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2M : Succès public, fiasco critique
actuel n°51, samedi 12 juin 2010
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Le meilleur de la création nationale est programmé cette semaine en exclusivité sur une télé…tunisienne ! Pourquoi 2M est à la traîne dans sa programmation mais pas dans les sondages.


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Cette semaine du Maroc sur Nessma est un événement sans précédent. Et la chaîne tunisienne a commencé par bien le vendre, jugez-en par vous-même : « Une semaine pour mieux apprécier l’expérience marocaine, pour fêter le génie et la créativité de ce pays fascinant. À travers une programmation de fictions et de documentaires de qualité, Nessma ambitionne de refléter les multiples facettes de ce Maroc pluriel, ancré dans ses traditions mais ouvert sur le monde et résolument tourné vers l’avenir. » Au-delà du célèbre adage, « les portes de l’enfer sont pavées de bonnes intentions », Nessma entend par « Maroc pluriel » Casanegra, Marock, Le Blues des Chikhates, des invités comme Aïcha Ech-Chenna ou Najat Mjid… soit, en réalité, tout ce qui ne passe pas sur les chaînes de télévision marocaines. Et, cerise sur le gâteau, ont été également invités Nabil Benabdellah, l’ancien ministre de la Communication et Abderrahman Tazi, qui en plus d’être le réalisateur de l’inoubliable À la recherche du mari de ma femme, est surtout l’ancien directeur de production de 2M, qui faisait la pluie et le beau temps en matière de fiction sur la chaîne.

L’ironie de l’histoire est que sur le cahier des charges de 2M, on recourt aux mêmes envolées lyriques pour définir les missions de la chaîne : « Elle soutient les valeurs de démocratie, de liberté, de tolérance, d’ouverture et de modernité, et favorise le dialogue et la cohésion nationale, dans le respect des individualités, des pensées et des croyances. Elle garantit le respect de la pluralité d’expression des courants de pensée et d’opinion. »

« 2M nous rassemble »-t-elle vraiment ?

Déjà sur le plan conceptuel, « favoriser à la fois le dialogue et la cohésion nationale » dans un pays où les contrastes entre les différentes catégories sociales sont hypertrophiés est une ambition quelque peu démesurée. Des fondamentalistes aux «modernistes » en passant par les conservateurs, la société marocaine est plutôt divisée. Mais si en plus on sait qui regarde 2M, alors on comprend pourquoi on a droit à des séries mexicaines ou turques doublées en darija et des épisodes tronçonnés pour des raisons « morales ». « Notre seule limite, nous dit Zouheir Zrioui, le directeur de l’antenne de 2M, c’est le respect de la loi, le respect du cahier des charges et le respect du public. » En réalité, la famille marocaine qui regarde les chaînes nationales est conservatrice et puritaine. Les focus groupes qu’organise la chaîne ont démontré que le moindre écart – entendez par là une fille en maillot à la plage, un baiser amoureux ou un dialogue jugé tendancieux – provoque le rejet immédiat des téléspectateurs qui déclarent regarder le petit écran en famille.

Casanegra, qui a été coproduit par la chaîne, a les faveurs de Nessma ; mais est-ce bien légal quand on sait qu’une chaîne qui coproduit une fiction a l’exclusivité de la diffusion pendant cinq ans. 2M va-t-elle réagir ? En même temps on ne peut s’empêcher de penser que la deuxième chaîne est handicapée par son public et aurait du mal à passer Casanegra où l’on trouve pêle-mêle des scènes violentes, osées et des dialogues de rue considérés comme « orduriers ».

Des sélections ciblées

Noureddine Lakhmari, quant à lui, est clair là-dessus : « J’aurais préféré que Casanegra passe sur 2M, mais je comprends leurs contraintes. Ce que je peux affirmer c’est que sans 2M, le film n’aurait pas vu le jour, je suis reconnaissant à la chaîne d’avoir coproduit le film. »

Autre tĂ©moignage. Mohamed Achaour qui a vu son Zorroh adoptĂ© et diffusĂ© par Nessma, abonde dans le sens de Noureddine Lakhmari : « C’est dommage que les chaĂ®nes ne soient pas ouvertes sur tous les projets. Je ne connais pas leur ligne Ă©ditoriale, mais on ne passe qu’une catĂ©gorie d’artistes, qu’on n’arrĂŞte pas de voir et de revoir, comme Khiary ou SaĂŻd Naciri. Ils devraient diversifier leur offre pour que chacun puisse s’y retrouver. Nous sommes des millions de personnes, il y a de la place pour tout le monde et il faut la crĂ©er. » Zorroh, pour ceux qui n’en ont jamais entendu parler, est un divertissement bourrĂ© d’humour, Ă  mi-chemin entre les Monty Pythons et Les Nuls. 

