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Pourquoi El Fassi doit partir
actuel n°47, samedi 15 mai 2010
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A la veille de la présentation de son bilan de mi-parcours, la cote du gouvernement est au plus bas. El Fassi cristallise le mécontentement de la rue et de ses partenaires de la majorité. La démission d’un Premier ministre usé et attaqué de toutes parts, et d’une équipe trop disparate, autoriserait un salutaire électrochoc.
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A chaque fois qu’il est pressé de s’expliquer par des journalistes, Abbas El Fassi s’en sort toujours par la même pirouette. A la veille des élections législatives de 2007, interrogé sur son programme politique, El Fassi répondait déjà sans hésiter : « Mon programme, c'est le discours du trône de Sa Majesté. » Un peu court ! Certes, aujourd’hui, l’équipe d’El Fassi n’est pas totalement responsable des turbulences qui agitent ce printemps mais les erreurs de casting comme les insuffisances d’une partie non négligeable de son équipe, exacerbées par un climat social tendu et une conjoncture économique maussade, font de ce gouvernement l’un des plus contestés. Et contestables.
L’un des tout premiers reproches fait au gouvernement, c’est d’avoir complètement dégoûté les citoyens de la « politique ». La dépolitisation des citoyens, de l’administration, des députés, des partis, n’a jamais atteint un tel degré ! Aujourd’hui, les moments majeurs de la vie politique nationale présentent inexorablement une majorité dispersée et une opposition qui se cherche encore, mis à part le PJD.
Choc des ego
Il semble que la division constatée depuis l’arrivée du gouvernement El Fassi est le résultat du choc des ego et de la guerre de leadership que se livrent Fouad Ali El Himma et Benkirane, le patron des islamistes. Selon Abdelillah Benkirane, «  l’arrivée tonitruante du PAM n’a pas arrangé les choses. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’équipe El Fassi a laissé prospérer un front hétéroclite de la majorité, comme elle a encouragé l’éclosion d’une opposition aux parcours politiques divergents et parfois antinomiques ». Pour le leader du PJD, l’absence de visibilité est le pire ennemi du gouvernement actuel. La multiplicité des partis ou des candidats se définissant comme acteurs de l’opposition n’est pas
mauvaise en soi. Mais quand ces mêmes acteurs ont un pied dans l’opposition et un autre dans le gouvernement – comme c’est le cas pour le RNI qui émarge à la majorité et forme en même temps un bloc commun au Parlement avec un parti de l’opposition (l’UC pour ne pas la nommer) – le moins que l’on puisse dire, c’est que les règles du jeu démocratique sont suffisamment brouillées pour que l’opinion publique ait toute les raisons de se détourner de la politique…
Si au moins le bilan de ce gouvernement prêtait à l’optimisme… Le flop de l’instance de lutte contre la corruption, la guéguerre pour le Conseil économique et social qui n’a pas encore vu le jour, la déclaration de patrimoine qui vient juste d’être mise en application, les procès des barons de la drogue ouverts en grande pompe et qui ont fait pschitt, les défaillances de notre système de santé ou les dysfonctionnements du système éducatif… il n’y a guère de secteurs qui ne soient à l’abri des manquements de l’équipe El Fassi, trop occupée à gérer des histoires de strapontins pour prendre à bras-le-corps les attentes des citoyens. Exemples ? Quand l’USFP a fait mine de se retirer du gouvernement, on a inventé un poste pour le numéro deux du parti. Depuis, qui peut citer une seule et même modeste action commise par Mohamed Elyazghi, ministre d’Etat sans portefeuille ? Idem pour Mohand Laenser qui a hérité du même type de maroquin pour tenir en laisse ses troupes qui continuent malgré tout à vouloir en découdre avec le gouvernement. En France, pour ne citer que ce pays, les ministres sans portefeuille qui ont fait leur retour sous le second gouvernement de François Fillon portent le titre de « ministre chargé de compétences auprès du ministre de tutelle ». Ils ne disposent pas d'une administration propre, mais travaillent pour les ministères auxquels ils sont rattachés, ce qui n’est pas le cas chez nous.
Sur le terrain, depuis deux ans au moins, les changements promis se heurtent aux peurs de la rue. Dernière en date, la menace de grève générale agitée par la CDT. Il aura fallu toute la diplomatie et les réseaux d’un Taïeb Cherkaoui pour éviter que les fiers-à -bras de Amaoui ne nous servent un nouveau juin 1981, alimenté par les ressentiments des classes populaires chauffées à blanc par une hausse des prix vertigineuse et des promesses d’emploi sans lendemain. Le symbole de l’échec du dialogue social, c’est quand même un parti au gouvernement qui a réussi l’exploit de se mettre à dos sa propre centrale syndicale, comme le relève Hamid Chabat !
La faute Ă la crise
Toujours sur le plan social, l’épineux dossier des retraites et le chômage des diplômés sont autant de handicaps que traîne l’équipe El Fassi sans guère d’espoir de trouver une issue, du moins à court terme. « En critiquant l’action du gouvernement, vous oubliez un principe de réalité important. Tout le monde privilégie le social sur l'économique et, donc, la redistribution des richesses sur leur création. Ce n’est pas notre priorité. Le problème, c'est que la redistribution repose sur une création de richesses préalable, or cette création de richesses est forcément génératrice d’un certain niveau d'inégalités sociales. On ne peut pas contenter tout le monde ! », s’indigne un ministre du gouvernement El Fassi.
