Pendant la torpeur estivale, elle fut l’une des rares personnalités politiques à faire l’actualité en proposant d’introduire des quotas de 50 % de femmes lors des prochaines élections législatives. Pour la ministre du Développement social, de la Famille et de la Solidarité, « le ramadan, c’est le bon moment pour proposer ce genre de mesures, avant la rentrée parlementaire. Après le train législatif sera parti et on ne s’occupera plus des femmes ». Nouzha Skalli, elle, s’en occupe toujours. Rencontre avec la plus féministe des ministres.
MON MENTOR
Ce que j’ai constaté dans ma plus tendre enfance, c’est que les femmes manquaient de modèles au Maroc. Une femme en laquelle je me retrouve beaucoup, c’est Gisèle Halimi en France. J’ai toujours fait de la participation politique féminine mon cheval de bataille car j’ai toujours pensé qu’il y aurait un effet de levier sur les autres problématiques des femmes : la pauvreté, l’exclusion, la marginalisation, etc. Pour lutter contre ces fléaux, il faut passer par le renforcement des capacités des femmes et par leur prise de pouvoir. Quand les femmes sont en forte proportion dans les instances de décision, adopter des lois en cohérence avec leurs attentes coule de source. Et la seule personnalité politique qui soit pour moi un modèle dans ce domaine, c’est Gisèle Halimi qui a mené la bataille pour la parité en France.
MON ARTISTE
Narjiss Nejjar est une femme que j’admire beaucoup. Elle a réalisé des films extraordinaires comme Les yeux secs qui m’avait vraiment impressionnée.
MON MEILLEUR SOUVENIR DE CAMPAGNE
Lors de ma première campagne, des petites filles venaient me prendre la main, elles étaient contentes d’être avec moi. Et quand je leur demandais ce qu’elles voulaient faire plus tard, elles me répondaient : « La même chose que toi ! » Les femmes ont besoin qu’on leur construise des images qui les aident à se projeter. C’était en 1977 et j’étais la seule femme qui se présentait aux législatives à Casablanca. A cette époque, le simple fait d’être femme candidate faisait pousser de hauts cris, les gens partaient en courant et criaient : « Regardez, c’est une femme ! »
MON HEROĂŹNE
J’ai en mémoire le geste historique de la princesse Lalla Aïcha. Elle avait enlevé son voile et prononcé un discours célèbre en 1947 à Tanger dans lequel elle appelait les femmes à fréquenter l’école et à participer à la vie économique. C’est une femme emblématique qui représente, pour la mémoire des Marocains, le symbole de la libération des femmes. J’ai une belle photo d’elle dans mon bureau. Je voudrais la montrer à toutes ces jeunes femmes qui pensent qu’en mettant le foulard, on conforte son identité musulmane.
LE PLUS BEAU JOUR DE MA VIE
Le 10 octobre 2003, l’annonce par Sa Majesté le roi du nouveau code de la famille. Pendant ce discours, je me disais : « Est-ce que je rêve ou est-ce que je suis éveillée ? »
L’HOMME DE MA VIE
C’est tout simplement mon mari. C’est d’abord un grand homme de cœur et d’ouverture. Nous sommes mariés depuis trente ans et c’est le seul homme de ma vie. Je l’adore.
Propos recueillis par Eric Le Braz |