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Le sexe au temps du célibat
actuel n°138, vendredi 20 avril 2012
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Plus on en parle, plus c’est tabou ! Disposer de son corps, entre adultes consentants, est une pratique à haut risque chez les célibataires qui n’en finissent pas de nourrir un lourd sentiment de culpabilité.
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Idée reçue : « L’âge du mariage est de plus en plus retardé (29 ans pour les femmes et 31 ans pour les hommes), et les jeunes, qui ne peuvent plus contenir leurs pulsions, passent à l’acte. » Selon cet angle, la sexualité chez les célibataires ne serait que la conséquence de changements sociaux brusques et rapides, que l’on gère tant bien que mal. Trop réductrice, cette manière de voir les choses occulte un volet crucial : la liberté de disposer de son corps. Entre adultes consentants, rien a priori ne devrait les empêcher de jouir de leur vie comme bon leur semble, à condition de ne pas s’exhiber en pleine rue ! Sauf qu’on est au Maroc. Un pays où l’interdit culturel, combiné au verrou religieux, fait qu’il est impossible d’envisager une relation sexuelle hors mariage, sans avoir à se cacher et à trouver mille et une combines pour ne pas se faire prendre. Ceux qui ont eu le courage de passer à l’acte bravent certes l’interdit, mais sombrent vite dans la culpabilité pour avoir voulu assouvir leurs désirs. Ont-ils le droit de jouir de leur corps ? Beaucoup de ceux que l’on a interviewés, croisés, ou simplement côtoyés dans la vie quotidienne, ne se le permettent pas. Posez-leur la question abruptement : « Est-il normal que la société interdise les relations sexuelles hors mariage ? », il vous répondront « oui ». Ajoutant que la société est « schizophrène » et qu’ils acceptent de composer, tant que cette schizophrénie n’est pas résolue. Entre faire l’amour en cachette ou bousculer l’ordre social (et éventuellement religieux), les tourtereaux choisiront la première option. « Je ne parlerais pas de schizophrénie mais de recherche d’une nouvelle identité sexuelle. Je ne parlerais pas non plus de progrès mais d’une transmutation de la perception de la sexualité dans notre société », explique la sexologue Amal Chabach. « Nous vivons dans une société musulmane qui a sa propre culture, ses croyances, ses convictions et ses interdits. Chacun grandit imprégné de ce mélange. Et, devenu adulte, fait le choix pour différentes raisons de s’y soumettre ou bien de s’en défaire, ou alors d’essayer de trouver un équilibre entre les deux... ce qui est le cas de beaucoup de jeunes aujourd’hui », nuance-t-elle.
Deux barrières à sauter !
Pourtant, même pour transgresser les codes, il y a des… codes à respecter. Si l’on exclut les relations clients-prostituées, les couples marocains – en particulier les femmes – ne passent à l’acte sexuel qu’après s’être assurés que les choses se passeront dans le cadre d’une « relation sérieuse ». Pour beaucoup, la « relation sérieuse » est l’antonyme de l’amourette. Une relation où le couple se donne rendez-vous au tribunal de la famille, quelques mois ou quelques années après, pour sceller son alliance. Or, ce n’est pas vraiment de promesse de mariage dont il est question. « La Marocaine fait une fixation. Celle de trouver le prince charmant. Par conséquent, elle craint que celui qu’elle fréquente ne fasse que profiter de son corps pour la laisser tomber ensuite. Du coup, elle ne couche que par amour. Ainsi, quand elle est éprise, son partenaire est un prince charmant potentiel, même si elle sait pertinemment que ce ne sera jamais lui, elle embarque volontiers dans le rêve. C’est un moyen de contourner non seulement l’interdit social, mais aussi l’interdit psychique dû à son éducation », analyse finement Kawthar. Ainsi, une fois que l’amour est là , la première barrière dite de « relation sérieuse » saute.