Soit. On peut d’ailleurs remarquer que ce sont les ministères liés à l’économie qui fonctionnent le mieux : « Même s'il est clair que l'action du gouvernement El Fassi manque de cohésion, nous assistons à l'émergence de sous-équipes qui fonctionnement bien, et non sans une certaine autonomie. Je pense au quatuor Baraka-Mezouar-Akhannouch-Chami qui s'érigent en gouvernement économique à part entière », souligne Ahmed Ouayach, président de la Confédération marocaine de l'agriculture et du développement rural.
Mais cette dream team n’a pas su maintenir la confiance dont jouissait ce gouvernement auprès des opérateurs étrangers, il suffit d’examiner la chute brutale des investissements et prêts privés étrangers. Au terme du premier trimestre 2010, ces derniers ont en effet baissé de 52,3 %, tombant à 4,3 milliards de dirhams, contre plus de 9 milliards à fin mars 2009. Un niveau jamais atteint depuis plus d’une décennie. La faute à qui ? A la crise bien sûr… Et à la mauvaise image d’un Maroc gangréné par la corruption, au sein de la justice notamment, comme l’ont souligné en chœur les ambassadeurs des Etats-Unis et de l’Union européenne. Mais pour savoir vraiment qui est responsable, l’affaire apparaît autrement plus compliquée. Ainsi, comme l’affirme Abdelmoughit Benmessaoud Tredano, professeur universitaire et fin connaisseur de la réalité politique du pays : « Dans ce gouvernement, Il n'y a pratiquement pas moyen de savoir qui est véritablement responsable de quoi. »
Pour faire face à toutes ces épreuves, le gouvernement semble, en dépit de ses déclarations d’intention, renoncer à toute réforme réelle. Comme le souligne Abdelkrim Belguendouz, universitaire spécialiste des MRE : « Avec le gouvernement El Fassi, force est de reconnaître que de nombreux dossiers sociaux, ignorés tant par le gouvernement de l'alternance que par le gouvernement Jettou, ont de nouveau été mis sur la table. Les priorités sont désormais l'Education et la Santé, et c'est tant mieux. Reste à voir dans quelle mesure la politique menée dans ces départements, qui consiste plus à gérer qu'à rompre avec le passé, est pertinente. Pour l'heure, l'équipe El Fassi n'a pas fait ses preuves, même si ces chantiers ont été érigés en priorité absolue par le Souverain. » Hormis l’opposition – le PJD, qui de temps à autre laisse filtrer ses inquiétudes  – l'optimisme de l’équipe El Fassi serait sain s’il ne se nourrissait d’illusions. Or, plus on fuit la réalité des chiffres, plus dure s’annonce la chute. De ce point de vue, la comparaison des promesses annoncées avec les performances réalisées ne plaide guère en faveur du gouvernement (voir tableau ci-dessous). Certes, un Premier ministre doublé d’un véritable homme d'Etat peut être démenti par la conjoncture. Encore faut-il qu’il soit en mesure de démontrer sa capacité à maîtriser les événements. Au moins, à tout faire pour les contrer. Or, c’est l’action  –  ou l’inaction – de toute une partie du gouvernement qui pose aujourd’hui question.
Ses insuffisances semblent d’autant plus grandes qu’il a mis, par l'emprise de ses corporatismes et de ses clans familiaux, une croix sur la méritocratie et la mobilité de l’ascenseur social. Il a donné ainsi naissance à une espèce d'aristocratie familiale qui tient d’une main ferme les rênes politiques et économiques de ce pays. Faiblesses criantes de l’action gouvernementale, déshérence dans laquelle se situent nombre de départements ministériels, absence d’un véritable pilote, turbulences récurrentes d’une majorité en décomposition : Abbas El Fassi doit avoir l’élégance de s’effacer.
Abdellatif El Azizi |
Ces ministres dont on peut se passer
Inutiles, incompétents ou victimes d’une erreur de casting, quelles que soient les raisons de leurs échecs, ils ont déçu et n’ont pas convaincu.
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Pourquoi avoir sélectionné ceux-là plutôt que d’autres ? Au-delà de la subjectivité induite par les choix opérés, les ministres cités en référence, et appelés à quitter la scène gouvernementale, ont en commun de s’être illustrés par ce qu’il est convenu d’appeler des échecs importants. Echec sur les objectifs assignés, échec sur les stratégies adoptées, échec sur le management de leur département. La sympathie ou la convivialité des personnalités ne fondent pas une stature ministérielle. Ahmed Akhchichine est un ministre de l’opposition, Abderrahim Sbaï a un rôle inconnu du grand public, Khalid Naciri est en confrontation permanente avec les professionnels des médias, Yasmina Baddou n’a pas convaincu par sa stratégie tout comme Nizar Baraka, et même s’il vient d’arriver, Bensalem Himmich a beaucoup promis mais n’a encore rien concrétisé. Quant à Driss Lachguar, il cristallise toute la déception de l’alternance. A la décharge de ces ministres, le fait « qu’ils ne disposent pas de la réalité du pouvoir », comme le précise l’économiste Mehdi Lahlou. Mais est-ce excusable pour qui entend contribuer à la vie politique.
