Le championnat amateur, la Botola 2009-2010, a tenu en haleine les fans du ballon rond jusqu’au bout. Les limites de l’arbitrage, la gestion hasardeuse des clubs ou la valse des entraîneurs ont gâché bien des spectacles. Mais le championnat est sur les rails. Bilan.
Le suspense aura duré jusqu’au bout, mais c’est finalement le Wydad de Casablanca qui est sorti grand vainqueur de la saison 2009-2010 de la Botola. Il lui aura fallu pour cela vaincre le Fath de Rabat à domicile lors de la 30e et toute dernière journée (1-0), mais aussi attendre une défaite du Raja à Rabat devant les FAR sur le même score. Tout comme il a fallu que l’autre prétendant, le Difaâ d’El Jadida accuse un match nul (1-1) devant l’Ittihad Zemmouri. Quoi qu’il en soit, les Rouges ont enfin pu renouer avec la victoire, quatre ans après le dernier championnat remporté, et glaner ainsi leur 12e titre. La joie observée dans tout Casablanca samedi 15 mai renseigne non seulement sur le soulagement des centaines de milliers de supporters du club, mais aussi sur la popularité retrouvée d’une Botola mal-aimée depuis de nombreuses années. Le fait marquant de la « finale » du championnat de cette année reste le retour du spectacle. « Il est évident que cette saison a également été plus réussie que ses précédentes, du point de vue technique et de la qualité du jeu », constate l’universitaire et chercheur en sport Moncef El Yazghi.
Au total, 480 buts ont été marqués en 240 matchs, soit une moyenne de 2 buts par rencontre. « Nous sommes loin des scores européens puisque le champion n’a cumulé que 54 points sur les 90 possibles. Cette saison a été celle des matchs nuls par excellence. La preuve en est qu’un club donné pouvait se permettre trois défaites consécutives et garder son classement », nuance Najib Salmi, analyste et chroniqueur sportif tout en partageant le même constat. Le championnat de cette année n’a pas échappé aux critiques les plus acerbes. Des techniciens comme Abdelkhalek Louzani, ancien sélectionneur national, ou encore M’Hamed Fakhir, pointent du doigt non seulement le peu de buts marqués, mais aussi les changements records d’entraîneur enregistrés cette année. Chaque équipe a opéré au moins deux changements de coach, avec un record de quatre fois pour l’Olympique de Safi. Pour se défendre, Rachid Ouali Alami, membre fédéral en charge de la commission provisoire de gestion de la Botola lance un défi. « Tout n’est certes pas parfait, mais qu’on remonte le temps et qu’on me dise quand est-ce qu’on a assisté à un championnat aussi plaisant, avec autant de public dans les gradins et devant les écrans de télévision », dit-il (voir interview page 46). Autre membre fédéral, Karim Alem veut également y croire : « Même classé 12e, le FUS figure parmi les quart de finalistes à la Ligue africaine. Cela en dit long sur le saut qualitatif marqué par notre championnat. »
Retransmission en direct
Côté positif, on retiendra la manière dont la programmation des matchs a été menée. Cela a commencé avec un tirage au sort des rencontres qui, en gage de transparence, a été diffusé en direct à la télévision. Les dates, tant du démarrage que de la clôture du championnat, ont été respectées. La prouesse est à mettre à l’actif d’un certain Ahmed El Ghaïbi, président de la commission de l’arbitrage et de la programmation au sein de la FRMF. Evénement sans précédent dans ce sens, la retransmission intégrale et en direct par la SNRT de toutes les rencontres du championnat. « Cela a non seulement ressuscité l’intérêt des téléspectateurs mais a effacé les craintes que la télé puisse tuer l’affluence aux stades puisque c’est exactement le contraire qui s’est produit », dit Karim Alem. Même son de cloche auprès de Najib Salmi. « Si le jeu a été amélioré, c’est parce que tous les matchs étaient retransmis », remarque-t-il. On retiendra aussi le climat de transparence qui a régné lors des matchs décisifs. D’aucuns savent que dans le passé, certaines rencontres étaient gagnées, ou perdues, d’avance.
Mais l’arbitrage continue de susciter l’ire de nombreux clubs. « Il est clair que le problème est bien là . Mais nous avons assisté à de nombreuses victoires à l’extérieur, ce qui prouve que les arbitres sont nettement plus à l’aise. La rediffusion par la télévision de tous les matchs a également participé à la moralisation des
rencontres car les arbitres se sentaient protégés, mais aussi surveillés », dit Alem. Le jeu s’installe comme étant le seul critère de réussite. D’où les investissements records de certains clubs en matière de recrutement. Des budgets comme les 41 millions de dirhams dont a disposé le Raja de Casablanca cette saison sont devenus la règle. Les clubs évoluent, mais pas forcément leurs modes de management. Pour cela, il faut attendre le projet de professionnalisation du championnat (voir encadré).
Tariq Qattab
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Professionnalisme : peut-on y croire ?
« Nous avons assisté à une fin en beauté du championnat amateur. Mais tout l’enjeu aujourd’hui est de gagner le pari de la transition vers le professionnalisme. » C’est ainsi que résume Moncef El Yazghi le passage à négocier dès la prochaine saison vers un championnat professionnel. Si des clubs y sont préparés, d’autres sont loin du compte. Ayant retrouvé le groupe d’élite cette même saison, la Jeunesse Kasbat Tadla manque par exemple de tout, y compris d’un stade pour abriter ses matchs. « Ce n’est pas gagné. En plus de l’année de transition 2010-2011, une période de flottement de 3 ans nous attend », commente notre analyste.
Pour se préparer, la fédération a mis en place un code délimitant les responsabilités des intervenants et des sanctions en cas d’infraction. Et le cahier des charges relatif à la ligue professionnelle est en voie de finalisation. « Nous mettons en place les règles vers lesquelles les clubs doivent converger, en termes d’infrastructures, de gestion contractuelle des joueurs, de formation des techniciens, de budget minimum et de forme juridique des clubs qui deviendront des sociétés à but sportif avec des actionnaires, et non pas des adhérents comme décideurs », explique Alem. Passé la transition, les clubs qui ne s’y conforment pas seront automatiquement rétrogradés. Amen.  |
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