Les cadres du ministère de la Justice se triturent les méninges pour réformer de fond en comble le code pénal. Quelles sont les mesures proposées ? Le point.
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La réforme du code de procédure pénale semble sur la bonne voie si on en juge par les premières informations relatives à cette révision majeure attendue depuis des décennies. « Les consultations pour la réalisation de la mouture du texte avant qu’il ne devienne un projet de loi ont commencé. Cela avance doucement, mais il faut relativiser en rappelant qu’une des premières décisions du ministre Mohamed Naciri, lors de sa prise de fonction, a été de désigner une commission et d’ordonner des expertises de spécialistes sur cette question », explique Me Mustapha Ramid, avocat et président du groupe parlementaire du PJD.
Le débat sur la révision du code pénal ne date pas d’aujourd’hui. Bien avant Naciri, feu Mohamed Bouzoubaâ, ministre de la Justice sous le gouvernement Youssoufi s’y était déjà essayé en adoptant, lors des assises de la Justice en 2004, des mécanismes permettant la résolution des contentieux simples et la révision des courtes peines privatives de liberté. Bien que certains aient été rendus effectifs, ces efforts n’avaient pas abouti au nouveau code pénal voulu.
Ministère en ébullition
Aujourd’hui, la donne a changé. Depuis le discours royal de 2009, insistant sur la nécessité de réformer la Justice, le ministère de tutelle semble en ébullition et enchaîne les détails sur le futur texte, véritable ossature de tout le (nouveau) système judiciaire marocain.
Ainsi, après l’annonce par le ministre de l’introduction des peines alternatives, un représentant du ministère de la Justice a révélé de nouvelles dispositions au cours d’une conférence organisée par l’Observatoire marocain des prisons. Celles-ci sont actuellement discutées par la commission en charge de la rédaction de la nouvelle mouture. On découvre que le département de la Justice planche actuellement sur la remise de peine en cas d’auto-délation à l’image des systèmes anglo-saxons. « Si l’accusé reconnaît les faits qui lui sont reprochés, il peut bénéficier de la perpétuité au lieu de la peine de mort, d’un emprisonnement de trente ans au lieu de la perpétuité et de vingt ans de prison au lieu de trente, et ainsi de suite », a expliqué Abdeslam Bouhouch, de la Direction des affaires pénales lors de la conférence précitée.
Selon la même source, l’arsenal juridique sera également renforcé par de nouveaux textes, notamment la criminalisation du non-respect du droit à l’image et de la publication par la presse de propos tenus dans un cadre privé.
Vaste opération de dépoussiérage
Si ces propositions filtrent encore au compte-gouttes et ne sont pas officielles, elles indiquent néanmoins la tendance vers laquelle se dirige la commission. Il s’agira d’une vaste opération de dépoussiérage, bien loin des quelques ajouts et amendements effectués sur le texte en 2004, au gré de l’adoption par le Maroc de la loi antiterroriste voulue par l’administration Bush (les textes sur la lutte contre le terrorisme, ceux régissant l’entrée et l’établissement des étrangers, l’immigration illicite, la protection des systèmes informatiques).
Reste à savoir quelle sera la méthode adoptée par le ministère de la Justice dans cette phase de préparation, des juristes lui reprochant d’ores et déjà de maintenir le secret sur les travaux en cours.
Zakaria Choukrallah |