YASMINA BADDOU Une juriste qui rame à la Santé
Yasmina Baddou est une femme de caractère. Dynamique, présente sur le terrain, elle serait même dotée d’un certain charisme. Mais force est de constater que cette juriste n’a pour l’heure guère brillé aux commandes de la Santé. « Elle s’agite, elle bouge mais ne fait pas grand chose »,
résume Kamal Lahbib, acteur associatif. Lors de la récente présentation de son rapport stratégique au Parlement, elle a d’ailleurs essuyé les attaques de plusieurs groupes parlementaires : disparités villes- campagne et privé-public, absence de carte sanitaire, mortalité infantile inquiétante, etc. « Yasmina Baddou est un bon profil et elle a fait des efforts, c’est indéniable : couverture médicale, formation des cadres, décentralisation... Cela dit, elle fait les frais d’un cumul de problèmes qui existaient déjà il y a des décennies », analyse le politologue Mohamed El Ayadi. Pour autant, c’est à la capacité d’un ministre à gérer de front les réformes que l’on apprécie ses qualités. De ce point de vue, la ministre de la Santé peine à convaincre, laissant des pans entiers de son ministère sans ligne directrice, sans engagements volontaristes et sans moyens.
KHALID NACIRI L’éternel incompris
En trois ans, Khalid Naciri n’a réussi qu’une chose : se faire détester par la majorité des journalistes du pays. En cause, ses déclarations à l’emporte-pièce contre la presse qui vit d’incessants allers-retours devant les tribunaux (amendes, sondage de Tel Quel, affaire du rotavirus, fermeture du Journal hebdomadaire, emprisonnement du journaliste Driss Chahtane, etc). « Son échec est flagrant : pas de Code de la presse, des négociations sur les libertés de la presse boudées par les professionnels », analyse Kamal Lahbib qui estime qu’un tel résultat n’est peut-être pas à lui imputer totalement : « La clé du problème n’est pas entre ses mains », observe-t-il. Alors, une simple marionnette, notre ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement ? Pas vraiment, ce ministre PPS est tenu de défendre la politique de tout le gouvernement, même si son parti n’y est représenté que par deux portefeuilles ministériels. « Le travail de Naciri est ingrat. Il doit cautionner la régression sur le volet de la liberté de la presse dans un contexte ou l’Etat cherche à imposer sa mainmise sur le secteur », explique le politologue et membre du PPS, Youssef Belal. Pourtant, l’homme ne manque pas de qualités, si l’on en croit son ami et politologue Tajeddine El Husseini : « C’est un homme modéré, qui sait prendre des décisions. Il est parfois mal compris car il est franc et parle avec cœur et sentiment. C’est ce qui lui vaut autant d’agressivité. » Une bien maigre consolation.
AHMED AKHCHICHINE Un plan d’urgence qui prend son temps
« Ce ministre relève d’un parti de l’opposition, en même temps, il est en charge d’un secteur aussi vital que l’enseignement. Quel crédit et quelle cohérence donner à ce gouvernement ? », s’insurge l’économiste et professeur Mehdi Lahlou. Ahmed Akhchichine devrait, ne serait-ce que pour cette raison, rendre son tablier. Mais en attendant, ce technocrate réputé « homme de dossier » fait pire en promettant « un plan d’urgence » resté au stade de… l’annonce. « Akhchichine a eu la chance d’avoir un budget conséquent pour mettre en place son plan. Mais il n’en a pas profité et on ne voit encore aucun résultat », assène Kamal Lahbib. Pourtant, ce ministre PAM, quasiment apolitique, n’a rien à perdre. Sa qualité de technocrate aurait dû lui faciliter la tâche. Reste qu’il dirige un ministère difficile, dont même les socialistes de l’USFP ont fini par se débarrasser. « Il y a beaucoup de résistances au sein de ce ministère : le poids des syndicats, l’encadrement qui fait défaut, etc. », analyse Mohamed El Ayadi. Plus qu’un changement de tête, l’Education au Maroc à besoin d’un organigramme clair car « depuis 2007, on nous promet la réforme, sans jamais rien voir venir », s’inquiète Mehdi Lahlou.
BENSALEM HIMMICH La grosse tĂŞte
Ce philosophe prolixe, spécialiste de l’œuvre d’Ibn Khaldoun, n’est aux commandes de la culture que depuis le 29 juillet 2009. Intellectuel respecté, militant peu visible à l’USFP, il a été dépêché surtout pour donner un second souffle à la politique culturelle du pays, longtemps parent pauvre de nos ministères. Signe de cette volonté d’accélérer les choses, le budget de son département a été doublé lors de l’adoption de la nouvelle loi de Finances fin 2009. Dès sa nomination, Bensalem Himmich a multiplié les annonces : promotion du patrimoine et du livre, multiplication des partenariats avec le secteur privé, etc. Pourtant, lors de son premier grand événement, le Salon du livre de Casablanca, il a surtout montré ses capacités de bateleur et une forte propension à l’autopromotion... « En quelques mois, cet homme a pris la grosse tête, se complaisant dans son rôle de premier responsable », se désole un artiste. Même si « six mois ne sont pas suffisants pour le juger », comme le rappelle Mohamed El Ayadi, il n’en demeure pas moins que Bensalem Himmich a, au final, autant promis que déçu.
