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Manque d’audace 
actuel n°164/165, jeudi 18 octobre 2012
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Ceux qui s’attendaient à un projet de loi de Finances de « rupture » risquent d’être déçus. Certes, il est encore prématuré de se prononcer avec certitude sur les grandes dispositions qu’a introduites l’équipe Benkirane. Le projet de texte n’étant toujours pas disponible sur le site du Secrétariat général du gouvernement. Mais ce que l’on en sait, 48 heures après son approbation en Conseil du gouvernement, ne prête guère à l’optimisme.


Et le fait qu’il ne soit toujours pas diffusé au grand jour ajoute à la suspicion. Pourtant, le projet a été remis au souverain le 5 octobre et discuté en Conseil de gouvernement le 15 octobre. Il va donc falloir patienter jusqu’aux débats parlementaires. Est-ce là une simple négligence liée aux défaillances du e-gouvernement ou y a-t-il plus sûrement matière à inquiétude ? La question mérite d’être posée car elle taraude bon nombre d’opérateurs, d’experts comptables et autres conseillers fiscaux. Et plus directement encore de très nombreux contribuables, qui s’interrogent : « A quelle sauce va-t-on être mangé ? » Telle est la grande préoccupation de l’heure, à la veille de l’Aïd el Kebir alors que les prix à la consommation s’envolent et que le pouvoir d’achat s’amenuise.

Au vu de ce que laisse transparaître ce projet de loi de Finances 2013, les choix opérés relèvent davantage du bricolage de dernière heure. Nous sommes à des années-lumière d’un projet porteur de croissance et créateur d’emplois, les deux urgences auxquelles le gouvernement devrait trouver, sans attendre, des réponses concrètes. Annoncer un taux de croissance de 4,5% et un déficit budgétaire de 4,8% est certes louable et pétri, sur le papier, de bonnes intentions, encore faut-il conforter ces objectifs par un plan d’actions adéquat, réaliste et réalisable dans les temps.

Or, pour l’heure, il est davantage question d’une myriade de mesurettes sans réelle cohérence entre elles, dont l’annonce disparate sème une totale confusion parmi les contribuables et trahit l’absence de vision stratégique du gouvernement. Rétablir la progressivité de l’impôt sur le revenu est en revanche bienvenu, puisque celle-ci permettra d’améliorer la contribution fiscale des hauts revenus. Le gouvernement Benkirane reconnaît au passage implicitement que la contribution fiscale des plus riches est insuffisante puisque depuis quatre ans, la baisse du taux d’imposition n’a induit aucun résultat tangible sur le plan économique. Il était donc temps de rectifier le tir. Pour autant, le gouvernement préfère tergiverser en proposant des taux de prélèvement de 3% par ci, de 5% par là, au lieu d’assumer ses responsabilités, en réaménageant le barème actuel et en instituant, avec conviction, un impôt sur la fortune. Une telle mesure coup de poing aurait marqué les esprits, envoyé un signal clair aux contribuables et esquissé un avant-goût de la réforme fiscale à venir, attendue lors des Assises de la fiscalité en février 2013. Or là, il n’en est rien. La « rupture » attendue a laissé place à une batterie de mesures sans cohérence, applicables sur une durée limitée à trois ans et dont l’impact sur les finances publiques s’annonce dérisoire. C’est bien là le plus inquiétant. Au final, beaucoup de bruit, et nombre de mécontents – du monde de l’entreprise aux particuliers – pour un budget en trompe-l’œil.

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