Les projets qui sont proposés à 2M passent ou sont censés passer par plusieurs filtres, comités de lecture, comités de visionnage, et ce dans le but d’avoir des avis multiples avant de trancher. Mais l’on peut se poser la même question que Achaour : pourquoi sont-ce toujours les mêmes que l’on voit programmés ? Pendant le mois de ramadan où les taux d’audience sont les plus élevés, c’est effectivement Khyari et Saïd Naciri qui tiennent la vedette année après année. Mais quand, par ailleurs, on sonde l’avis du public en direct chaque année sur les ondes radio, on se rend compte que la cible convoitée est déçue par ce qu’on lui propose. Les choix se font-ils réellement de manière rationnelle ? Y a-t-il des passe-droits ? De la corruption ? Du copinage ?

Un cinéaste juge et parti

Il y a eu plusieurs périodes 2M, et les deux dernières sont édifiantes. Du temps de Noureddine Sail, la priorité était donnée à la fiction, avec à la tête de la production, Abderrahman Tazi. Encore une fois, il était rare que l’on découvre de nouveaux talents. De plus, un cinéaste qui chapeaute une direction fiction est à la fois juge et partie… Il faut savoir aussi qu’une heure de production nationale coûte entre huit et dix fois plus cher qu’une acquisition de feuilleton étranger par exemple, c’est dire qu’il y a un vrai gâteau à partager. Et 70 à 80 millions de dirhams par an sont dépensés pour la production interne.

Du temps de Benali, la priorité était donnée au divertissement ; c’est là qu’ont été lancées des émissions comme Studio 2M ou Challenger qui avaient au moins le mérite de lancer des jeunes sur le marché et de découvrir des talents. Aujourd’hui, on a la pénible sensation que la chaîne bafouille. En dehors des doublages en darija, il n’y a pas de vraie nouveauté. On vous dira qu’on ne change pas une équipe gagnante.

Plus de la moitié de l’audience de 2M est constituée de la classe populaire : les cibles C et D ont visiblement les programmes qu’elles veulent sur l’ensemble de l’année et sont arabophones. Les catégories A et B, quant à elles, sont majoritairement francophones et n’intéressent pas vraiment la télévision publique. Si le maître mot de la chaîne est la proximité et si elle doit refléter la société à laquelle elle s’adresse, alors 2M répond à une partie de ses missions. Mais qu’on ne nous parle ni de diversité, ni de respect des individualités, ni de tolérance ou d’ouverture !

Bahaa Trabelsi


Trois questions Ă  Moez Sinoui

Directeur de la communication de Nessma TV

Après une période de calme plat, Nessma semble vouloir revenir en force et lorgne avec convoitise le public marocain.

actuel. Qu'est-ce qui vous a motivé pour diffuser Casanegra et Marock alors que les chaînes nationales marocaines n'ont pas osé le faire?

Moez Sinoui. Nessma est une chaĂ®ne pri vĂ©e, Ă  vocation maghrĂ©bine, qui n’a pas forcĂ©ment les mĂŞmes critères de sĂ©lection de ses programmes que les deux chaĂ®nes publiques marocaines auxquelles vous faites rĂ©fĂ©rence. De surcroĂ®t, Casanegra et Marock sont des productions nationales marocaines et la politique de Nessma consiste, entre autres, Ă  promouvoir la production cinĂ© matographique maghrĂ©bine.

Seriez-vous prĂŞt Ă  apporter votre support Ă  des rĂ©alisateurs marocains « non grata » sur les chaĂ®nes marocaines ?

Tout est question d’appréciation et cha cun adopte les critères qui lui semblent les plus à même d’encourager la création. Nous accordons, chez Nessma, une im portance particulière à l’encouragement et au soutien des créateurs maghrébins, et à la promotion de leurs oeuvres pour autant que la qualité de ces oeuvres soit reconnue comme telle.