DRISS LACHGUAR L’insoutenable du politique
Voilà un homme politique ayant longtemps usé le fond de son pantalon sur les bancs de l’hémicycle qui réalise enfin son rêve : devenir ministre. C’est l’image que reflète Driss Lachguar, ministre des relations avec le Parlement, de toute sa carrière politique à l’USFP. « La manière avec laquelle cette homme est devenu ministre pose problème au sein même de l’USFP. Il a été désigné en dehors des instances du parti », estime Mohamed El Ayadi. Homme de paille du PAM pour certains, opportuniste pour d’autres, Driss Lachguar a pourtant la carrure de son poste : il est fort en gueule et teigneux. Mais cela ne fait pas oublier le fait qu’il a surtout été catapulté ministre pour protéger les équilibres fragiles des représentations partisanes après l’éviction de Abdelwahed Radi. Pire, Driss Lachguar s’est illustré par sa véhémence particulière en demandant avant d’être nommé ministre que son parti quitte le gouvernement. « Il aurait pu s’abstenir de faire ce genre de déclaration ou bien refuser d’intégrer le gouvernement à la première occasion », s’insurge Kamal Lahbib. Ce ministre symbolise à lui seul la perte de crédibilité d’un parti autrefois emblématique : l’USFP. Dommage.
NIZAR BARAKA Le gendre inutile
Le gendre de Abbas El Fassi traîne au moins une casserole surmédiatisée : son appartenance au clan El Fassi, très fortement représenté au gouvernement. En plus de ce problème d’image, auquel il ne peut rien, Nizar Baraka peut difficilement expliquer ce qu’il fait exactement. A quoi sert le ministère des Affaires économiques et générales et qu’est-ce qui le différencie des autres départements chargés des questions économiques ? « C’est une dénomination hybride. On devrait rattacher ce poste à la primature pour éviter les dépenses », assène l’économiste Mehdi Lahlou. « C’est plus un super chef de cabinet qu’un ministre à part entière », poursuit notre expert. Nizar Baraka a une importante réforme à engager : redresser la Caisse de compensation pour mieux cibler les plus pauvres. Problème : le ministre entend créer de toute pièce un nouveau régime de compensation au lieu de recourir à une réforme par étapes, ce qui provoque l’ire des économistes. Quid de ses réalisations, notamment l’augmentation du prêt de la Banque mondiale ? « C’est plus à mettre à son passif. La Banque mondiale nous prête parce qu’on paie. Ne plus avoir recours à ces crédits, ce serait cela la fierté ! », proteste Mehdi Lahlou. Aïwa Baraka !
Zakaria Choukrallah |
Les enfants prodiges d’El Fassi
Le gouvernement ne manque pas de profils pointus qui ont fait leurs preuves. La plupart d’entre eux pilotent leur ministère avec volontarisme et compétence. Tour d’horizon des ministres qui assurent.
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A une exception près, ils n’étaient pas forcément destinés à participer à l’action gouvernementale, encore moins à prendre les commandes d’un ministère. Pour la quasi-totalité d’entre eux, leur vocation politique ne s’est révélée que tardivement. Pourtant, ils ont su créer de véritables révolutions au sein de leurs départements respectifs. Certains, comme Yasmina Benkhadra pour l’Energie ou Aziz Akhannouch pour l’Agriculture ont dû repartir à zéro. D’autres, et c’est le cas de Karim Ghellab pour les Transports, ont fait face à des résistances aussi tenaces que durables. Partant de l’existant, deux autres (Ahmed Réda Chami pour l’Industrie et les Nouvelles Technologies et Jamal Rhmani pour l’Emploi) ont non seulement valorisé l’arsenal déjà mis en place mais l’ont porté à des niveaux très prometteurs.
AZIZ AKHANNOUCH Mister GĂ©ant Vert
Avant d’intégrer le gouvernement El Fassi, Aziz Akhannouch se distinguait pour être à la tête de l’un des plus grands, et discrets, groupes industriels et de services du Royaume. Nommé ministre en 2007, il n’a pas tardé à mettre au service de son département ses qualités de chef d’entreprise. « Il nous a enfanté les deux plus grandes stratégies de développement de l’agriculture et de la pêche maritime de l’histoire du pays », témoigne Ahmed Ouayach, secrétaire général de la Confédération marocaine de l’agriculture et du développement durable. La première n’est autre que le Plan Maroc Vert qui prévoit d’attirer 150 milliards de dirhams d’investissements à l’horizon 2020, créer 1,5 million d’emplois, renforcer la part de l’agriculture dans le PIB de 70 à 100 milliards de dirhams et porter la valeur des exportations de 8 à 44 milliards de dirhams. Pour l’heure, le programme entame la 3e tranche du partenariat public privé en mobilisant 21 000 hectares du foncier. La seconde est Halieutis 2020, censé organiser, moderniser le secteur de la pêche et favoriser l’intégration de la filière. Objectif : mobiliser un investissement de 9 milliards de dirhams à l’horizon 2020. « Pour l’un comme pour l’autre, les premiers résultats sont à attendre dès les trois à quatre années à venir, les instruments ayant déjà été mis en place et les agences créées étant opérationnelles », observe encore Ouayach. Bref, il a peaufiné la stratégie, et affiché son volontarisme. Le temps viendra des résultats. En attendant, de quelque côté que l’on se tourne, il est plébiscité.