« Vice caché »
Le deuxième obstacle, lui, est d’ordre biologique : l’hymen. « Ma virginité ne représente rien pour moi, et encore moins pour mon copain. Mais j’y tiens. Par respect pour mes parents, mais aussi parce que je veux en faire cadeau à mon futur époux », confesse Lamia, qui a (difficilement) accepté de se livrer au jeu des questions-réponses. Pour elle, ne pas être vierge l’expose à plusieurs risques. A commencer, par le fait d’être en position de faiblesse et de devoir accepter un mari qui ne correspondrait pas à ses critères au prétexte qu’elle souffrirait d’un « vice caché ». Entre-temps… c’est fellation et sodomie à volonté ! Certaines des filles interrogées vont même jusqu’à assurer qu’elle ne cacheront jamais ces pratiques à leur futur mari. « Je crois que c’est son droit de connaître mon passé. Et il doit l’accepter, sinon il ne me conviendrait pas », ajoute Lamia. Et, a priori, des maris comme ça, il en existe. Simplement, parce que sorti de son contexte de « gage de chasteté », l’hymen est devenu à lui seul un symbole social. « La femme peut faire l’amour, mais elle ne doit pas perdre son hymen. C’est comme ça, c’est plus fort que nous », assure Ahmed. Ainsi, la société aurait évolué, mais dans un sens encore plus schizophrénique. La femme peut avoir une vie sexuelle, mais tout en gardant son « ticket de garantie ». La « schizophrénie sociale » se serait-elle érigée en vertu ?
Ali Hassan Eddehbi
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Tranches de vie… sexuelle
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Recueillir des témoignages sur les aventures sexuelles des célibataires est un chemin de croix. Les filles, brimées par le tabou, refusent de s’exprimer sur la question par crainte d’être traitées de prostituées. Les garçons ne confient presque jamais une mésaventure et ont tendance à dénaturer les faits pour entretenir leur image d’homme fatal. Dans la société marocaine, avoir une vie sexuelle hors mariage est un délit, ne pas en avoir est perçu chez les hommes comme un « manque de débrouillardise ».
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Sur un toit ou au fond d’un cinéma
Marwa a 20 ans. Cela fait trois ans déjà qu’elle est avec son copain, de quelques mois son aîné. Passés les préliminaires d’usage, les deux jeunes amoureux décident, au bout de six mois, de passer à l’acte. Trop jeunes pour se rendre compte du poids de l’interdit social, et encore moins du risque qu’ils encourent si jamais ils tombent entre les mains d’un flic moustachu, ils ne pensent qu’à assouvir le désir de découvrir leurs corps, loin du regard réprobateur de la société. « Nous avions l’habitude de flirter dans les couloirs d’un immeuble près de notre lycée. Le jour où nous avons eu envie de passer aux choses sérieuses, l’idée s’est imposée d’elle-même. Nous sommes montés au dernier étage en nous disant que personne ne nous dérangerait là -haut », raconte la jeune fille. « Mais après trois ou quatre fois, nous n’avons plus osé. Nous avons croisé des habitants dans l’escalier et nous nous sommes dit que s’ils nous croisaient encore, ce serait foutu pour nous. » S’en est suivie une longue période d’abstinence, interrompue de flirts furtifs. « Depuis, c’est essentiellement dans les salles de cinéma qu’on le fait. Mais ce n’est pas du tout pratique », raconte-t-elle. De la frustration pure et simple.
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Aimez le jour, pas la nuit !
