Nabil Sebti est marocain, mais c’est en France qu’il s’est fait connaître sur les plateaux TV en tant que critique impitoyable de la très controversée circulaire Guéant.
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Téléphone collé à l’oreille, silhouette imposante et poignée de main énergique, il n’y a que la tenue endimanchée qui contraste dans ce tableau digne d’une rencontre au sommet. Même la réplique s’y prête : « Je vais devoir enchaîner deux autres rendez-vous dans une heure », s’excuse faussement Nabil Sebti. Un emploi du temps plutôt chargé pour un jeune de 25 ans.
Cela fait à peine trois mois que Nabil Sebti, fraîchement diplômé de HEC Paris, est rentré au bercail, et le voilà déjà lancé sur trois projets. Il est comme ça Nabil, il roule à vitesse grand V. A Paris, il s’occupait déjà de sa start-up, son cabinet de conseil et les deux entreprises qu’il avait créées avant même l’obtention de son diplôme.
Ses déboires ont commencé avec la fameuse circulaire cosignée Claude Guéant, ministre français de l’Intérieur, et Xavier Bertrand, ministre du Travail, censée combattre l’immigration professionnelle. En clair, toute demande de changement de statut pour le passage d’étudiant à salarié est presque systématiquement refusée. Un refus qui rend impossible une première expérience professionnelle en France. Du jour au lendemain, Nabil se retrouve dans une parfaite illégalité, sans autorisation de travail ni de séjour. « Se priver des têtes pensantes, quand bien même elles seraient étrangères, c’est priver la France d’un réel dynamisme macro-économique », s’indigne le jeune homme. Et d’ajouter, chiffres à l’appui : « De ce que j’ai vu, on prend les Français pour des cons en leur faisant croire qu’on peut régler les problèmes de 2,5 de millions de chômeurs en récupérant 6 000 emplois ! » Quatre mois plus tard, l’étau se resserre sur Nabil et ses compatriotes. Ils sont alors plusieurs centaines d’étudiants à former le « Collectif du 31 mai », bien résolus à clamer leur indignation. L’objectif du Collectif est de sensibiliser, voire choquer l’opinion publique : « Il fallait jouer sur les sentiments, l’émotion. Et la meilleure façon d’y parvenir était de dire "je suis polytechnicien, diplômé de telle ou telle grande école, et malgré cela je suis clandestin". »
Le porte-parole du Collectif
«DiplĂ´mĂ© de HEC et clandestin », ça sonne bien. Le collectif a trouvĂ© son porte-parole. Nabil fait ainsi le tour de tous les plateaux TV, intervenant mĂŞme pour le New York Times et El PaĂs. Cependant, dans toutes ses interventions, il Ă©vite de se mettre Ă dos GuĂ©ant ou mĂŞme l’UMP. Ce qui lui vaut d’être reçu Ă l’ElysĂ©e. La circulaire ne sera pas annulĂ©e, mais le garçon, qui a au moins eu le mĂ©rite de mĂ©diatiser la condition de ces Ă©tudiants, n’a pas attendu longtemps avant d’apprendre que son dossier Ă©tait en cours de rĂ©gularisation. Pourtant, par fiertĂ©, il choisit de prendre le premier vol vers Casablanca, pour commencer une nouvelle vie. Home sweet home, dit l’adage.
«Je parle trop n’est-ce pas ? Je sais... j’adore parler, j’adore échanger. » Nabil aura eu l’occasion de tester son talent d’orateur lors des nombreuses conférences auxquelles il a été convié. La vidéo de son passage au TEDx ISCAE par exemple a été amplement visionnée, dépassant rapidement le seuil des 4 300 visites sur YouTube.
Autres caractéristiques de Nabil : il est audacieux et a une énorme confiance en lui . « Je m’octroie le droit de rêver et d’essayer. Si je me casse la gueule, j’aurai au moins essayé. »
Sollicité par plusieurs entreprises, il préfère monter sa propre affaire, « Blooming Box ». Entre autres projets de Nabil Sebti, un magazine de beauté « révolutionnaire » qui sera mis en ligne dans quelques jours. La personne qui l’inspire le plus ? Un businessman comme Miloud Chaâbi en plus jeune.
Avec l’audace qu’on lui connaît, et le talent en prime, il se dit prêt à prendre la relève. C’est tout le mal qu’on lui souhaite !
Ranya Sossey Alaoui |