AMINA BENKHADRA L’experte
Pour avoir déjà dirigé l’Onhym (Office national des hydrocarbures et des mines), Amina Benkhadra est loin d’être étrangère au secteur. Et son expertise ne s’est pas démentie. Deux ans après sa nomination, elle a non seulement sorti son département de la léthargie à laquelle l’ont condamné ses prédécesseurs, mais en a fait un maillon essentiel de toute la stratégie de développement du pays. « C’est la première fois dans l’histoire de notre pays que nous disposons d’une vision stratégique quant aux secteurs de l’énergie et des mines, avec un calendrier d’exécution et d’énormes moyens », dit Moulay Abdellah Alaoui, président de la Fédération de l’énergie (CGEM). Une vision stratégique déclinée tant sur le court terme (2008-2012) que sur le long terme, avec pour urgence d’assurer l’équilibre entre l’offre et la demande en électricité. Les chantiers avancent. Parmi les réussites, le lancement du programme de l’efficacité énergétique pour économiser 15 % de l’énergie à l’horizon 2020, la généralisation des lampes de basse consommation avec la distribution de 22 millions de lampes à l’horizon 2012, le lancement du Plan solaire à travers la création de MASEL, des parcs éoliens de Tanger et Dakhla ainsi que des centrales d’Aïn Beni Mathar et de Mohammedia. Autre prouesse, l’option nucléaire n’est plus un tabou.
KARIM GHELLAB Tout vient à point…
Il lui en aura fallu du temps, mais Karim Ghellab, ministre de l’Equipement et du Transport peut aujourd’hui souffler. A son actif, de nombreuses avancées sur plusieurs dossiers déterminants, dont la réforme portuaire et les réseaux autoroutiers (916 kilomètres opérationnels suivis des autoroutes Marrakech-Agadir et Fès-Oujda dont les travaux sont bien avancés). La logistique a également vu son contrat-programme signé avec le patronat. Mais la plus grande victoire reste le Code de la route qu’il a réussi à faire passer au bout de trois années de négociations, d’une série de grèves et d’importants amendements. « Aujourd’hui, nous disposons d’un cadre global et transparent dans lequel nous pouvons agir. Il y va de l’intérêt général dans la mesure où cette loi vise d’abord à mettre fin à l’hécatombe à laquelle nous assistons aujourd’hui. Et le ministre a eu raison de ne pas baisser les bras », déclare Abdelilah Hifdi, président de la Fédération du transport. Mais Ghellab est aujourd’hui attendu sur un autre dossier tout aussi délicat, celui du système des agréments pour le transport des voyageurs. Un dossier ou le courage politique n’est pas moins attendu.
AHMED REDA CHAMI L'homme de la situation
Vu l’ampleur des chantiers, d’aucuns affirment qu’il est trop tôt pour apprécier l’action d’Ahmed Réda Chami à la tête du ministère de l’Industrie, du Commerce et des Nouvelles Technologies. Mais une chose est sûre, le ministre a marqué son territoire. Premiers virages, le recadrage opéré de la vision Emergence et le repositionnement de la production industrielle nationale. En chiffres, il s’agit de générer un PIB de 50 milliards de dirhams additionnels, chaque année, ainsi qu’un volume supplémentaire d’exportations de 95 milliards de dirhams. Pour ses deux premières années à la tête de ce département, le jeune ministre a réussi le lancement d’Imtyaz et Moussanada, deux fonds d’investissement public-privé. On lui doit également Maroc Numeric 2013. Ce plan de développement des technologies de l’information qui vise, entre autres, l’augmentation de leur part dans le PIB (de 8 % aujourd’hui à 12 % en 2012). Un plan trop ambitieux selon certains. « Je me demande si Chami aura le temps de tout faire en si peu de temps », s’interroge Rachid Jankari, spécialiste en technologies de l’information. Chami est également attendu sur le chapitre du climat des affaires, un dossier impliquant notamment la Justice. Il reste que, pour l’instant, beaucoup s’accordent à reconnaître que ce ministre USFP fait son job, et plutôt bien. The right man at the right place.
JAMAL RHMANI Le bosseur
De l’avis même de ses « adversaires », les syndicats, le ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle, Jamal Rhmani, aura au moins eu le mérite de sortir son département de la routine dans laquelle il sombrait. « Jamais un ministre avant lui n’a osé s’attaquer à des chantiers comme la loi sur les syndicats, ou encore le texte réglementant le droit de grève », témoigne Abdelhamid Fatihi, secrétaire général adjoint de la Fédération démocratique du travail et président du groupe parlementaire de la centrale à la Chambre des conseillers. Egalement à son actif, le dispositif de dédommagement en cas de perte d’emploi, mais aussi et surtout une méthodologie de travail qui séduit même les plus sceptiques. Les réunions entrant dans le cadre du dialogue social sont plus régulières que jamais. Le dispositif de règlement des contentieux patronat-syndicat est réactivé, en même temps que nombre de conseils (le Haut Conseil de la promotion de l’emploi, le Conseil des négociations collectives et le Haut Conseil de la mutualité). La mutualité est d’ailleurs le dossier chaud du mandat Rhmani. Et tout porte à croire qu’il est bien parti pour une grande annonce dans ce sens.
