Le référendum qui aura à trancher sur la seule Constitution que désirent les Marocains a été fixé à fin juin. Il devrait être immédiatement suivi d’élections anticipées, dès lors que Abbas El Fassi a annoncé qu’il ne conduirait pas un gouvernement en porte-à -faux avec la nouvelle Constitution.
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Pour verrouiller définitivement toute possibilité - même infime - de tripatouillage des urnes, le roi a donné sa bénédiction au projet de loi portant sur le traitement informatique des listes électorales.
Ce qui évitera assurément que les morts continuent de voter. Et les professionnels des urnes, ceux qui attendent le retour sur investissement de l’argent consacré à acheter des voix, ont d’ores et déjà annoncé leur désir de… ne pas se présenter. Non pas par honnêteté subite, mais par peur.
Peur de la rue, peur de devoir affronter la justice, à l’instar d’autres édiles récemment incarcérés. Ainsi le Maroc devrait connaître les premières élections totalement transparentes de son histoire.
Les vingtfévrieristes en tireront-ils profit ? Rien n’est moins sûr. Jusqu’à présent, l’inquiétude de la rue, qui cherche toujours un nouvel exutoire, n’est pas sans vertu. La multiplication des manifestations, l’apparition de blogs très contestataires, le flot de suggestions en tout genre, paraissent comme autant de bouteilles jetées à la mer...
Le Maroc, comme ses voisins, vit une crise de la démocratie représentative, qui illustre plus particulièrement, ici, la crise du politique, expression du désenchantement des citoyens.
On attend de tous ces jeunes, volontiers rétifs à serrer la main des caciques, qu’ils cessent de se défausser sur « les sortants » pour prendre les responsabilités qu’ils revendiquent, en affrontant eux-mêmes - eux ou leurs leaders - la loi des urnes.
Ils nous rendraient, par la même occasion, un immense service en conjurant la désaffection civique. L’abstention est éminemment dangereuse, car elle laisse le pouvoir à ceux qui vont aux urnes pour choisir à la place de ceux qui boudent le scrutin.
N’est-ce pas le moment pour les nouvelles générations de s’engager réellement dans la vie publique ? En présentant des candidats, en élaborant un véritable programme politique, fruit des débats qui traversent une jeunesse que l’on croyait hautement allergique au politique et qui a, ces derniers temps, prouvé tout le contraire.
Ce goût pour le « dégage ! » et le « non » tous azimuts, ce refus des conventions, cette volonté forcenée de passer par l’ostentation au lieu de la concertation, ne sont pas sans danger.
Les exemples égyptien, et surtout tunisien, sont là pour nous rappeler que l’on ne s’attaque pas aussi aisément à des crises structurelles. L’élan salvateur de la rue ne doit pas perdre son rôle de médiateur et d’aiguillon.
Les nouvelles aspirations exprimées et débattues au sein de la société, dans toutes les tranches d’âge et au cœur de toutes les couches sociales, depuis plus de trois mois, et qui ont inspiré les réformes en cours, méritent de trouver un juste écho à l’heure des scrutins. La volonté politique de l’opinion doit l’emporter sur le formalisme institutionnel.
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