Lorsqu’on l’interroge sur Si je t’emmène, la chanson qu’il a composée pour Anggun, il répond : « C’était il y a trois, quatre ans, histoire d’avoir un peu de fric. » Stromae, verlan de maestro, n’est pas qu’un artiste anticonformiste qui a fait danser toute la terre sur son Alors on danse. Paul Van Haver, de son vrai nom, est aussi un humoriste découvert par Jamel Debbouze. Son physique très singulier (il est belgo-rwandais) et son air désinvolte font de lui un gamin qui réalise à peine qu’il participe à un festival dans un pays où l’humour est presque élevé au rang de science exacte. Le Bruxellois nous confie qu’il est en train de négocier l’un des plus grands virages de sa vie : il vient de quitter définitivement le bercail pour emménager seul.
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Mon enfance en décibels
Ma mère était complètement amoureuse de la musique. Aucun moment de la journée n’était dénué de son. Je ne concevais même pas qu’il puisse y avoir des pauses. C’est peut-être typiquement africain, mais ma mère, bien qu’elle soit belge, flamande de surcroît, doit à mon avis être noire à l’intérieur. A mon frère (qui a choisi la photo comme métier) et moi, elle a inculqué l’amour des voyages. Voyager à travers la musique, c’est ce qu’on faisait tous les jours. La rumba congolaise a bercé mon enfance. Cesaria Evora, la salsa… J’écoutais beaucoup ces musiques même lorsque j’étais dans ma période rap.
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Mes débuts mitigés
Je suis passé par un conservatoire de musique. C’est à ce moment-là que j’ai commencé à écrire mes textes. C’était l’époque rap, puis j’ai réalisé que je pouvais faire autre chose que cela. J’ai donc tenté le cinéma en m’inscrivant dans une école. A 21 ans, j’ai découvert que je « kiffais » l’image et que ce n’était pas forcément le son qui m’intéressait. Ce n’est pas pour autant que j’ai arrêté de faire de la musique. C’est donc grâce aux connaissances acquises en école de cinéma que j’ai pu réaliser des clips. J’en ai fait pour moi-même en travaillant avec d’autres réalisateurs. Ça m’enchantait de maîtriser l’art du montage, l’ingénierie du son.
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Jamel et moi
J’ai connu Jamel Debbouze via mon directeur artistique. Ce dernier avait eu l’idée de nous faire bosser ensemble. A l’époque, Jamel répétait pour le spectacle de cette édition du Marrakech du Rire. Il est venu me voir à Bruxelles. On m’avait préalablement expliqué un peu ce qu’il attendait de moi. Nous nous sommes ensuite revus au studio d’enregistrement à Paris. Je ne suis pas humoriste mais il m’a tout de suite mis à l’aise. C’est toujours flatteur parce qu’un artiste a besoin d’être reconnu et, en Belgique, nous avons du mal à avoir le soutien des nôtres. C’est particulier à ce pays. Après quoi, les choses se sont faites naturellement avec Jamel. Lorsque j’ai vu qu’il appréciait mon style, c’est comme s’il m’avait décerné un diplôme.
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Le MDR
J’y participe grâce à l’invitation de Jamel. Je ne suis pas un grand comédien. Je suis chargé de reprendre un peu sur scène le clip qu’on avait fait Jamel et moi. Je n’ai pas la prétention de présenter autre chose que mon album.
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Alors on re-danse ?
Le plus difficile a été les deux années de promotion de ce single même si elles ont été réjouissantes. Aujourd’hui, il est temps de me lancer dans un nouveau challenge : reprendre la composition. C’est mon vrai métier. Le risque d’un grand succès, c’est l’après. Car, autant ça vous révèle, autant c’est difficile de revenir et de convaincre à nouveau son public. Mon nouvel album restera toujours dans la même école hip-hop, électro avec une influence rumba congolaise… Le reste s’affinera pendant la composition. Ça sera aussi un retour aux sources, à la musique que j’écoutais petit.
Asmaa Chaidi Bahraoui |