’une justice sociale, le partage des richesses ou la fin de l’impunité ne relèvent pas de l’intox.

 Abdellatif El Azizi

| More
Archives Dossier
N°173 : Train de vie de l’Etat : Ces agences inutiles et budgĂ©tivores
N°172 : Hopital public : Grand corps malade en quete de soins 
N°171 : Les rendez-vous manquĂ©s de la dĂ©mocratie 
N°170 : Royal Air Maroc : Champion du monde du redressement  
actuel N°169 : Fiscalité  du  tabac : Une rĂ©forme incomplète  
N°168 : Cannabis :  Une lĂ©galisation qui rapporterait 20 milliards...
N°167 : Chabat est-il fou 
N°166 : Les naufragĂ©s de Comarit 
N°164/165 : Justice et libertĂ© : DĂ©tention prĂ©ventive  
N°163 : Loi de Finances 2013 : Le  budget de  tous  les dangers  
N°162 : Sortir de l’hypocrisie 
N°161 : Abdelkrim : Genèse d’une interview historique 
N°160 : Ecoles privĂ©es : El Ouafa s'en va-t-en guerre  
N°159 : Ex-prisonniers du Polisario : Voyage au bout de l’enfer  
N°158 : RentrĂ©e sociale :  Les syndicats pointent une concertation en trompe l'oeil
N°157 : Binationaux : J’ai deux amours...  
N°155 : Emigration : Entre rĂŞve et dĂ©sillusion 
N°154 : MRE : Ils sont rentrĂ©s, ils ont rĂ©ussi  
N°153 : 50 Marocains Ă  la conquĂŞte du monde 
N°152 : Mohammed VI : StratĂ©gie gagnante 
N°151 : Economie 2000-2012 : le grand virage 
N°150 : Ramadan : Le pĂ©ril jeĂ»ne  
N°149 : OĂą s’amuser cet Ă©tĂ© 
N°148 : Couples mixtes : Amours sans frontières  
N°147 : Pourquoi ne peut-on plus voir le nu en peinture ? 
N°146 : La dĂ©ferlante des malls 
N°145 : Quand le Maroc Ă©tait amĂ©ricain 
N°144 : L’universitĂ© se privatise 
N°143 : Cheikh Maghraoui :  Cet homme est dangereux
N°142 : Affaire Benallou :  Une nouvelle bombe Ă  retardement
N°141 : Etre Noir au Maroc 
N°140 : Faut-il abandonner le français ? 
N°139 : Entretien avec Hamid Benalfdil : DG du CRI du Grand Casablanca.
N°138 : Le sexe au temps du cĂ©libat 
N°137 : ONG: La face cachĂ©e de la sociĂ©tĂ© civile
N°136 : Le modèle turc : Mythe ou rĂ©alitĂ© ?
N°135 : Caisse marocaine des retraites : La bombe Ă  retardement
N°134 : Qui a tuĂ© Amina ? 
N°133 : Moralisation de la vie publique : Le spectre de la campagne d’assainissement plane
N°132 : DĂ©linquance :  Le Maroc a peur
N°131 : 14 femmes  pour Benkirane
N°130 : Le rĂ©veil des salafistes  Demain la charia ?
N°129 : Dilapidation des deniers publics:  Benallou et l'ONDA... pour commencer
N°128 : DSK   Le marocain
N°127 : Conservation foncière : pièges, magouilles, corruption
N°126 : Les enfants perdus  de Casablanca
N°125 : PJD  Les rois du marketing
N°124 : Le 20-FĂ©vrier s'essoufle...  mais le Maroc bouillonne
N°123 : Protectorat,   Cent ans sans solitude
N° 122 : Formation du gouvernement,  Ca coince et ca grince
N°121 : Portables, Internet, documents biomĂ©triques…  Flicage, mode d’emploi
N° 120 : Sondage exclusif :  Benkirane, Monsieur 82%
N°119 : Pourquoi le Maroc ne sera pas   islamiste
N°118 : Mohammed VI versus al-Assad,   Au nom du père
N°117 : Gouvernement :   Cabinets ministĂ©riels, de l’ombre Ă  la lumière
N°116 : Plan social :  les sacrifiĂ©s de la RAM
N°115 : Coup d’Etat :   Skhirat, L’histoire du putsch revue et corrigĂ©e
N°114 : Politique fiction  Et le gagnant est ...
N°113 : Le dernier combat de   Mohamed Leftah
N°112 : Portrait Abdelbari Zemzmi
N°111 : Harcèlement sexuel et moral  Un sport national
N°110 : Bilan  Le code de la dĂ©route
N° 109 : L’ONDA  Grosses tensions et petites combines