Tarik Qattab |
On attend encore plus d’eux…
Certains occupent des postes sensibles, d’autres dirigent des départements touchés de plein fouet par la crise mondiale, et d’autres encore gèrent des secteurs dont l’éparpillement nuit à l’efficacité. Mais tous ont en commun de devoir assumer d’importantes réformes.
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A l’image du ministre des Habous ou de celui des Affaires étrangères, certains incarnent les changements engagés par le roi Mohammed VI. D’autres ont été désignés au gré des calculs qui ont suivi les législatives de 2007. D’autres encore ont été récemment hissés au poste de ministre et font déjà parler d’eux. Trait commun : avoir réussi à enclencher une véritable dynamique là où ils ont été installés tout en souffrant de quelques limites, parfois structurelles, parfois liées à leur propre gestion. Professeur de droit international, Abdelmoughit Benmessaoud Tredano invite à la nuance : « En l’absence d’une véritable autonomie, tant dans les attributions que dans les moyens de nos départements gouvernementaux, juger l’action d’un ministre donné ne peut être qu’approximatif. » Mais l’honneur de la politique, c’est aussi de rendre compte, quelle que soit sa marge de manœuvre.
TAÏEB FASSI FIHRI Une réforme et des hésitations
Taïeb Fassi Fihri est ministre des Affaires étrangères depuis 2002. Force est de reconnaître que la diplomatie marocaine a franchi bien des étapes depuis. Au premier rang de celles-ci, l’effort considérable consenti dans la gestion de l’affaire du Sahara. En interne, la logique de cooptation qui primait pour le choix des diplomates a cédé devant le recrutement de nouvelles compétences de tous les horizons. « La structure évolue. Mais de nombreuses erreurs, dont la plus récente est la gestion de l’affaire Aminatou Haïdar, auraient pu être évitées. Autant certaines positions marocaines sont respectables et courageuses, autant leur exécution est sujette à caution », analyse toutefois Tredano. Une chose est sûre, et la confiance royale aidant, Taïeb Fassi Fihri a encore de beaux jours devant lui. Mais cette longévité ministérielle ne devrait pas occulter l’importance des chantiers en cours : Proche-Orient, Union européenne, Maghreb, etc…
AHMED TOUFIQ Les équilibres de l’ouverture
Ministre des Habous et des Affaires islamiques, Ahmed Toufiq gère non seulement LE dossier sensible qu’est la foi des Marocains, mais aussi et surtout celui des enjeux liés à la légitimité de tout le système politique. En cela, il s’est démarqué par un projet ambitieux de réforme religieuse, allant de l’encadrement des imams à la gestion des mosquées en passant par la diversification des conseils des oulémas et l’uniformisation des fatwas. Ce qui fait dire à Mohamed El Ayadi, politologue, qu’Ahmed Toufiq est l’un « des rares ministres à avoir une véritable politique ». A-t-on pour autant permis une ouverture spirituelle ? « Rien n’est moins sûr », affirme Youssef Blal, politologue et spécialiste de l’islam politique. « Il n’y a qu’à voir la crispation née autour de la question des missionnaires pour s’en rendre compte. Tout en combattant l’extrémisme religieux, on se ferme devant tout pluralisme religieux et liberté de conscience. » Dans cette configuration, certaines attentes, notamment le débat avorté avec les détenus salafistes, n’ont pas été satisfaites.
SALAHEDDINE MEZOUAR La rigueur, toujours !
En digne héritier de Fathallah Oualalou, il a brillé par le renforcement opéré de la stabilité du cadre macroéconomique. « La rigueur budgétaire est toujours de mise et Mezouar ne cherche nullement à déroger à la règle », explique l’économiste Driss Benali. Les trois lois de Finances qu’il a fait adopter sont ainsi marquées par une volonté de maîtrise des dépenses de fonctionnement au profit des investissements publics (avec un bond de 20 % en 2010, soit 160 milliards de dirhams). Egalement à l’actif du ministre, la baisse du poids de la dette publique qui est passée de 48 % à 45 % du PIB et une amélioration de la note de la dette souveraine par Standard & Poor’s. On doit aussi à Salaheddine Mezouar la création du comité de veille stratégique pour aider les secteurs vulnérables face à la crise. Parmi les secteurs bénéficiaires, l’automobile, les composants électroniques, le tourisme, les phosphates. « Mezouar a néanmoins bénéficié de bonnes années agricoles dans un pays où gouverner, c’est pleuvoir, et du fait que le système bancaire a été à l’abri de la crise financière », explique encore Benali. Reste la menace d’un retour à la hausse de l’inflation, au risque de grever le pouvoir d’achat. Le déficit budgétaire, établi à 4 %, menace de se creuser davantage en l’absence de recettes de privatisation et au regard du déficit de la caisse de compensation. Bref, le nouveau leader du RNI est un bon exécutant des directives de la Banque mondiale. Mais on attend plus de la part d’un prétendant au leadership…
AHMED TAOUFIQ HEJIRA Le château de cartes
Ahmed Taoufiq Hejira, ministre de l’Habitat, a connu des jours meilleurs. Nommé au poste plutôt trois fois qu’une, il subit aujourd’hui les dégâts de la crise que traverse le secteur. L’histoire retiendra de lui des programmes comme Villes sans bidonvilles, les villes nouvelles, lancés en 2004, mais aussi et surtout le logement social, et les exonérations fiscales qui en sont le moteur. Taoufiq Hejira, c’est également la fusion de tous les opérateurs publics du secteur dans une seule entité : Al Omrane. Une véritable prouesse. Des mesures qui expliquent le boom immobilier de ces dernières années. Mais la bulle a fini par exploser avec la décision de la direction des Impôts de mettre fin aux exonérations.
