C’est vrai, ils ont été nuls, consternants, incapables de construire, inaptes à défendre et impuissants à conclure. Et pourtant, il s’en est aussi fallu de peu pour que la chance change de camp...
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Mais la baraka n’était pas marocaine cette année. Alors on brûle ce qu’on a tant adoré. L’orgasme collectif que le pays s’est offert après le carton du 4 juin contre l’Algérie a cédé la place à une colère et à une aigreur sans commune mesure avec les enjeux... de ce qui devrait rester un jeu. Mais nous n’en sommes plus très sûrs après l’agression d’un Gabonais à Marrakech et la tuerie de Port-Saïd.
Comme dans le reste du monde, nous sommes malades du foot, mauvais perdants et piètres supporters. Notre versatilité est-elle si justifiée? Gerets et les siens méritent-ils toutes ces injures après avoir récolté tant de louanges? Certes le ressentiment de tout un peuple se mesure à l’aune de ses illusions perdues. Mais ce n’est après tout que la sixième fois que le Maroc chute au premier tour.
Avant de désespérer du présent, il faut voir d’où l’on vient. C’était le 28 mars 2009. C’était déjà le Gabon. Mais c’était ici. Au stade Mohammed V, devant 60 000 supporters tétanisés, les Lions de l’Atlas mordaient la poussière face aux Panthères gabonaises. Défaits 2 à 1, les Marocains commençaient une pitoyable phase de qualification qui débouchera sur une élimination de la CAN et de la Coupe du monde 2010.
Trois ans plus tard, nous avons déjà franchi un échelon. On ne construit pas une dream team en une campagne. Et plutôt que de tirer sur une ambulance, il faut donner une chance à cette équipe convalescente. En attendant, l’entraîneur assume courageusement la déconfiture gabonaise et fait face à ses détracteurs. On aimerait maintenant que la fédération en fasse autant et cesse cette politique de l’autruche au moindre revers. Ce sport a besoin d’être professionnalisé au Maroc ; or la professionnalisation passe aussi par la communication et un minimum de transparence.
Certes, Gerets a beaucoup péché par orgueil en nous faisant miroiter la lune. Et nous avons été bien naïfs de le croire. Maintenant que le premier échec est passé, laissons le temps à cette équipe de digérer ses défaites et d’en tirer les enseignements.
L’heure des comptes doit sonner dans deux ans. Pas avant. Sinon, tous ces investissements auront été menés en pure perte. Ce n’est pas en changeant de coach à chaque revers que nous améliorerons notre rang. Ce zapping des coachs est celui d’une époque. Des équipes de légende ont été forgées par des entraîneurs qui avaient bien mal commencé. La France de Platini est aussi celle de Michel Hidalgo : éliminée au premier tour de la Coupe du Monde en 1978. Même pas qualifiée au championnat d’Europe en 1980. Qualifiée au dernier match pour la Coupe du monde 1982. Suivront deux demi-finales de Coupe du monde et la victoire au championnat d’Europe 84.
Et chez nous, les Lions de l’Atlas ne s’étaient pas qualifiés pour la CAN en 1984. Mais c’est bien la même équipe qui a passé le premier tour d’une Coupe du monde deux ans plus tard... Certes entre-temps, l’entraîneur brésilien José Mehdi Faria s’était converti à l’islam. Nous n’en demandons pas tant à Gerets. Juste un retour sur investissement. Dans deux ans. |