Le fait de diffuser des films « polémiques » sur votre chaîne pourrait-il influer en votre faveur?

Nous n’agissons pas au niveau de nos pro grammes avec l’intention arrêtée de provo quer la polémique. Il se trouve simplement que parmi les productions maghrébines et non maghrébines que nous diffusons, certaines créent, à tort ou à raison, une polémique et d’autres pas. Ce qui est le plus important pour nous, c’est d’offrir à nos téléspectateurs des contenus qui, dans la mesure du possible, véhiculent du sens, répondent à une attente, offrent de la qualité et tant mieux si, en plus de tout cela, ils interpellent. n

Propos recueillis par Sabel Da Costa


La grande chaîne qui monte

À en croire les chiffres, 2M a la cote auprès du public marocain, seulement ces taux n’occultent en rien certaines critiques, aussi « minoritaires » soient-elles.

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A ses débuts, 2M représentait une sorte de petite révolution au Maroc. Son esprit était dif férent de la première chaîne et les téléspectateurs avaient enfin accès à une grille de programmes variés et intéressants. Aujourd’hui, la donne est tout autre. Ce n’est pas que les programmes soient devenus médiocres, mais disons que 2M a changé de visage au fil des directions qui s’y sont succédé. » Pour le réalisateur Adil Fa dili, la chaîne semble avoir du mal à trouver son style depuis son rachat par l’État. Pourtant à y regarder de plus près, le style de 2M existe bel et bien !

Vox populi !

Contrastant singulièrement avec la révolution initiale, le relooking de 2M prend pour tant racine dans une volonté populaire et forcément… ma joritaire. « Nos programmes sont conçus de manière à fa voriser l’adhésion de la plus large audience », nous a affirmé Zouheir Zrioui, le directeur de l’antenne et des pro grammes, dont les propos sont corroborés par les études de Marocmétrie et celles du Groupement des annonceurs du Maroc. L’analyse de plusieurs rapports allant de 2009 à avril 2010, permet de se faire une idée sur la question. En janvier 2009, la chaîne concentrait à elle seule 20,07 % du taux d’audience sur l’ensemble de la jour née et 17,29 % en prime time. Elle a connu une nouvelle progression en janvier 2010, lui octroyant 26,9 % des audiences sur l’en semble de la journée et 23,4 % en prime time. Une enquête concomitante a per mis de dégager les émissions concentrant le plus grand nombre de téléspectateurs ; comme on pouvait s’en douter, les feuille tons mexicains se taillent la part du lion avec un taux de 57,9 % (5 334 000 spectateurs) en janvier 2010, suivis de près par les téléfilms marocains et les magazines d’enquête. La configuration reste plus ou moins similaire sur les autres mois disponibles de 2010. Le fait est que 2M accapare à elle seule un peu plus du quart de l’audience marocaine avec des pics pour les telenovelas, séries indiennes ou turques, les magazines et… les téléfilms marocains qui, d’après Zouheir Zrioui, séduisent de plus en plus de téléspectateurs, et orientent les ef forts de production de la chaîne. Voilà qui renseigne finalement sur un style cousu de programmes « bateaux » mais ayant les faveurs d’un public essentiellement composé de la classe populaire (45,2 %) et des ménages ruraux (40,01 %) contre seulement 14,6 % des classes moyennes à élevées. Le choix est vite fait puisqu’il est d’ordre alimentaire… Procter et Aïcha préfèrent les catégories C et D.

L’autre public

Il y a ceux qui trouvent largement leur compte à regarder Mouhanad batifoler avec Noor, le tout ponctué de publicités pour lessives, et ceux qui trouvent la chose absurde. Appartenant à une certaine élite, les 14,6 % précités tendent pour la plupart à limiter leurs contacts avec les chaînes nationales aux séquences d’information quotidiennes ou aux reportages de société.

