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Al Omrane Les enjeux d’ une succession 
Actuel N°72, vendredi 10 décembre 2010
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Villes sans bidonvilles, villes nouvelles, programmes de logements sociaux... autant de grands chantiers qui se sont soldĂ©s par des retards, des loupĂ©s et mĂȘme des malversations. Alors que les critiques fusent de toutes parts,  Badr Kanouni est nommĂ©  Ă  la tĂȘte d’Al Omrane.  Le jeune textilien rĂ©ussira- t-il Ă  sauver le navire ?


***

DĂ©licate ! C’est le moins que l’on puisse dire de la mission dont vient d’hĂ©riter le jeune Badr Kanouni, nouveau prĂ©sident du directoire du holding public, Al Omrane. Ancien patron de l’entreprise textile Tavex (dirigĂ©e par le passĂ© par un certain Salaheddine Mezouar), le jeune manager devra redorer l’image d’un groupe ternie par une succession de loupĂ©s, aggravĂ©e par un dĂ©ficit de gestion que dĂ©noncent de plus en plus de parlementaires.

La plupart des grands chantiers lancĂ©s en grande pompe six ans plus tĂŽt, portant Ă  la fois sur la rĂ©sorption de bidonvilles, la lutte contre l’habitat insalubre et la crĂ©ation de villes nouvelles, piĂ©tinent. Les chiffres rassurants et les bilans encourageants, brandis Ă  chaque fin d’exercice, n’auront pas suffi Ă  occulter les carences du top management d’Al Omrane qui n’a cessĂ© de claironner que « le bilan des Villes sans bidonvilles (VSB) Ă©tait positif » 

 

Echec cuisant

En fait, la rĂ©alitĂ© est tout autre. Ă  l’approche de l’échĂ©ance 2012, sur les 85 villes ciblĂ©es par le programme Villes sans bidonvilles en 2004, 43 ne sont toujours pas dĂ©barrassĂ©es de ce flĂ©au. Et les grandes villes comme Casablanca, SalĂ©, Marrakech et KĂ©nitra n’arrivent pas Ă  rĂ©duire le nombre de leurs bidonvilles. Pis encore, le nombre des mĂ©nages qui y habitent augmente d’annĂ©e en annĂ©e. Une ville comme Casablanca, qui illustre l’échec cuisant de ce plan, regroupe, Ă  elle seule, prĂšs du tiers des bidonvilles du pays. Au total, 163 000 baraques ont Ă©tĂ© dĂ©truites Ă  ce jour et 813 000 habitants ont pu ĂȘtre recasĂ©s. Or, l’objectif initial du plan Ă©tait de recaser 324 000 mĂ©nages, soit 1,5 million d’habitants. Lors de la prĂ©sentation du budget de son dĂ©partement, le ministre de l’Habitat, Ahmed Taoufiq Hejira, a Ă©tĂ© pris Ă  parti par des dĂ©putĂ©s du PJD. Ces derniers lui reprochent notamment les lenteurs du programme VSB et l’inefficacitĂ© de l’approche adoptĂ©e face Ă  la prolifĂ©ration de ce flĂ©au. « En 2010, l’on parle de 327 000 baraques contre 210 000 en 2004, soit 117 000 unitĂ©s de plus en six ans ! », s’indigne Abellah Bwano, dĂ©putĂ© Pjdiste. « Mais Ă  quel niveau se situent les blocages ? », s’interroge le parlementaire qui pointe du doigt le bilan mitigĂ© d’Al Omrane. Sur le plan financier, le programme Villes sans bidonvilles bĂ©nĂ©ficie d’un investissement de prĂšs de 25 milliards de dirhams, dont une subvention du Fonds SolidaritĂ© pour l’Habitat de 10 milliards de dirhams environ. Cette enveloppe a Ă©tĂ© renforcĂ©e rĂ©cemment par un prĂȘt d’un montant de 50 millions d’euros accordĂ© par l’AFD, dĂ©diĂ© au financement des activitĂ©s du groupe pour les annĂ©es 2010-2012, notamment ses actions pour la rĂ©sorption de bidonvilles. En fait, pour justifier son bilan mitigĂ©, le holding n’a cessĂ© d’invoquer l’insuffisance du patrimoine foncier urbanisable et l’augmentation incontrĂŽlĂ©e du nombre des mĂ©nages occupant les baraques, augmentation favorisĂ©e par les retards de mise en Ɠuvre des programmes de recasement. Selon les dĂ©tracteurs d’Al Omrane, ces arguments ne sont pas convaincants.

 

Programme qui peine à décoller

Autre programme phare qui piĂ©tine et auquel doit s’attaquer d’urgence le jeune prĂ©sident du directoire : le logement social, notamment dans sa partie « à faible valeur immobiliĂšre totale » (VIT) et dont les unitĂ©s sont commercialisĂ©es Ă  140 000 dirhams. En rĂ©alitĂ©, ce programme peine Ă  dĂ©coller depuis son lancement. Ă  ce jour, une vingtaine de conventions seulement  ont Ă©tĂ© signĂ©es avec des promoteurs. Pour justifier leur dĂ©sintĂ©rĂȘt, les promoteurs privĂ©s dĂ©noncent le niveau Ă©levĂ© des prix des terrains viabilisĂ©s par le holding.

Autre tĂąche ardue dĂ©volue Ă  Badr Kanouni : le programme des villes nouvelles. Indissociable de l’initiative Villes sans bidonvilles. Ce programme est censĂ© dĂ©sengorger les grandes agglomĂ©rations et devrait se traduire par la crĂ©ation d’une quinzaine de villes d’ici 2020. Ă  mi-parcours, ce programme accuse de gros retards et provoque de multiples dĂ©ceptions. L’image d’Al Omrane est encore entachĂ©e par l’affaire de Tamesna. Dossier mal gĂ©rĂ© dont les rebondissements n’ont pas fini d’éclabousser le holding. De plus, hormis Tamansourt et Tamesna, les autres villes nouvelles se font toujours attendre, la plupart Ă©tant encore Ă  l’étude. Le nouveau patron d’Al Omrane saura-t-il rattraper le retard et rĂ©soudre les blocages qui handicapent l’avancĂ©e des diffĂ©rents programmes pilotĂ©s par l’amĂ©nageur dĂ©veloppeur public ? Lourde responsabilitĂ©...

Khadija El Hassani

Citation

Une image ternie aggravée par un déficit de gestion.

GenĂšse d’un gĂ©ant

A l’origine du groupe Al Omrane, trois entreprises d’état (Attacharouk, l’Agence nationale de lutte contre l’habitat insalubre et la SNEC) et sept Ă©tablissements rĂ©gionaux d’amĂ©nagement et de construction (ERAC), dont la plupart Ă©taient au bord du gouffre financier. En juillet 2004, les trois premiĂšres entreprises fusionnent alors qu’une opĂ©ration d’épuration des dettes des ERAC est entamĂ©e. En 2007, le groupe dĂ©marre sa transformation en SA. En 2009, il rĂ©alise un volume d’investissement de 8,3 milliards de dirhams.

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