N°108 : Placements Comment sauvegarder son patrimoine  
N°107 : ImpĂ´t sur la fortune El Fassi lance un pavĂ© dans la mare  
N° 106 : Interview 
N° 104/105 : Presse Ă©trangère/Maroc Le grand malentendu  
N°103 : Le temps de l’amazigh  
actuel 102 : RĂ©fĂ©rendum Ecrasante victoire du Oui  
actuel 101 : FatĂ©ma Oufkir : Le roi et moi 
N°100 : 100 indignations et 100 solutions pour le Maroc 
N°99 : Projet constitutionnel Le roi et nous  
N° 98 : PĂ©dophilie  : Tolerance zero 
N° 97 : Gad, Jamel & co Pourquoi les Marocains font rire le monde
N° 96 : L’horreur carcĂ©rale 
N° 95 : Enseignement privĂ© : Le piège  
Actuel n°94 : Moi, Adil, 25 ans, marchand de chaussures et terroriste  
N°93 : Ces cliniques qui nous ruinent 
Actuel n°92 : Il n’y pas que le 20-FĂ©vrier…  
Actuel n°92 : Qui cherche Ă  dĂ©stabiliser le pays ?  
Actuel n°92 : Â«â€‰Nos attentes sont plus grandes que le 20-FĂ©vrier »  
Actuel n°92 : Trois jeunesses 
Actuel n°92 : Attentat : Le jeudi noir de la ville ocre  
Actuel n°92 : RĂ©volutions et attentats Sale temps pour Zenagui 
Actuel n°92 : Mais que veulent les jeunes ? 
Actuel n°91 : Le grand nettoyage 
Actuel n°90 : Le retour des adlistes 
Actuel n°89 : Ruby : sexe, mensonges et vidĂ©o 
Actuel n°88 : ImpĂ´ts : Halte Ă  la fraude 
Actuel n°87 : Hassan II TV c’est fini 
Actuel n°86 : Marine Le Pen : L’islam, les Arabes et moi 
Actuel n°85 : Vive le Maroc libre 
Actuel n°84 : Rumeurs, intox : Ă  qui profite le crime ? 
Actuel n°83 : ET MAINTENANT ? Une marche pour la dĂ©mocratie
Actuel n°81 : Sale temps pour les tyrans 
Actuel N°72 : Aquablanca : La faillite d’un système  
Actuel n°69-70 : Benguerir sur les traces de Settat 
Actuel n°68 : Art, sexe et religion : le spectre de la censure 
Actuel n°67 : Dans les entrailles de Derb Ghallef 
Actuel n°66 : Ces FQIHS pour VIP 
Actuel n°65 : RNI, le grand politic show 
Actuel n°64 : Bourse de Casablanca, des raisons d’espĂ©rer 
Actuel n°63 : Ex-ministres :  y a-t-il une vie après le pouvoir ?
Actuel n°62 : Le code de la route expliquĂ© par Ghellab
Actuel n°61 : La vie sexuelle des Saoudiennes… racontĂ©e par une Marocaine
Actuel n°60 : Chikhates, shit et chicha 
N°59 : Eric Gerets, la fin du suspense ?
N°58 : Onze ans, onze projets 
N°57 : Raid sur le kif 
N°56 : Sea, Sun & Ramadan 
N°55 : Casablanca, mais qui est responsable de cette pagaille ?
N°54 : Ces ex-gauchistes qui nous gouvernent 
N°53 : Au cĹ“ur de la prostitution marocaine en Espagne 
N°52 : DiplĂ´mĂ©s chĂ´meurs : le gouvernement pris au piège
N°51 : 2M : Succès public, fiasco critique
N°50 : L’amĂ©rique et nous 
N°49 : Crise, le Maroc en danger ?
N°48 : Les 30 Rbatis qui comptent 
N°47 : Pourquoi El Fassi doit partir 
N°46 : Chirurgie esthĂ©tique :  plus belle, tu meurs
N°45 : McKinsey dans la ligne de mire  
N°44 : Trafic sur les biens des Ă©trangers 
N°43 : Avec les Ă©vadĂ©s de Tindouf 
N°42 : GCM / Tamesna : Un scandale en bĂ©ton !
N°41 : ONA - SNI: Ils ont osĂ©
N°40 : Enseignement: Missions Ă  tout prix
N°39 : Le Maroc, terre d'accueil des espions 
N°38 : Bleu Blanc Beurk 
N°37 : Boutchichis Les francs-maçons du Maroc
N°36 : Hamid Chabat rĂ©veille les vieux dĂ©mons
N°35 : Vies brisĂ©es 
N°34 : Maires Ceux qui bossent et ceux qui bullent
N°33 : Botola Combien gagnent nos joueurs
N°32 : Sexe, alcool, haschich, jeux… Les 7 vices des Marocains
N°31 : Tanger Le dossier noir des inondations
 
 
actuel 2010 Réalisation - xclic
A propos Nous contacter