Blagues, commentaires mais surtout co lère de la part d’une frange de la popula tion qui se sent pratiquement « insultée » par la programmation. Résultat : elle zappe un peu plus au nord ou au Moyen-Orient. D’autres reprochent également à la chaîne son décalage par rapport à la réalité ma rocaine et à la culture arabe. Lorsque les coups de gueule ne viennent pas du public, ils arrivent en vrac du côté des cinéastes eux-mêmes. « Cela fait exactement trois ans que je suis interdit de séjour sur cette chaîne, laquelle ne se gêne pas en revanche pour passer des séries inqualifiables et des téléfilms indignes des citoyens », s’insurge Hakim Nouri, dont la réaction envers les séries turques et mexicaines est tout aussi virulente. « C’est grave de voir qu’avec tous les cinéastes et les acteurs que nous avons au Maroc, 2M éprouve le besoin d’impor ter ce genre de feuilletons. Et c’est d’autant plus grave que pendant ce temps, des ar tistes marocains chôment. Permettez-moi de douter de l’honnêteté et de la probité de la commission de lecture des scénarios, qui ne tient compte ni de la notoriété du réalisateur, ni de sa filmographie, ni de l’audience que ses films génèrent. » Pour le réalisateur Adil Fadili, « c’est bien dommage de passer à côté de projets intéres sants pour les voir ensuite atterrir sur des chaînes étrangères ». Des réflexions très si gnificatives quand on connaît le contexte actuel d’une chaîne qui remporte peut-être les suffrages de son public habituel, mais perd forcément au change de l’autre côté…

Sabel Da Costa

 


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B I L L E T : La télé de Hassan II

Qui se rappelle encore de ces couscoussiers attachés à ces antennes-râteaux qui peuplaient les terrasses des immeubles chics de la capitale au début des années 80 ? À l’époque, Hassan II venait d’installer au sein du palais royal, une immense antenne parabolique qui captait, entre autres, TV5. Les fa meux couscoussiers permettaient à la classe moyenne rbatie de regar der les télés étrangères en même temps que Hassan II. C’était l’unique moyen d’échapper aux JT sopori fiques de la TVM ou aux films ha chés à la tronçonneuse par une cen sure féroce, le tout pour un temps de diffusion de quatre à cinq heures par jour au grand maximum. Au début, il y avait une seule chaîne et la censure s’exerçait directe ment sur cette télévision d’État qui avait commencé à émettre en 1962, quelques mois à peine après l'intronisation de Hassan II.

En 50 ans, la télé de papa n’a pas pris une ride. Si les JT concernant les activités royales ne sont pas toujours aussi longs, les commen taires restent marqués par le même ton. On ne se débarrasse pas d’un Mustapha Alaoui aussi allègrement. Que la télévi sion soit un repaire de gens bien pensants est tout à fait normal puisqu’elle a remplacé le berrah qui faisait remonter les décisions du Makhzen jusqu’aux douars les plus reculés ; mais ce qui est étonnant, c'est de voir à quel point la médio crité a pénétré toutes les sphères du petit écran. Un nivellement des es prits par le bas auquel la TVM et 2M ne sont pas étrangères. Pourtant, c’est bien Hassan II qui avait mis le paquet pour que cette télévision, lancée en grande pompe en 1989 par le groupe ONA, soit une institution autonome, analogue à celles des grandes démocraties.

Abdellatif El Azizi


Zouheir Zrioui, directeur de l'antenne et des programmes de 2M

« Respecter la sensibilité culturelle du téléspectateur »

Ayant intégré 2M depuis son lancement en 1989, Zouheir Zrioui a vu grandir le bébé et est passé par différents postes avant d’occuper celui de directeur d’antenne et de programmation. Cet homme que l’on dit discret, humble et bosseur, a su s’élever au sein de sa hiérarchie au point de devenir l’un des incontournables de la chaîne.

On dit 2M très conservatrice, ce conservatisme ne va-t-il pas vous scléroser à la longue ?

Je ne suis pas d’accord sur le constat. Il n’y a pas de conservatisme et notre seule limite, c’est le respect de la loi, le respect du cahier des charges et le respect du public. Nous restons attachés à nos valeurs et à notre positionnement de proximité et de professionnalisme, de convivialité et de modernité, d’ouverture et de pluralité. Le respect de la sensibilité culturelle du téléspectateur et une offre exclusive en termes de proximité, notamment dans les domaines de l’information, de la fiction et du sport, nous font bénéficier d’une audience fidélisée et en progression régulière.

Nessma TV a lancé une semaine marocaine et a programmé tous les films polémiques que 2M n’a pas voulu diffuser (Casanegra, Marock…), qu’en pensez-vous ?

Je ne peux me prononcer sur la programmation des autres chaînes. Chaque chaîne a sa propre stratégie, ses propres objectifs. Nous aussi, nous avons déjà diffusé des films africains ou tunisiens.