Adil, la vingtaine, a également rencontré les mêmes problèmes avec sa copine. Ils se sont connus à la fac. « Elle venait de sortir d’une relation. Son ex-copain était plus âgé, il travaillait et habitait seul. Elle allait chez lui », raconte-t-il. Face à cette situation, Adil ne pouvait pas offrir à sa maîtresse des conditions médiocres. « Elle s’était habituée à une relation normale, dans un appartement et un grand lit pour deux. Je trouvais débile de lui proposer d’aller faire l’amour dans une voiture, ou le soir dans une salle de cinéma, se souvient notre homme. J’ai raconté mon problème à un voisin plus âgé que moi, et il m’a vite proposé une solution, c’était un cadeau du ciel ! » Le deal était le suivant : Adil allait partager la colocation avec l’ami de son voisin. « Ils avaient un appartement de deux chambres et je devais partager le loyer de l’une des deux. Ma part était de 250 dirhams, mais étant encore étudiant, cela représentait un sacré budget pour moi. » Notre homme s’est pourtant débrouillé pour obtenir la somme. Mais il a déchanté après quelques mois : « Mon colocataire m’a fait savoir qu’il avait besoin de la chambre l’après-midi et en soirée. Du coup, nous étions contraints de nous y rendre le matin. On devait sécher nos cours pour aller faire l’amour, car les week-ends, c’était impossible d’y aller, même en matinée », se souvient Adil. L’autre problème était d’ordre matériel puisqu’il devait puiser dans l’argent de poche pour payer le loyer. Et c’était donc à sa copine de le prendre en charge pour ses cafés et cigarettes…
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Sans moyens, s’abstenir
Karim est étudiant dans une école privée de commerce à Rabat. Il est en couple avec sa copine, rencontrée alors qu’il étudiait en France. « On allait chez ses parents, ou elle venait chez moi quand mon colocataire n’était pas là . Tout se passait bien jusqu’à ce que je décide de rentrer au Maroc », déplore-t-il. Habitué à la « life cool » en France, il trouvait un mal fou à « s’isoler » avec sa chérie quand elle lui rendait visite au Maroc. « Elle venait presque tous les deux mois, mais elle avait du mal à s’accommoder de la situation chez nous. Elle était française, je pouvais facilement l’inviter dans la maison de mes parents, mais mon petit frère me pourrissait la vie, exprès, raconte-t-il. Avec le temps, je me suis fait des amis dans mon école. L’un d’entre eux me cédait son studio à l’Agdal pendant les vacances scolaires. » Ensuite, Karim a rompu avec Lucile, mais il avait trouvé le moyen de se soustraire à l’interdit. Ses copains de classe, majoritairement aisés, avaient des appartements en location, ou bien des parents souvent en voyage… Ils n’avaient aucune difficulté à faire ce qu’ils voulaient. « Au Maroc, il suffit d’avoir de l’argent et tout se passe bien », conclut-il.
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Parking Ă louer
Brahim est gardien de nuit. Il surveille un parking de plus d’une centaine de voitures. Le soir, il a affaire à une clientèle particulière. Des fêtards qui viennent terminer leur whisky en voiture, et ceux qui ont envie d’un bon « coup » avant de dormir. « J’ai l’habitude de les chasser, car ils me créent des problèmes. Mais je suis plus indulgent avec les jeunes habitants du quartier. » Comprenez, si vous connaissez quelqu’un du quartier, celui-ci peut vous « introduire » auprès de Brahim, afin qu’il vous laisse passer un bon moment d’amour… moyennant une trentaine de dirhams. Mais Brahim n’aime pas les prostituées, parce qu’elles « font des scandales ». Quid des policiers ? « Quand ils débarquent, ils ne fouillent pas mon parking. Ce sont mes amis, et quand ils me demandent qui est dans la voiture, je leur explique que c’est les gosses des voisins. Il suffit de ne pas trop en faire et il n’y aura pas de dérangement. » Et alors que nous prenons congé, il nous lance : « Venez quand vous voulez, mais ne faites pas de bruit ! »
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Un clic, un coup
Hicham et Saïda sont tous les deux cadres dans des entreprises privées. Ils gagnent bien leur vie et comptent en profiter. Il y a presque six mois qu’ils sortent ensemble. Ils sont fiancés et se donnent déjà corps et âme. Saïda loge encore chez ses parents et ne peut donc pas rentrer tard dans la nuit. « Parfois, je peux passer la nuit dehors, mais c’est rare », confie la jeune femme de 27 ans. La solution, elle l’a vite trouvée : inventer des déplacements professionnels les week-ends. Saïda est responsable commerciale et ses parents gobent le mensonge facilement. « Mes parents s’accommodent mieux de l’idée que je sois en déplacement à Marrakech pour le boulot, plutôt que de celle de tarder la nuit. J’en suis étonnée », dit-elle l’air un peu ébahi. Ainsi, une fois les parents prévenus, Saïda se connecte sur facebook pour échanger avec ses amies. « Nous sommes plusieurs amis, garçons et filles, à recourir au service web pour trouver de beaux appartements à Marrakech. On s’échange les numéros des agents immobiliers, mais aussi les commentaires sur la qualité du bien », explique-t-elle non sans fierté. Avec des prix allant de 500 à 1 000 dirhams, le couple confirme tomber sur de « bonnes affaires ». « Les images de l’appartement son visibles sur le site. Il suffit d’expliquer au courtier qu’on veut être loin des endroits où rôdent les prostituées. C’est plus cher, mais beaucoup plus sûr. » Car, même dans un pays où le sexe hors mariage est tout simplement incriminé, l’on sait faire la différence entre amourette et prostitution.