A cela s’ajoute la crise qui en a dissuadé plus d’un. « La fièvre née autour des villes nouvelles, objet de toutes les spéculations, est vite retombée. Les investisseurs étrangers se sont désistés. Villes sans bidonvilles n’a pour l’heure concerné que 40 petites et moyennes agglomérations, sur les 65 signataires du contrat, alors que le projet devait être achevé en 2010, et en 2012 pour Casablanca en guise de couronnement », nous explique cette source proche du dossier. Résultat, il y a toujours un déficit de 1 million de logements par an. Et le rythme de production, dont le record a atteint à peine 150 000 unités par an ne peut rattraper le retard.
MONCEF BELKHAYAT L’homme pressé
Même s’il est ministre depuis quelques mois, il ne se passe pas un jour sans que Moncef Belkhayat ne fasse parler de lui. Et pas toujours en bien. Sitôt arrivé, il a opéré une rupture totale avec la stratégie 2020 mise en place par Nawal Al Moutawakil. Deux mois après sa nomination, il s’empresse d’annoncer « sa » stratégie, établie à l’horizon 2016. « Dans tous les cas, nous avons au moins une stratégie en matière de sport, dont l’application répond à un calendrier et à des objectifs précis », se réjouit l’universitaire et spécialiste en économie du sport, Moncef El Yazghi. Sauf que Moncef Belkhayat est un homme pressé. A l’annonce des grandes lignes de cette stratégie, se sont succédé pas moins de 45 contrats-programmes avec les fédérations. Ce qui pose un problème de crédibilité quant à la faisabilité de ces réformes. L’augmentation de 26 % du budget consacré au sport montre certes la volonté de l’Etat de donner une plus grande marge de manœuvre au ministère de tutelle. « Mais nous sommes loin du seuil psychologique des 1 % du budget global », précise El Yazghi. D’où la volonté du ministre de disposer des biens immobiliers du secteur de la Jeunesse pour financer sa réforme. Une levée de boucliers s’en est suivie. Pour calmer les esprits, le ministre prévoit de lancer une rencontre nationale sur la jeunesse. Une première.
MOHAMED AMEUR A quand un vote MRE ?
Ministre délégué chargé des MRE, Mohamed Ameur n’a pas la tâche facile. D’autant que la « réhabilitation » de son département est intervenue après un gouvernement d’alternance où la communauté marocaine à l’étranger n’avait pas droit de cité. Au gouvernement Jettou, elle a été réduite à un poste protocolaire, rattaché au ministère des Affaires étrangères, sans budget ni organigramme. « Nous revenons clairement de très loin », analyse Abdelkrim Belguendouz, universitaire spécialisé dans le domaine des migrations. Doté du budget et des attributions nécessaires, Ameur brille par la grande proximité qu’il a tissée avec les Marocains d’ailleurs. En témoigne ses nombreux déplacements en Europe et dans les pays du Golfe. Tout comme il a lancé la création de cinq centres culturels marocains en Europe. Reste un grand absent : la participation aux élections des Marocains du monde. Pour sa défense, le ministre annonce que le dossier est entre les mains du CCME (Conseil consultatif pour les MRE) et fait valoir l’échec de l’expérience menée dans les années 1980. « Mais d’aucuns savent que l’un comme l’autre argument sont inacceptables, le ministère étant le département de tutelle et le Maroc ayant évolué depuis les années 1980 », commente l’expert.
NOUZHA SKALLI La guerre des prérogatives
Nouzha Squalli, ministre du Développement social, de la Famille et de la Solidarité ne sait plus où donner de la tête. Elle est à la tête d’un département qui résume, à lui seul, toute la stratégie actuelle du Maroc. Et c’est là où le bât blesse. « Nous avons d’une part un programme tentaculaire dédié, à savoir l’INDH, qui est centralisé au niveau du ministère de l’Intérieur et, d’autre part, une sur-communication politique autour des projets entrant dans ce cadre ». Les deux facteurs ne favorisent ni l’émergence du département de Nouzha Skalli ni une connaissance des actions qu’il mène. « L’étendue des missions dont ce département doit s’acquitter n’a d’égal que la faiblesse des ressources humaines et budgétaires qui sont mises à sa disposition. Il y a un décalage entre le mandat et les moyens. » En attendant, on lui doit le premier texte réglementant le travail des « bonnes » et un autre, tout aussi ambitieux, criminalisant l’emploi des mineurs. Des révolutions.