Beaucoup de téléspectateurs ont tendance à aller chercher ailleurs ce qu’ils ne trouvent pas chez vous, comment réduire ce phénomène et limiter la concurrence?

Il a été maintes fois prouvé que les téléspectateurs marocains préfèrent la production nationale et les programmes de proximité. À partir de ce constat, si on renforce ces deux volets, les téléspectateurs n’iront plus chercher ailleurs.

Etes-vous tenus de diffuser tous les films que vous coproduisez ?

Contractuellement non. Mais nous diffusons tout ce que nous coproduisons sauf quand le produit ne correspond pas aux normes de qualitĂ© exigĂ©es par la chaĂ®ne ou est en contradiction avec la ligne Ă©ditoriale, la loi ou le cahier des charges. Il faut toutefois prĂ©ciser que le cahier des charges nous impose la diffusion du cinĂ©ma national en prime time, or certains films sont difficilement programmables dans cette tranche horaire en raison de la nature des thèmes traitĂ©s et du langage utilisĂ©. 

Quels sont vos objectifs par rapport Ă  votre audience ?

Notre objectif est clair : maximiser le taux d’audience de manière à être suivi par la plus large audience possible.Tout en respectant le cahier des charges bien entendu.

Sabel Da Costa

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Déçue, la Génération 2M va voir ailleurs

Les jeunes urbains se détournent de ce qui fut leur chaîne fétiche. 2M s’est ringardisée pendant que l’offre se diversifiait.

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Baraka man lahmôda 2M/RTM. » Pour tous ceux qui en ont marre de supporter cette « télévision pou belle » avec ses sitcoms qui font plus pleurer que rire et que nous payons de nos poches : 4 779 personnes. DM reddi lina flousna ! (Rends-nous notre argent) : 4791 personnes. 2M TV, groupe of ficiel : 1 550 personnes… Sur Facebook, le réseau social de la jeunesse marocaine, le verdict est sans appel : 2M et les autres re poussent plus qu’elles ne séduisent. Pire, après la journée sans portable, un groupe vient de se lancer pour réclamer une jour née sans télé marocaine le 30 juin !

Cette indignation générale n’a pas toujours existé, puisque lors de sa création en 1989, 2M a suscité un véritable engouement. Elle représentait la nouvelle bulle d’air frais dans notre champ audiovisuel, avec une programmation novatrice qui ratissait large. Mais que s’est-il réellement passé depuis ?

SĂ©ries turques en darija

Le principal reproche des jeunes Marocains envers 2M est la détérioration radicale de ses programmes de divertissements. Pen dant les jours de semaine, on avait droit à une émission quotidienne de musique avec toutes les nouveautés, les meilleures séries en vogue de l’époque (Sauvé par le gang ; Buffy contre les vampires ; Felicity…). Les soirées des week-ends étaient spéciales elles-aussi avec la diffusion des meilleurs concerts d’artistes occidentaux, les grandes cérémonies comme les MTV music awards, ou les concerts de grands groupes de hard rock comme en 92 avec la diffusion d’un spécial Metallica ! Le cinéma n’était pas en reste, les soirées du dimanche et du mardi affichaient des films de grande qualité ; quant au lundi soir, c’était le rendez-vous des incontournables, les séries cultes (X-Files, le Caméléon).

C’est avec nostalgie qu’une jeune femme ra conte qu’il fut un temps où elle regardait 2M sans modération au point où tout le monde croyait qu’elle ne décrocherait pas son bac. On a changé de monde. Comme le souligne Omar El Bizi, réalisateur et Prix du court-métrage de 2M pour son film C’est moi : « Les programmes de 2M changent tous les deux mois environ, ce qui empêche de fidéliser le public. De plus, plusieurs séries diffusées sur la chaîne sont déjà consommées par le public sur d'autres chaînes arabes ! »Depuis quelques années, la vague des telenovelas sud-américaines, le flux des séries turques doublées en darija, la tendance à orientali ser des programmes de divertissement et la diffusion des films, qu’on a vus au moins trois fois, ont amorcé une réelle rupture avec la chaîne, surtout quand Internet et d’autres chaînes étaient en quête de plus d’audience et de part de marchés. Omar Radi, journaliste et militant du mouvement Mali ne regarde plus 2M même si c’était la chaîne de référence de son enfance : « 2M ne suit plus sa génération ni les attentes de cette dernière. » Du côté du sport, le constat n’est pas meilleur. Face aux résultats moyens de notre championnat national, le public marocain s’intéressait de plus en plus aux championnats européens ( espagnol, an glais, français…) qui étaient transmis sur 2M, tout comme la Ligue des champions. Or, ces dernières années, on est passé de tout à rien du tout. Et l’annulation mysté rieuse de l’émission à succès Planète Foot a laissé un vide qu’aucune émission de sport national n’a réussi à combler. Ainsi, à la veille de la Coupe du monde, on assiste à une ruée vers des chaînes plus spécialisées, toutes nationalités confondues.

