Ecrivain (prolifique), Daniel Picouly est l’auteur du Champ de personne et d’une trentaine d’autres ouvrages. Animateur télé (talentueux), il présente aujourd’hui Café Picouly sur France 5. En attendant de tourner un spécial Maroc à Tanger à la rentrée, il a passé quelques jours à Rabat pour présider le prix Grand Atlas remis vendredi 25 juin à Mohamed Loakira pour l’Inavouable (éd. Marsane). L’occasion pour lui de découvrir une littérature marocaine très diverse : « Jusqu’au collage poétique, jusqu’à des ouvrages très construits, ou au contraire totalement expérimentaux. Je ne connaissais que Benjelloun et BineBine, j’ai découvert des livres d’une très grande maîtrise technique et stylistique. » Et maintenant que c’est dit, parlons de lui.
MES MENTORS
L’éditrice Françoise Verny et l’écrivain Daniel Pennac. C’est elle qui m’a fait écrire et c’est lui qui m’a fait connaître.
MON MAROC
Ce qui me surprend, m’émeut et m’amuse, c’est qu’on me prend toujours pour un Marocain. Et on m’engueule, moi le métis morvandiau-martiniquais, parce qu’on croit que je ne veux pas parler arabe ! En France, on ne me prenait pas précisément pour un Marocain, du côté des forces de l’ordre, j’avais juste une gueule d’arabe et on me contrôlait tout le temps. Mais, depuis que je passe à la télé, les flics me serrent la main.
MON LIVRE
L’enfant au fennec. C’est l’histoire d’un enfant qui recueille un petit fennec qui risque de mourir de froid en France. J’avais dix ans et je me suis très vite identifié à ce petit garçon, métis comme moi. Il s’appelait Jean-Marie ce gamin. Et il comprenait à la fin que pour que le fennec vive, il devait s’en séparer. C’est un enseignement que j’ai retenu toute ma vie. Il faut se séparer des choses qu’on aime pour qu’elles puissent vivre…
MES COUPS DE COEUR
Ce que je préfère dans ce métier, c’est de découvrir un nouvel auteur comme lorsque j’ai fait l’un des premiers articles sur Anna Gavalda dans le Journal du Dimanche. Il n’y a rien de plus exaltant que de découvrir un premier roman. Là , on a vraiment le sentiment qu’on sert à quelque chose.
MA DEVISE
C’est une phrase que j’utilise depuis que je suis petit. Je courais et je criais « Daniel Picouly, l’homme le plus rapide du monde ! » C’est une sorte de grigri, une phrase qui renverse toute humeur chagrine.
MON ÉMISSION
C’était dans les années 60 en France. Je regardais « Lecture pour tous », la grande émission littéraire de l’époque. Je ne comprenais pas tout, mais peu importe. L’émission m’emmenait depuis mon F5 d’Orly vers le monde de la littérature et de la culture. Elle ne me parlait pas de ce que j’étais mais de ce que je deviendrais. Je n’aime pas les médias qui descendent au niveau de leur interlocuteur. C’est une règle. Quand j’écris, je m’interdis les grossièretés, les vulgarités. En télé, c’est pareil. Si on m’avait vu dans la banlieue, on m’aurait parlé comme à un petit sauvage. Mais à la télévision française de l’époque, on diffusait Les Perses d’Eschyle en noir et blanc et en prime time ! Et ça nous plaisait. On en parlait le soir entre potes…
Propos recueillis par Eric Le Braz |