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Propos recueillis par Ali Hassan Eddehbi |
Carottes : mode d’emploi
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Pour éviter que les célibataires ne sombrent dans le péché, il y a la chasteté, le sexe sans pénétration ou la méthode Zemzemi. Dans une intéressante interview à La Vie Eco, l’imam s’est longuement expliqué sur sa fatwa, autorisant la masturbation à l’aide de carottes, qui a provoqué le buzz et le scandale. « Nous vivons une époque où tout pousse les jeunes à avoir des relations sexuelles hors mariage. La masturbation est donc une solution provisoire pour les jeunes musulmanes et musulmans, le temps qu’ils puissent se marier. Je n’ai jamais donné cet avis-là pour des personnes mariées parce qu’elles n’en ont pas besoin. Autoriser la masturbation a donc un objectif religieux : c’est de faire éviter à notre jeunesse de tomber dans le grand péché. Cette même règle a été adoptée par l’imam Malik. » Mais pourquoi des carottes ? Zemzemi a ses sources : « Plusieurs oulémas ont évoqué l’usage de la carotte, et ce, tout au long de l’histoire musulmane. Parmi eux, l’imam Al-Choukani, qui a vécu au Yémen il y a 200 ans, qui a dédié tout un manuscrit à la masturbation, autant chez les femmes que chez les hommes. Les écrits de Choukani sur ce sujet sont publiés sur internet. Lui-même a évoqué un nombre important d’érudits qui autorisaient la masturbation. Dans son livre, il a évoqué la carotte, mais également d’autres moyens pour assouvir son plaisir. Il y a également un alem marocain, mort il y a dix ans, cheikh Abdelaziz Benseddik, qui, dans une lettre sur les pratiques sexuelles, a évoqué la carotte et d’autres moyens pour se masturber. Cet écrit est disponible sur le marché marocain. Ces choses-là sont loin d’être nouvelles et franchement, je ne comprends pas pourquoi cela suscite autant de réactions. » Sacré Zemzemi. Vivement la prochaine fatwa !
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Ma piaule, mon amour
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Piaule, « Bertouche », local… Les appellations varient en fonction du moment et des générations, mais le concept reste inchangé. Pour coucher en dehors du mariage, il faut quatre murs et un toit. Pas si facile…
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Pour Khalid, cadre bien rémunéré dans un établissement public, la sexualité des célibataires se résume à trois éléments : « Il faut avoir une maison, une voiture et de l’argent. » Pourtant, les choses ne sont pas aussi simples. Avoir une « maison » n’est pas qu’une question de moyens. Notre jeune homme le reconnaît d’ailleurs. Il a dû payer un loyer d’environ 4 000 dirhams pour une pièce et un hall. Le standing est très moyen, mais l’appartement est un havre de paix. « J’ai cherché dans plusieurs quartiers chic, mais les propriétaires ne voulaient pas de célibataires dans leur immeuble. Les meilleurs logements sont d’ailleurs réservés aux familles », déplore Khalid. Mais les problèmes ne s’arrêtent pas là . Car les bâtiments où logent des célibataires sont souvent occupés par des prostituées également. « Un immeuble où ne loge aucune famille est considéré à haut risque. Parfois, ce sont des immeubles de passe, et les descentes de police y sont très fréquentes », nous explique Mbarek, agent immobilier. Pour ce professionnel, il est de plus en plus difficile de trouver une habitation « entre les deux ». C’est-à -dire, occupé par des familles relativement ouvertes. « Dans pareille situation, les propriétaires s’assurent de l’identité du preneur, de sa fonction et parfois même, ils nous demandent des fiches de paie », explique Mbarek. Mais une fois accompli ce chemin de croix, l’heureux locataire peut, enfin, vivre sa vie en paix…
Moins cher, plus dangereux
D’autres, avec moins de moyens, font le choix de la colocation. Dans des quartiers moins huppés et, forcément, plus exposés au risque. Le prix du loyer varie entre 1 300 dirhams pour le studio et 2 500 dirhams pour un deux ou trois-pièces. Cette catégorie recourt à d’autres techniques. A commencer par le classique « je monte en premier et tu me suis », pour éviter de croiser des voisins râleurs ou trop indiscrets. Il y a aussi les droits d’entrée à verser au concierge, en contrepartie de son silence.