Zapping tous azimuts

La rupture entre les jeunes et leur chaîne, qui représentait une sorte de compagnon au quotidien, s’est faite au profit d’autres chaînes francophones ou du Moyen-Orient, de chaînes spécialisées ou même d’autres canaux. Une première catégorie, une cer taine élite francophone, s’est tournée vers des chaînes qui lui offrent quasiment les mêmes programmes de divertissement et de fictions, comme TF1, M6, ou encore les chaînes de France Télévisions. Une deu xième catégorie a trouvé son bonheur dans les chaînes thématiques de sport, de mu sique, de fictions… ou dans le catalogue des chaînes qu’offre MBC. Surtout depuis que la francophonie a perdu du terrain face à une culture anglo-saxonne en pleine expansion. MBC en est d'ailleurs l'un des plus gros dif fuseurs avec son interminable programme de films en VO, d’émissions de téléréalité tout droit importées de chez l’oncle Sam ou des talks-hows inconnus il y a quelques années mais devenus très appréciés au jourd’hui dans notre pays comme Oprah Winfrey ou Docteur Phil. Enfin une dernière catégorie a rompu tout lien avec la télévi sion au profit d’Internet. Pourquoi en effet attendre que l’épisode de votre série passe à la télé quand vous avez la possibilité de le regarder quelques heures après sa dif fusion aux États-Unis via des plateformes de streaming, ou de le télécharger ?

Meriama Moutik

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Actuel n°63 : Ex-ministres :  y a-t-il une vie après le pouvoir ?
Actuel n°62 : Le code de la route expliquĂ© par Ghellab
Actuel n°61 : La vie sexuelle des Saoudiennes… racontĂ©e par une Marocaine
Actuel n°60 : Chikhates, shit et chicha 
N°59 : Eric Gerets, la fin du suspense ?
N°58 : Onze ans, onze projets 
N°57 : Raid sur le kif 
N°56 : Sea, Sun & Ramadan 
N°55 : Casablanca, mais qui est responsable de cette pagaille ?
N°54 : Ces ex-gauchistes qui nous gouvernent 
N°53 : Au cĹ“ur de la prostitution marocaine en Espagne 
N°52 : DiplĂ´mĂ©s chĂ´meurs : le gouvernement pris au piège
N°51 : 2M : Succès public, fiasco critique
N°50 : L’amĂ©rique et nous 
N°49 : Crise, le Maroc en danger ?
N°48 : Les 30 Rbatis qui comptent 
N°47 : Pourquoi El Fassi doit partir 
N°46 : Chirurgie esthĂ©tique :  plus belle, tu meurs
N°45 : McKinsey dans la ligne de mire  
N°44 : Trafic sur les biens des Ă©trangers 
N°43 : Avec les Ă©vadĂ©s de Tindouf 
N°42 : GCM / Tamesna : Un scandale en bĂ©ton !
N°41 : ONA - SNI: Ils ont osĂ©
N°40 : Enseignement: Missions Ă  tout prix
N°39 : Le Maroc, terre d'accueil des espions 
N°38 : Bleu Blanc Beurk 
N°37 : Boutchichis Les francs-maçons du Maroc
N°36 : Hamid Chabat rĂ©veille les vieux dĂ©mons
N°35 : Vies brisĂ©es 
N°34 : Maires Ceux qui bossent et ceux qui bullent
N°33 : Botola Combien gagnent nos joueurs
N°32 : Sexe, alcool, haschich, jeux… Les 7 vices des Marocains
N°31 : Tanger Le dossier noir des inondations
 
 
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