Du journalisme à l’événementiel sportif, Mehdi Sekkouri a déjà derrière lui une carrière bien remplie.
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Il se souvient avec nostalgie de ses années de « journalisme ». Une carrière démarrée sur les chapeaux de roue après un cursus brillant en études de communication à Montréal et à Aix-en-Provence. Son premier test de passage, il l’effectue à TelQuel en 2005 où il exerce comme journaliste avant d’être promu rédacteur en chef. « J’ai vécu de très belles choses durant cette période, beaucoup d’émotions couronnées notamment de plusieurs distinctions dont le Prix RSF 2007 et le Prix Lorenzo Natali 2008. » Il regrette un peu ces temps héroïques mais pas trop : « Il faut un temps pour tout. Quand on sent qu’on évolue peu ou prou dans un métier, il faut avoir le courage de décrocher, de penser que le meilleur est devant. » A 35 ans et un moral d’acier, il a cette façon de surfer sur l’air du temps avec juste la dose d’avance qu’il faut pour réussir dans les affaires. Pour cela, il se sert de deux casquettes, l’organisation d’événements sportifs et son expertise de spécialiste en gestion des stades. Un libéralisme teinté de passion, en somme. Qu’est-ce qui fait courir Sekkouri aujourd’hui ? L’argent ? Peut-être. Pas seulement. Des convictions politiques ? Si on considère que le sport est affaire de politique, pourquoi pas ? Sur la table basse de son appartement casablancais s’empilent de beaux livres où le sport est roi. Délivré de ce passé riche en émotions, il répète ad nauseam qu’il suffirait de peu pour que ce pays décolle. Son truc à lui, c’est le sport comme levier de développement. Une passion pour le foot en particulier et le sport en général, mais c’est plutôt côté jardin, là où se joue l’avenir des équipes, le management des stades et la cuisine interne des politiques sportives. Emotion, irritation, séduction, il suffit de le provoquer pour qu’il vous entraîne dans un tourbillon de thèses où s’entremêlent considérations tactiques ou esthétiques, référents politiques et enjeux de l’heure.
On est souvent surpris par ses sorties à rebrousse-poil campées sur des convictions solidement charpentées. Ce garçon, promu à une carrière prometteuse au sein de la Sonarges en 2009 ; a claqué la porte en balançant droit dans les yeux au patron qu’il n’était pas d’accord avec une gestion éculée qui ne rapportait rien à la cause du sport. Il explique tout bonnement qu’il est parti parce que « ceux qui géraient la Sonarges prenaient des décisions au quotidien en fonction des retombées qu’elles ont ou qu’elles pourraient avoir sur leur carrière, plutôt que de redoubler d’efforts pour réussir la mission qui leur avait été confiée ».
Une fois libre de ses mouvements, il se lance dans une formation pointue sur la gestion des enceintes sportives. Le diplôme de Stadium Manager, obtenu au Centre de droit et d’économie du sport de Limoges (CDES), lui permet de fréquenter le même campus que Zinedine Zidane. A l’issue de cette formation, Sekkouri qui devient le premier expert marocain de gestion moderne des stades enrage de voir tant de gâchis dans ce secteur. « Il est aberrant de construire des stades à plus d’un milliard de dirhams pour y abriter un match de football une à deux fois par mois. En Europe, le sportif ne représente que 20% du chiffre d’affaires d’un stade. Le reste provient des concerts, salons, séminaires, congrès, etc. chez nous c’est l’inverse, c’est un gâchis énorme. » Où sont passés les vœux pieux de faire de ces stades des lieux de vie, offrant des prestations de qualité, que ce soit pour le grand public ou les entreprises ?
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Son rĂŞve
Le beau garçon à la barbe naissante et au sourire indécrochable aime plutôt la musique des seventies, affiche une belle joie de vivre, et se passionne vite pour le débat quand il est sur la même longueur d’onde que son interlocuteur. « En Europe, l’Etat ne construit plus de stades. Il fait appel à des partenariats public-privé pour financer ce type d’infrastructures. Des Btpistes comme Bouygues, Vinci… qui construisent à leurs frais les stades. En contrepartie, ils le prennent en concession pendant une vingtaine d’années. Dans le cas du grand stade de Casa, on pourrait faire de même, cela ferait économiser ainsi 3 ou 4 milliards de dirhams. » Il imagine « faire du complexe Mohammed V le poumon sportif et culturel de Casablanca, voilà le rêve. J’aimerais bien que les Casablancais s’approprient ce patrimoine. Avec des aménagements intelligents, on pourrait disposer d’un resto panoramique ouvert toute la semaine, une crèche pour les gamins du quartier, une galerie d’art, une salle de fitness, etc. Il faut profiter de l’organisation de la CAN 2015 au Maroc pour apporter ces aménagements. Comme le futur grand stade de Casablanca ne sera jamais livré à temps et que la ville sera obligée de remettre à niveau le complexe, il ne faut pas se contenter comme d’habitude de changer les sièges et de donner un petit coup de peinture ». En attendant, Mehdi a juste le temps de mettre les dernières retouches à un festival international des sports extrêmes.
Abdellatif El Azizi |