ABDELLATIF MAAZOUZ Un boulet nommé ALE
Abdellatif Maâzouz est la parfaite victime des différents accords de libre-échange (ALE) signés par le Maroc. Dans un contexte de crise aggravée, il est pris entre deux feux : d’une part les contraintes d’ouverture du marché marocain posées par les ALE avec les Etats-Unis, mais aussi celles des pays arabes et de la Turquie ; d’autre part, les mesures de sauvegarde auxquelles appellent les industriels. Sur le premier chapitre, il a réussi à introduire la Logan made in Morocco dans le très résistant marché égyptien. Sur le second, il a consenti aux céramistes des mesures à même de protéger la production locale. « Mais le drame, c’est qu’on a mis la charrue avant les bœufs. Au lieu de rendre notre économie plus compétitive avant d’aller chercher des ALE, nous avons adopté la méthode inverse. Résultat, un taux de couverture de 42 % et un énorme déficit commercial », analyse l’économiste et spécialiste des ALE, Najib Akesbi. Multiplier les déclarations rassurantes et les visites à l’étranger ne suffit pas. Le redressement de notre commerce extérieur passe par une politique autrement plus volontariste.
Tarik Qattab
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Les nouveaux venus doivent faire leur preuve
Il est encore trop tôt pour estimer les résultats des ministres nommés en janvier dernier. Mais leurs premières sorties sont déjà de bons indicateurs…
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Qu’est-ce qu’un bon ministre de l’Intérieur ? La perception de ce ministère n’a jamais été bien commode. Le portefeuille était, jadis, considéré comme « hautement sécuritaire  », peu attrayant et cristallisant toutes les rancunes. On savait sa réputation sulfureuse et le passif trop lourd. Tout pour déplaire. Mais la démocratisation de la machine avec des hommes comme Chakib Benmoussa a certainement considérablement modifié la donne. Sauf que sur le plan sécuritaire, politique et social, très mouvementé du fait des braquages, des tensions politiques et sociales, de la grogne des policiers et des hommes qui gèrent l’administration territoriale, l’homme a été rapidement dépassé. D’où l’appel à un homme à la main de fer dans un gant de velours.
TAĂŹEB CHERKAOUI Premiers pas prometteurs
Taïeb Cherkaoui présente bien, il est proche du sérail et a souvent été appelé à gérer des situations complexes du temps où il présidait à la Cour suprême. En cette saison où la criminalité bat son plein, où les réseaux terroristes se comptent par douzaines, où le trafic de drogue investit même l’école, un ministre qui a de la poigne n’est pas de trop. Reste à savoir comment doser la matraque quand les manifestants qui descendent dans la rue par dizaines ne sont ni des criminels ni des délinquants en puissance. N'empêche qu le patron de l’Intérieur a réussi à débloquer une augmentation substantielle des policiers, il vient de jouer au pompier en faisant le médiateur avec les syndicats pour éviter que la rue ne s’embrase et c’est lui qui prépare l’Intérieur au grand examen de la régionalisation avancée.
MOHAMED NACIRI Un juste Ă la Justice ?
Même topo au niveau de la Justice où un autre nouveau venu également proche du sérail tente, tant bien que mal, de mettre de l’ordre dans un secteur gangréné par des maladies quasiment incurables. S’agissant de justice, la réaction des usagers est terriblement impulsive, affective. La méthode Naciri, c'est d'aborder sciemment et à la fois tous les terrains de la réforme. Ce qui lui aura permis d'ouvrir maintes pistes heureuses. Une fois n’est pas coutume, dès sa nomination, Naciri, est parti à la rencontre des acteurs de la vie juridique pour les sensibiliser et les mobiliser autour de la réforme, et essayer de lever par la même occasion les résistances qui empêchent tout ce beau monde de s’impliquer dans le changement. Vaste programme !
YASSIR ZENAGUI Un ministère sous le volcan
Quant au jeune Yassir Zenagui qui vient de prendre les commandes du ministère du Tourisme, il a effectué sa première sortie médiatique. Lors d’une conférence de presse remarquée à Casablanca, le nouveau patron du Tourisme a précisé que « le Maroc devrait accueillir 9,4 millions de touristes en 2010, soit 94 % de l’objectif fixé par la Vision 2010 »… Reste à savoir quand on atteindra les 100 % et si ce sera sous son ministère… On espère pour lui que les cendres d’un volcan islandais n’influencent pas ses performances.
SAÂD ALAMI Monsieur «  wait & see  »
Concernant l’ex-ministre des Relations avec le Parlement qui a troqué son strapontin contre celui de ministre délégué chargé de la Modernisation des secteurs publics, nul doute qu’il ne faudra pas s’attendre à des miracles de celui qui a érigé «  le wait and see  » en mode de gouvernance à l’époque où il gérait le département occupé depuis par Driss Lachgar. Un ministre n’est pas forcément un spécialiste de tous les domaines, mais c’est quelqu’un qui doit savoir solliciter l’expertise, un postulat qui semble avoir échappé à Saâd Alami.
A. E. A. |
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