Il est encore là le vieux ! » Qu’on se le dise, Vigon n’a perdu ni sa voix ni son humour. C’était le 1er mars, lors de l’inauguration du Pavillon bleu – un nouveau lieu de réception à Tahiti Beach – sur la corniche de Casa. Le crooner marocain enchantait un public de nostalgiques qui l’avaient connu à Agadir il y a quelques années. Les moins de 30 ans découvraient de leur côté cet inoxydable chanteur, capable de passer des vocalises de James Brown aux tremolos de Barry White. Deux jours plus tard, des millions de Français faisaient à leur tour connaissance avec Vigon qui se qualifiait pour la nouvelle émission « The Voice » sur TF1.
Quel destin pour Abdelghafour Mohcine, un Rbati de 67 ans qui a chanté avec les plus grands depuis les sixties et qui continue de nous enchanter en dépit de la tragédie qui l’a frappé l’année dernière...
The voice
J’y participe pour ma fille qui nous a quittés le 14 août dernier. C’est elle qui devait y aller. C’est très dur. Pendant le tournage, j’ai pleuré tout le temps...
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L’envie de chanter
C’est dans les bases américaines de Sidi Slimane, de Kénitra ou de Nouaceur que j’ai découvert Ray Charles, Little Richard, Sam Cook... Mon vrai métier, c’était marchand de légumes avec mon père à Rabat ! Mais vendre des tomates, ce n’était quand même pas très excitant. C’était juste pour chauffer la gamelle ! Tandis que chanter, c’était pour le plaisir. Mais je n’aurais jamais imaginé gagner ma vie en chantant. Mes copains me disaient que j’avais une belle voix, mais j’avais du mal à les croire tant que je ne gagnais pas un dirham.
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Mes premiers cachets
C’étaient des clopinettes ! Je chantais dans les bases américaines. J’avais appris les paroles phonétiquement et ils n’y voyaient que du feu.
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Les chanteurs que je préfère interpréter
Ray Charles, car il a une voix suave et prenante. Little Richard pour sa voix qui pète ! Je lui ai rendu un hommage cette année à Disney (NDLR : tapez Vigon + Disney sur Google et écoutez. C’est vraiment the voice du petit Richard).
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Mon destin
Quand je dormais sur ma peau de mouton dans la médina de Rabat, je n’aurais jamais imaginé qu’un jour j’allais faire des tournées avec Otis Redding, Chuck Berry, Aretha Franklin, Stevie Wonder... et j’en oublie. En ce moment je suis en train de rêver. Je vous en prie, ne me réveillez pas. Et on m’appelle pour « The Voice » ! Tout est bonus pour moi maintenant.
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Johnny
Il est venu me voir à l’Olympia quand je faisais la première partie des Stones. On est devenu amis et j’ai fait la première partie de sa tournée Johnny Circus en 1972. Je le revois souvent. Même son fils que j’ai connu dans le ventre de sa mère, je le revois souvent.
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Michel Jonasz
Je l’avais dans mon orchestre « Les Lemons » en France. Je le poussais à chanter et il refusais. Il a fait du chemin depuis. Maintenant, on fait une tournée ensemble qui s’appelle « les rois de la soul ». On a fait deux jours à l’Olympia et des dates en Belgique.
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Agadir
C’est fini depuis 2000 car les enfants ont grandi. C’était une belle aventure, le Tan Tan Club. J’étais venu pour deux semaines, je suis resté 23 ans ! Je rencontre des gens dans le monde entier qui me parlent encore d’Agadir.
La chanson qui me transporte le plus
Celle que j’ai chantée à la fin de ce show : I’ve got a woman de Ray Charles.
Propos recueillis par Eric Le Braz |