Quant aux plus malins, ils se débrouillent pour louer avec des colocataires qui ne sont jamais là . Youssef a trouvé l’astuce parfaite en partageant sa piaule avec un homme marié. « Il ne veut pas de problème. Il vient très rarement et paie la majeure partie du loyer. Parce que l’appartement est à mon nom et que ça lui évite toute compromission », affirme notre homme qui est, semble-t-il, un habitué de cette pratique. « J’habitais avec un collègue de bureau. Il me versait le tiers du loyer, rien que pour pouvoir venir les week-ends », raconte Youssef. Pour les plus fauchés, ou simplement les petits consommateurs de sexe, c’est sur les appartements meublés, loués à la journée voire même à l’heure, qu’ils se rabattent. A Rabat, par exemple, le quartier de l’Agdal en regorge. « Les immeubles fichés sont les moins chers, le prix de la nuitée ne dépassant pas les 200 dirhams. D’autres appartements plus discrets peuvent aller jusqu’à 300 dirhams pour une demi-journée », nous confie un concierge. Ici, ce n’est pas le standing qui compte, mais la discrétion. Plus c’est tranquille, plus c’est cher. Mais la clientèle n’est pas la même. « Une fille qui se respecte ne viendrait jamais dans ces endroits à la réputation sulfureuse. Ce sont les prostituées qui y ramènent leur clients », explique Khalid, qui en a déjà fait l’expérience. « D’ailleurs, l’une des raisons pour lesquelles je loue si cher est qu’aucune de mes copines n’accepterait de s’aventurer dans des immeubles mal fréquentés », justifie Khalid… Conclusion : les prostituées sont mieux loties que les célibataires désireux de vivre normalement leur sexualité. Le summum des paradoxes !
Ali Hassan Eddehbi
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Trois questions Ă ... Amal Chabach, sexologue
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« Le chemin est encore long vers une sexualité satisfaisante »
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actuel. Les Marocains célibataires vivent-ils mieux leur sexualité aujourd’hui ?
Amal Chabach. Nous vivons dans une société musulmane qui a sa propre culture, ses croyances et ses interdits. Chacun grandit imprégné de ce mélange. Devenu adulte, il fait le choix de s’y soumettre ou bien de s’en défaire, ou alors d’essayer de trouver un équilibre entre les deux... Ce qui est le cas de beaucoup de jeunes. D’où les multiples amalgames, erreurs, souffrances…
Donc, le chemin est encore long pour tous nos jeunes concitoyens qui veulent construire une sexualité satisfaisante pour eux-mêmes et pour leur partenaire.
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Beaucoup de filles tiennent encore à leur virginité, mais s’adonnent à d’autres pratiques. Est-ce normal que celles-ci persistent ?
Dans notre société, l’hymen représente l’honneur familial. La virginité est « le garant visible » de la bonne conduite de la fille. Mais, aujourd’hui, avoir des flirts un peu poussés serait plus toléré ou plutôt ignoré. Cela est considéré comme naturel, comme une faiblesse humaine faisant partie de la panoplie du sentiment amoureux.
Donc sans être acceptées, ces pratiques peuvent être pardonnées. Mieux, elles peuvent être utilisées pour attirer le prince charmant puisqu’elles lui permettent de goûter à l’interdit sans lui servir le plat entier.
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Est-il sain qu’un(e) jeune n’ait pas d’expérience sexuelle avant le mariage à un âge de plus en plus tardif ?
La sexualité est un instinct naturel que nous pouvons contrôler si nous le désirons, ou bien l’extérioriser autrement, si la tension est trop élevée (rêves érotisés nocturnes, plaisirs solitaires...).
Ce ne sont pas les rapports sexuels qui déstabilisent ces jeunes célibataires mais plutôt l’absence de rapports chaleureux, entiers, aimants et valorisants. Nous sommes plus qu’un corps avec ses instincts, nous sommes des êtres humains avec un corps, un cœur et un esprit. Donc nos besoins sont bien plus que charnels. C’est le sentiment de solitude qui pose un vrai problème.
Propos recueillis par Ali Hassan Eddehbi |
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